LES SUPER-HÉROS DE LA LECTURE
Garanti sans pilules smart, la lecture rapide demande entraînement et méthodologie. Notre reporter s’est rendue à Dugny (93) pour rencontrer les champions de la discipline. Temps de lecture de cet article : 3 secondes.
Dugny, à 40 minutes au nord de Paris. Je m'y rends (et m'y perds) pour y être à 19 heures, un jeudi soir de mai, et retrouver le champion du monde de la lecture rapide (et auteur d'un livre sur le sujet*), Mohammed Koussa. « C'est assez simple, avoue-t-il tout de go en m'invitant à m'installer près de deux super-lecteurs dans cette grande salle des fêtes. C'est une méthodologie d'organisation de l'information, des techniques de déplacement avec les yeux et de concentration ». Capable de lire un livre de 450 pages en 90 minutes, cet homme au regard vif et au sourire chaleureux m'invite à observer ces deux étudiants installés derrière une vieille table d'école.
En à peine deux secondes, leurs mains et leurs yeux balayent les pages comme s'ils buvaient les mots du livre en une seule gorgée. Imperturbables, ils avancent dans leur lecture avec une rapidité telle que je me demande s'ils comprennent vraiment le livre qu'ils ont entre les mains. Apparemment, oui.
Je lui demande de me montrer la combine. « Il faut apprendre à déplacer rapidement l 'oeil, mais avec méthodologie, commence-t-il. La manière dont les gens ont l'habitude d'utiliser leurs yeux n'est pas adaptée à une lecture rapide. Alors quand on va modifier la façon de déplacer nos yeux, cela va avoir un impact sur la mémorisation. Le déplacement minimum pour avoir une bonne mémorisation, c'est le débit de voix moyen d'une personne. L'école nous a appris le contraire : quand un élève ne lit pas bien, les professeurs ont tendance à lui dire de lire plus doucement. Sauf que le cerveau de l'être humain n'arrive pas à reconstituer le message si on lui laisse trop de temps entre des syllabes ou des mots ».
SPEED-READERS
Ces astuces, il les tient grâce à Tony Buzan, un psychologue anglais oeuvrant dans les années 1970, à l'origine du « mind mapping » (« carte heuristique » ou « carte mentale ») : créer un schéma visuel pour retenir des informations. Mohammed se veut rassurant : n'importe qui, selon lui, peut, en suivant cette technique, lire rapidement et comprendre ce qui est lu. C'est le cas de Rijwan, 20 ans, l'un des deux speed-readers présents. Ce garçon au grand sourire et à lunettes a commencé la formation de Mohammed en avril dernier et s'entraîne quotidiennement. « À l'origine, je détestais la lecture, surtout quand j'étais à l'école, avoue-t-il. Disons que la lecture ne me parlait vraiment pas. Mais du coup, en optimisant mon temps et en choisissant bien mes lectures, j'arrive à en faire un atout. » Rijwan travaille pour une association humanitaire qui installe des panneaux photovoltaïques au Burkina Faso : « Je n'ai aucune notion dans l'installation de ce genre de panneaux. Alors, j'ai acheté quelques manuels techniques sur cette technologie. Le premier, je l'ai lu en 1 h 45 et j'ai capté les informations dont j'avais besoin. Je n'ai pas les compétences d'un technicien, parce qu'il y a une différence entre la théorie et la pratique, mais maintenant, j'ai l'aspect théorique et j'apprendrai la pratique là-bas. Merci, la
super-lecture ! »
*La Lecture rapide de Mohammed Koussa (éditions Retz, 228 pages, 17,50 €) Optas
« LE DÉPLACEMENT MINIMUM POUR AVOIR UNE BONNE MÉMORISATION, C’EST LE DÉBIT DE VOIX MOYEN. »
MEMO-READING_ Le professeur Xavier des superlecteurs partage ses combines.