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« LES CONCERTS ? UNE TRADITION BRETONNE ! »

Premier manager et ami proche de Dominic Sonic, le co-fondateur des Rencontres Trans Musicales de Rennes partage l'histoire du festival le plus mythique de la région armoricain­e.

- Interview groovy. Par Inès Péréa

Vous avez été le premier manager de Dominic Sonic. À quoi ressemblai­t votre relation ? Jean-Louis Brossard : C'était vraiment manager-copain, ça n'a rien avoir avec les gens qui s'occupent des groupes maintenant, c'est devenu un vrai job. Je lui donnais des coups de main, je lui trouvais des concerts ou contactais des maisons de disques. Mais Dominic et moi c'était bien plus qu'une relation profession­nelle, c'était une véritable amitié.

Un bon souvenir avec lui ?

Je lui avais fait écouter un 45 tours de Stanley Frank où il faisait une reprise de « Cold Turkey ». Dominic en a fait sa propre version. Je suis allé le voir à Paris, une semaine avant son décès, et il avait réussi à contacter Stanley Frank ; ce dernier lui avait envoyé le même 45 tours mais dédicacé pour lui. Il était très fier. Tout se faisait dans le partage de la musique avec Dominic. Mais un de nos meilleurs souvenirs fut aussi quand Dominic est venu chanter « No Fun » avec les Stooges aux Trans, un de nos groupes préférés et une influence majeure pour Kalashniko­v, son premier groupe.

Vous êtes à la tête du festival phare de la Bretagne, les Trans Musicales, depuis 1979. Pourtant, vous avez commencé par médecine…

J'habitais à Saint-Brieuc, ensuite je suis allé en fac de médecine à Rennes. Quand j'y suis arrivé, en 1973, le premier endroit où je suis allé c'était disc 2000, un disquaire où il avait plein d'imports américains absolument extraordin­aires. C'est là que j'ai rencontré Hervé Bordier qui organisait des concerts à Rennes et il m'a proposé, avec Béatrice Macé, de faire partie de l'aventure. Je suis passé de médecine en psycho, puis j'ai arrêté mes études avec un bac +2 pour m'occuper à plein temps de la programmat­ion de l'Ubu en 1987. J'y suis toujours

(rires)!

C’est donc comme ça que les Trans Musicales ont commencé ?

Les premières rencontres Trans Musicales de Rennes, c'était en juin 1979 dans une salle d'à peu près mille places. La participat­ion était libre. Les groupes, comme nous aussi, étaient bénévoles… Un des groupes, Oniris , nous avait même prêté la sono. En fait le plus important c'était l'envie de le faire et ça a vraiment bien marché. Marquis De Sade a remporté un énorme succès, Étienne Daho est monté sur scène l'année suivante... C'était parti pour 40 ans de folles musiques.

Comment expliquez-vous le succès de ce festival ?

C'est principale­ment parce que Rennes est une grande ville étudiante. Les étudiants y viennent de toute la Bretagne. C'est une ville qui bouge beaucoup, il y a pleins de bars où on s'abrite de la pluie

(rires). En 1979, il y avait douze concerts dans l'année, maintenant il y en a douze par jour. Il y a eu un engouement sur les Trans parce que ce n'était pas cher et que l'on découvrait des groupes inconnus. La première édition était sur libre participat­ion, l'année suivante en décembre c'était 10 francs l'entrée. On a toujours appliqué des tarifs très bas.

Qu’avez-vous apporté aux Trans Musicales ?

Beaucoup d'artistes, parce que je faisais la programmat­ion (à l'époque avec Hervé Bordier). Je m'intéresse à toutes les musiques, j'aime autant le rock que le jazz, que le funk, la soul, le hip hop, la techno… On peut passer d'un groupe de musique industriel­le à un artiste de Flamenco ou un DJ drum'n'bass.

Le secret pour réussir son festival ?

L'accueil du public est primordial. Le son doit être au top avec de super lumières et des groupes passionnan­ts. Il doit y avoir de bonnes choses à manger et un bar qui tourne bien pour ne pas avoir à attendre trois plombes pour avoir une bière. Et c'est vrai que les gens s'y plaisent. C'est devenu le rendez-vous hivernal incontourn­able.

En quoi Rennes est différente des autres villes ?

Je dirais qu'il y a la tradition bretonne de gens qui aiment bien sortir et aller aux concerts. On n'est pas loin de nos camarades anglais, les « grands Bretons ». Chacun ses traditions : eux se retrouvent dans les pubs et nous dans les bars ou les salles de concerts.

Comment la sentez-vous, l’édition 2021 des Trans Musicales ?

La pandémie est toujours présente mais on essaye de repartir comme il y a deux ans. L'année dernière on a fait des lives en streaming avec douze groupes alors que normalemen­t on tourne à 80. Ça s'appelait « les trans s'invitent chez vous ».

Des nouveautés pour l’édition 2021 ?

Des artistes inédits venant du monde entier, comme chaque année. Avec aussi et toujours des groupes rennais.

Les Trans Musicales dans 30 ans ?

Le festival restera un festival humain, on ne veut pas l'agrandir davantage. Il faut garder ce côté convivial où les gens se sentent bien. Surtout que c'est en hiver donc c'est en salle. Nous voulons sauvegarde­r cet aspect chaleureux.

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