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Nicolas, 17 ans, enlevé, roué de coups, humilié et laissé nu dans la forêt

- • F. D. ■ * Le prénom a été modifié.

Trois jeunes âgés de 14 à 19 ans ont fait subir des sévices à un ado. Ils l’ont ensuite abandonné nu dans la forêt de Saint-Germain-en-Laye, par -2 °C.

Vingt minutes de pure sauvagerie. Une violence telle que même les policiers, rompus à endurer le pire, ont qualifié les images de « difficilem­ent soutenable­s ».

Car des vidéos de ce qui s’est déroulé dans la soirée du 3 décembre 2023 au coeur de la forêt de Saint-Germain-enLaye, il y en a cinq. Toutes ont été prises par le trio qui s’est acharné sur Nicolas* dans un véritable guet-apens, réfléchi, organisé et exécuté. Tous ont été arrêtés. L’un, majeur, a été jugé ce jeudi 7 décembre par le tribunal de Versailles.

Dimanche soir. Il est précisémen­t 21 h 12 lorsqu’un policier de la brigade anticrimin­alité de Sartrouvil­le, hors service, emprunte la route des Loges. La nuit a déjà recouvert la forêt. Le thermomètr­e de sa voiture affiche -2 °C.

Dans la lumière des phares, le fonctionna­ire voit un homme sur le côté droit de la route. Il est entièremen­t nu. Grelottant. Son visage est marqué par des coups.

Immédiatem­ent, le policier le recueille dans sa voiture et lui prête une tenue de sport. Il le conduit au commissari­at le plus proche.

La soirée se transforme en guet-apens

Qu’est-il arrivé à Nicolas pour se retrouver dans cette situation ?

Choqué, l’adolescent de 17 ans parvient à raconter. Un peu plus tôt, via Snapchat, il a reçu une invitation de son copain du Service national universel (SNU). Un certain Nathan. L’idée est de se rendre à une soirée à Houilles. Rendez-vous est fixé face à la gare RER de Saint-Germain-en-Laye.

Nicolas monte dans la voiture. Il y a deux autres personnes, cagoulées. Le piège se referme.

Le conducteur démarre puis se dirige vers la forêt. Au milieu de nulle part, il s’arrête. L’enfer commence pour Nicolas.

« T’as pas peur de la mort ? »

Il est traîné à l’autre bout de la forêt. À l’abri des regards, il va subir les pires humiliatio­ns sous les caméras des téléphones.

Menacé avec une arme, Nicolas est forcé de se déshabille­r. Entièremen­t. Ses agresseurs l’obligent à mettre le canon de l’arme dans la bouche pour mimer un acte sexuel. Puis ils vont l’obliger à se masturber en lui disant : « T’as pas peur de la mort ? »

À terre, il est roué de coups. Il fera semblant de perdre connaissan­ce pour que ses tortionnai­res le laissent en paix.

Ils voulaient se faire justice

Pourquoi ce déferlemen­t de violences et une telle gravité ?

Un temps, Nicolas a fréquenté une jeune fille. Cette adolescent­e est devenue la nouvelle petite amie de Nathan. Et il plane l’idée que Nicolas l’aurait contrainte à avoir un rapport dans cette même forêt de Saint-Germain-en-Laye. De fil en aiguille, Nathan a acquis la certitude que la jeune fille avait été forcée. Il a décidé de se faire justice.

Cette vengeance, il ne l’a pas décidée à la dernière minute. De nombreux échanges par messagerie, retrouvés par les policiers, témoignent d’une véritable préparatio­n, plusieurs jours avant. Un guet-apens duquel Nicolas ne pouvait pas s’échapper.

Le plus jeune avait 14 ans

Hier, mercredi 6 décembre, Nathan, 17 ans, a été conduit au tribunal. Sa minorité lui a permis de profiter d’un contrôle judiciaire avec des mesures éducatives. Et une date de première audience en février.

Son complice, un très jeune garçon de 14 ans, a bénéficié des mêmes mesures.

Reste le cas d’Enzo, le seul majeur de la bande, originaire de Sartrouvil­le. Sans casier judiciaire, il a mis brutalemen­t un premier pied dans le monde judiciaire des grands. Comparutio­n immédiate.

« Au début, il fallait juste lui mettre des gifles »

Mince, de petite taille, cheveux mi-longs, barbichett­e et moustache, un bac pro commerce en poche… Difficile d’imaginer qu’il a participé à de telles violences. Il a été identifié grâce à la plaque d’immatricul­ation de sa voiture. Et parce que les vêtements de Nicolas, ses bracelets et montre étaient encore dans son coffre.

Choqué, le président du tribunal l’est aussi. Et il décide d’accéder à la demande du parquet qui souhaite que l’on diffuse les cinq vidéos. La violence extrême est bien présente. Nicolas est traité comme une bête, menacé, insulté avec des mots que la rédaction de 78actu préfère ne pas écrire. Des mots qui résonnent dans la salle d’audience devenue très silencieus­e.

« Je voulais juste rendre service »

Dans le box, Enzo est livide. « Avant de partir, je lui ai demandé de bouger pour voir s’il n’était pas mort. Moi je voulais juste rendre service à Nathan », tient-il à préciser.

« Rendre service ? », fulmine le procureur de la République. « Rendre service, c’est aller faire des courses, dépanner

Je n’étais pas au courant de tout au départ. Ce sont des choses graves que je n’ai réalisées qu’après. Au début, Nathan m’a dit qu’il voulait juste l’humilier en lui mettant deux ou trois gifles. Je suis choqué de ce qui s’est passé. » LE PRÉVENU.

Chacun savait ce qu’il allait faire ce soir-là. Vous avez voulu faire les héros, donner une bonne leçon sans savoir. Faire la justice. À notre tour. »

quelqu’un. Là, vous enlevez quelqu’un, vous le frappez, vous le laissez pour mort. Puis vous partez et vous n’appelez même pas les secours. »

Et de poursuivre.

Le ton est donné. Le magistrat prévient qu’il va monter haut dans ses réquisitio­ns. Il demande quatre ans dont deux années d’incarcérat­ions à inscrire dans un casier néant.

En prison pour 18 mois

La défense plaide « une violence qui l’a probableme­nt surpris lui-même. Une folie s’est emparée d’eux. »

Après en avoir délibéré, les juges ont prononcé les quatre ans dont 18 mois de détention immédiate.

En larmes, Enzo a quitté le box menotté, le regard tourné vers sa mère qui a chuchoté un « je t’aime ».

De son côté, Nicolas a entamé un parcours de soins. Il a déjà reçu 30 jours d’incapacité de travail psychologi­que. Il n’est pas encore fixé sur ses blessures physiques.

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