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Finances publiques : le Département des Yvelines demande le soutien de ses maires
Pierre Bédier a envoyé un courrier aux 259 maires des Yvelines appelant le vote d’une motion pré-écrite visant à interpeller le gouvernement sur « une situation financière inédite ».
« Des difficultés financières d’une ampleur inédite » . Voici les mots du président des Yvelines, Pierre Bédier (LR) dans un courrier adressé aux 259 maires du département. Un courrier envoyé le 4 janvier 2024 et qui demande aux élus de voter une motion en conseil municipal pour interpeller le gouvernement.
Une motion toute prête mentionnant la nécessité pour le gouvernement « de prendre des mesures de compensation financière immédiate pour faire face à la chute brutale des droits de mutation* à titre onéreux » . Ou encore de « garantir une forme d’autonomie financière aux conseils départementaux » .
Une motion pré-écrite par le Département
Ainsi, Pierre Bédier écrit : « Je vous adresse une motion que j’aimerais voir adopter dès que possible par vos conseils respectifs, afin d’appuyer notre démarche, pour retrouver des capacités d’investissement ».
Le président du Département explique dans cette lettre avoir interpellé le gouvernement sur ce manque de financement. Afin d’avoir plus de poids, le Département adresse donc cette motion déjà pré-écrite.
Une motion déjà votée par plusieurs villes
Cette motion, certaines villes des Yvelines l’ont votée, reprenant le texte quasiment au mot près, comme Poissy le 31 janvier lors de son dernier conseil municipal ou encore Marly-leRoi le 5 février et Viroflay le 8 février dernier.
Le maire de Viroflay, Olivier Lebrun (LR), par ailleurs conseiller départemental depuis plus de 20 ans, a expliqué le sens de ce vote :
« Si nous n’avons plus l’aide du Département, il y a des projets que nous devrons encore décaler. Je tiens à rappeler que les missions sociales assumées par les départements (RSA, allocation adulte handicapé, etc.) ont été créées par les gouvernements successifs en les donnant à la charge des départements et en s’engageant à compenser les sommes dépensées. Sauf qu’il existe désormais un différentiel entre les dépenses et les compensations, de l’ordre de 130 millions d’euros en 2023. Ceci sans que l’État ne réagisse à cette dérive. »
140 millions d’euros de recettes en moins en 2024
Dans cette motion, les mairies demandent au gouvernement, « à court terme, de rendre les mesures de compensation financière immédiate pour faire face à la chute brutale des droits de mutation à titre onéreux afin de permettre au Département de poursuivre ses politiques de soutien aux communes et aux Yvelinois.«
Ou encore, “de garantir une forme d’autonomie financière aux conseils départementaux pour Ieur permettre de conduire les politiques publiques pour lesquelles ils ont été élus » . Et enfin « d’opérer le transfert des ressources financières nécessaires pour conduire toutes les actions ou politiques qui seraient imposées aux départements » .
Des projets reportés ou annulés
« Là, nous évoquons les droits de mutation, un élément conjoncturel qui se rajoute à un état structurel, poursuit Olivier Lebrun. Avec la disparition de la taxe foncière, le Département n’a plus aucun moyen de jouer sur ses recettes propres pour compenser. »
Par ce biais-là, la collectivité justifie aussi le décalage de certains chantiers comme c’est le cas avec la reconstruction des collèges à Epône et La CelleSaint-Cloud.
Une motion qui fait débat
Parallèlement, le Département va continuer de financer des projets comme celui du pont d’Achères qui devrait coûter 200 millions d’euros selon le commissaire enquêteur.
« Je vais être honnête, je ne comprends pas comment on peut demander aux élus de voter une telle motion et de continuer à intégrer dans le budget du Département des projets d’un autre âge » , commente pour sa part Fabien Aufrechter (Renaissance), le maire de Verneuil-sur-Seine, en conflit avec le Département sur le projet de la RD154 qui doit traverser le bois de Verneuilsur-Seine.
Ce dernier proposera une version « retravaillée » de cette motion lors du prochain conseil municipal, « pour m’inscrire dans la démarche du gouvernement qui est de dire qu’il y a besoin d’une vraie refonte du “millefeuille territorial” et de repenser la question des financements et des fléchages pour les collectivités. Afin qu’il n’y ait plus de collectivités financées par des fléchages qui n’ont rien à voir avec leurs compétences. »
Le maire dit attendre avec impatience le rapport Woerth, chargé par l’exécutif d’une réflexion sur la décentralisation.
« Le soutien d’un échelon territorial »
Contacté, le Département estime que c’est « seulement une proposition de motion. Les départements de Gironde et de l’Essonne font la même démarche » .
« Cette lettre était dans un but informatif, estime la collectivité territoriale. On veut faire savoir nos difficultés et que les mairies le fassent savoir à l’État vu que nous avons le sentiment de ne pas être entendus » , explique le Département.
Une centaine de communes des Yvelines vont signer cette motion selon le Département. « Il n’y a pas de prisme politique. Il y a des mairies de gauche qui vont l’adopter et des mairies de droite qui ne vont pas l’adopter. Ce n’est pas un acte politique au sens politique partisane, explique le Département. On est plus dans un acte transpartisan pour soutenir l’échelon départemental qui existe depuis 1790. »
❝ La chute vertigineuse des transactions immobilières qui nourrissent notre seule fiscalité se traduit pour le Département, dès cette année, par une perte de recettes de fonctionnement de près de 140 millions d’euros, soit 12 % de nos ressources totales, et ceci sans réelles perspectives de redressement à court terme. PIERRE BÉDIER, DANS LA LETTRE ADRESSÉE AUX MAIRES DES YVELINES
❝ Le Département des Yvelines avait par exemple prévu de reconstruire quatre collèges. Nous nous posons désormais la question si l’on peut encore en faire un… OLIVIER LEBRUN, MAIRE DE VIROFLAY ET CONSEILLER DÉPARTEMENTAL
❝ C’est une démarche politique que je comprends dans le fait qu’il y a un besoin de repenser la fiscalité des collectivités. Mais évidemment, c’est une démarche politique. FABIEN AUFRECHTER, MAIRE DE VERNEUIL-SUR-SEINE
■ * Les droits de mutation correspondent à des frais que l’acheteur d’un bien immobilier doit payer lors d’une transaction immobilière.