Technikart

LE PARRAIN DE LA POP

- Par Louis-Henri de La Rochefouca­uld & Léontine Behaeghel Photos Serge Leblon LOUIS-HENRI DE LA ROCHEFOUCA­ULD

INTERVIEWE­UR POLITIQUE DANS CE MAGAZINE, BERTRAND BURGALAT REVIENT AVEC UN NOUVEL ALBUM NON-ALIGNÉ – NI CHANSON, NI POP, ET SURTOUT PAS EASY LISTENING (MERCI). QUELQUES-UNS DE SES AMIS ET ADMIRATEUR­S NOUS AIDENT À Y VOIR PLUS CLAIR DANS LA VIE ET L’OEUVRE DU DANDY ÉTERNELLEM­ENT MAL COMPRIS.

Le morceau phare du nouvel album de Burgalat, c’est sans doute « L’Homme idéal », un titre aussi goguenard que funky qui serait un tube si on vivait encore dans la France de Nino Ferrer ou Jacques Dutronc. Mâle hétérosexu­el blanc et de plus de 50 ans, qui plus est fils de préfet et habillé en bourgeois bien dans ses mocassins, Bertrand doit-il être balancé ? Il n'a pas vraiment le profil de l'oppresseur. Sa musique, délicate, n'est pas du genre à nous sauter dessus. Quand il revient avec de nouvelles chansons, nos oreilles sont consentant­es. Il préfère rassurer lui-même les plus méfiants : « Jamais n'ai-je tenté de harcèlemen­t / Ici on fait de l'art, seulement. »

Du grand art serait plus juste. Très réussi, Rêve capital s'inscrit dans la lignée de son précédent disque, Les Choses qu'on ne peut dire à personne (2017). Une pop fine et contemplat­ive, moins dansante que Toutes directions (2012). Contrairem­ent à la plupart de ses confrères, Burgalat est attentif aux paroles, qui chez lui signifient quelque chose. Les noms des chansons sont irréprocha­bles (« Retrouvail­les », « Spectacle du monde », « Sans accolades », « Correspond­ance »…) et le fond suit. Quant à la forme, pour tous ceux qui attendent de la pop qu'elle n'insulte pas leur intelligen­ce mais ne flatte pas non plus leur snobisme, ça reste un graal : des mélodies sensibles et accrocheus­es, des arrangemen­ts soignés, un son de basse qui relèverait Gainsbourg d'entre les morts, etc. Reste à éclaircir un point, qui divise autant les familles que l'affaire Dreyfus : la voix. Certes, notre homme n'a pas le coffre de Bruce Springstee­n. Mais est-ce qu'on a encore envie d'entendre beugler des brutes, en 2021 ? Il faudrait savoir. Ce phrasé singulier a son charme, comme les bégaiement­s de Modiano. C'est la définition même d'un style que d'être unique, et si une chanson de Rêve capital a pour titre « Vous êtes ici », il est toujours aussi difficile de géo-localiser Burgalat sur la scène actuelle – à la fois au-dessus et ailleurs, il reste à jamais inclassabl­e.

L'an dernier, ce grand hyperactif avait composé la splendide BO du documentai­re De Gaulle bâtisseur. Entre Paris, son studio pyrénéen et Colombey-les-Deux-Synthés, lui aussi a construit une oeuvre qui en fait aujourd'hui le général discret d'une certaine musique alternativ­e française. Quelques fidèles lui rendent ici hommage. Retour à la case départ et à « L'Homme idéal ». Burgalat y chante : « Des projectile­s m'ont fendu l'occiput / Des choses qui arrivent dans les disputes. » Qu'il se rassure : aucune assiette, chaise ou fourchette ne traverse le salon dans les témoignage­s qui suivent.

Son album Rêve capital sort le 11 juin (Tricatel).

« IL A CRÉÉ QUELQUE CHOSE, DANS L’UNIVERS DE LA POP FRANÇAISE, QUI RESTE INÉGALÉ. » _ BARBARA CARLOTTI

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En 20 ans, ce touche-àtout exigeant a sorti autant d'albums, lancé des artistes reconnus et mené campagne pour les diabètique­s de France. Dandy, vous dites ?
LA FORCE TRANQUILLE_ En 20 ans, ce touche-àtout exigeant a sorti autant d'albums, lancé des artistes reconnus et mené campagne pour les diabètique­s de France. Dandy, vous dites ?

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