TELEMAGAZINE

ÉVÉNEMENT

Laurent Delahousse, l’enquêtecho­c sur les géants du Net

- PAR BÉNÉDICTE FLYE SAINTE MARIE

On les appelle les GAFA. Derrière cet acronyme amusant se cachent Google, Apple, Facebook et Amazon, des entreprise­s tellement puissantes qu’elles sont de véritables États dans l’État, des contrées virtuelles sur lesquelles aucun contrôle n’est véritablem­ent possible. Le 9 avril 2018, devant le Congrès américain, Mark Zuckerberg, le jeune et richissime patron de Facebook, a dû se soumettre à de longues heures d’audition après le scandale Cambridge Analytica. Une société de marketing avait ainsi dérobé les données personnell­es d’une large partie des utilisateu­rs du réseau social qu’il a fondé, informatio­ns qui ont été utilisées pour influencer certaines élections, notamment le référendum sur le Brexit en Angleterre et la campagne présidenti­elle américaine de 2016, qui a donné lieu à la victoire de Donald Trump. « M. Zuckerberg, à bien des égards, vous et l’entreprise que vous avez créée, l’histoire que vous avez écrite, représente­nt le rêve américain. Vous avez inspiré un grand nombre de personnes. Il vous appartient de faire en sorte que le rêve ne devienne pas un cauchemar pour la vie privée de tous ceux qui utilisent Facebook », lui a signifié John Thune, sénateur républicai­n du Dakota du Sud. Malgré les excuses que Zuckerberg a présentées, ce film nous démontre à travers moult exemples, notamment celui de l’affaire du programme NSA éventé par Edward Snowden – une agence de renseignem­ent américain a collecté en ligne et en toute impunité des renseignem­ents sur des millions de personnes aux États-Unis et à l’étranger via Apple, Facebook, Google, YouTube et cinq autre multinatio­nales – que cette controvers­e n’est qu’une goutte d’eau dans l’océan des constantes intrusions que ces sociétés s’autorisent dans ce qui est censé relever de notre intimité. Mais s’ils se font parfois gentiment taper sur les doigts pour la forme, nos empereurs de la Silicon Valley ne risquent pas grandchose sur le fond. D’abord parce qu’ils ont une incroyable force de frappe dans le lobbying économique : ce film nous révèle ainsi que sur les 41 sénateurs qui étaient censés « juger » Marc Zuckerberg en avril dernier, 35 avaient reçu de l’argent de la part de Facebook. Ensuite, parce qu’ils sont les garants de la suprématie américaine. « Rien ne sera entrepris contre les GAFA par le pouvoir politique à Washington. Si les États-Unis affaibliss­ent leurs géants du Net, la Chine va devenir la première puissance mondiale », explique à l’écran Laurent Alexandre, spécialist­e de l’intelligen­ce artificiel­le. C’est donc, à notre détriment, l’équilibre géopolitiq­ue de la planète qui est en train de se jouer derrière nos claviers.

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Le 9 avril 2018, Mark Zuckerberg se présente devant le Congrès américain pour être entendu sur les pratiques de collecte de données des utilisateu­rs de Facebook.
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