La maison bleue de Madeleine Castaing
À quelques minutes de Chartres, la gentilhommière turquoise envahie par la verdure de la célèbre décoratrice est à vendre pour 2 millions d’euros chez France Châteaux.
Au milieu des arbres centenaires, la demeure Directoire de Madeleine Castaing a che une façade à la couleur singulière, entre le turquoise et l’acier, le « bleu Castaing ». Pendantun demi- siècle, cette antiquaire- décoratrice iconoclaste a imposé son style éclectique. Mariée à 16 ans au critique d’art
Marcellin , elle fait ses débuts dans les Castaing années 1920 comme actrice de cinéma muet, mais abandonne sa carrière alors qu’on la surnomme déjà « la Mary Pickford française ». À la même époque, son époux luiore une gentilhommière à Lèves, près de Chartres. La maison de ses rêves, qu’elle décore avec passion. Entourée d’artistes, Madeleine Castaing rejette les codes de bon goût de son temps, le style Louis XVI et les tentures en velours frappé. Elle fréquente La Rotonde à Montparnasse, s’intéresse à l’Art déco, se lie d’amitié avec et découvre le
Amedeo Modigliani travail de en 1925 chez Chaïm Soutine
, un marchand Léopold Zborowski d’art parisien. C’est le début d’une grande amitié et d’une folle collection : Madeleine considère Soutine comme le plus grand peintre du XXe siècle e t lui achète plus de quarante tableaux. Son portrait par l’artiste, baptisé La Petite Madeleine des décorateurs, est aujourd’hui exposé au Metropolitan Museum of Art à New York.
Dans sa propriété au parc de sept hectares traversé par l’Eure et le Couesnon, elle reçoit une clique bohême : , , Marc Chagall Pablo Picasso , , Louise de Vilmorin Henry Miller Erik et . Mais la mai
Satie Maurice Sachs son lui permet surtout d’exprimer librement sa créativité. Douze pièces réparties sur 600 m2, une triple réception ouverte sur une large terrasse,
sept chambres et autant de salles de bains qu’elle décore avec une modernité étonnante pour l’époque, mélangeant moquettes léopard, sièges en bambou, chintz anglais – qu’elle remet à la mode –, couleurs franches et mobilier Napoléon III. La « petite Madeleine » fait, comme elle le dit, « de la poésie avec du mobilier ». Son style excentrique séduit. Elle devient une décoratrice prisée :
Jean Cocteau lui demande d’aménager sa demeure de Milly- la- Forêt et la socialite
Fran, sa villa Santo Sospir cine Weisweiller à Saint- Jean- Cap- Ferrat.
Pendant la guerre, la propriété de Lèves est réquisitionnée par l’armée allemande. L’antiquaire se met donc à la recherche d’un nouveau lieu pour exposer ses trouvailles chinées dans les brocantes et les ventes aux enchères. À l’angle de la rue Jacob et de la rue Bonaparte, à Paris, elle tombe sur une petite boutique et y installe sa galerie. Caractérielle, on la surnomme « la diva de la rue Bonaparte ». En e et, Madeleine Castaing est connue pour vendre uniquement à qui elle veut et selon son humeur : à ses amis ou aux personnes de passage qui l’intéressent et avec qui elle peut discuter pendant des heures.
Aujourd’hui encore, son style continue d’in uencer les designers.
Jacques a é té l ’un des p remiers à reGrange découvrir le bleu Castaing. C’est lui qui a acquis le lustre doré orné d’oiseaux et de fougères qui illuminait la chambre de la décoratrice. Quant au duo , il a remis à l’hon
Gilles & Boissier neur les jardins d’hiver, grande passion de cette avant- gardiste qui méritait bien un autre de ses surnoms : « la magicienne ». —