Vanity Fair (France)

« Est-ce que vous conseiller­iez à votre fille de coucher avec six cents mecs ? Moi oui. »

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psychologu­es, mais aimerait faire une thérapie en marchant. Elle évoque sa boulimie de vie, la question qu’elle se pose souvent devant les choix cornéliens : « Et si tu meurs demain ? » Dans une émission d’Antoine de Caunes, elle avait surpris son monde en partant dans des fous rires incontrôlé­s à chaque fois que le mot « mort » était prononcé. C’était devenu un running- gag à l’antenne, mais comment ne pas se demander ce que cela disait d’elle ? « J’ai perdu des gens pendant mon enfance et mon adolescenc­e, confie- t- elle. Mon père était persuadé qu’il allait décéder à 42 ans, comme son propre père. J’avais peur pour lui et pour moi. J’ai toujours appréhendé la vie comme un sursis. Et j’étais convaincue que tout le monde était obsédé par la mort. »

Elle a la gravité de celles qui ne veulent rien sacrifier à leurs conviction­s. Sur la question de la prostituti­on, elle cite l’écrivaine suisse Grisélidis Réal qui comparait les passes à des soins. « C’est un métier difficile, mais il faut laisser la parole à celles qui l’exercent par choix », estime- t- elle. Dans Une Femme du monde, elle incarne une travailleu­se du sexe assumant pleinement sa carrière. Le film ne porte aucun jugement moral, tout comme elle. « Est- ce que vous conseiller­iez à votre fille de coucher avec six cents mecs ? m’interroge- t- elle. la meilleure actrice. Il raconte l’histoire d’une femme de ménage dans un hôtel de luxe bataillant contre le déclasseme­nt : « J’ai trouvé le scénario dément, explique-t- elle. C’est un drame social mais construit comme un film d’action. Il y a un côté 24 Heures chrono. » Elle connaît un peu ces luttes, à travers son amie Tiziri Kandi, rencontrée lors d’un festival de cinéma en Algérie. La syndicalis­te a accompagné les femmes de chambre de l’Ibis Batignolle­s pendant leur grève. En marge de cette mobilisati­on historique, elles avaient même co- signé une tribune dans Libération : « C’est avec admiration que nous soutenons leur lutte utile et courageuse. »

Et maintenant ? Quels personnage­s la font rêver ? Elle cite Colette, Catherine de Médicis, une écrivaine, une femme politique, une héroïne de western ou de comédie musicale. Elle souhaite tourner dans une autre langue que le français, même si ce n’est pas son fort ; ou à l’inverse, incarner un personnage privé de parole. L’idée même de limites l’oppresse. « Au fond, conclut- elle, ce qui m’intéresse le plus, c’est ce à quoi je n’ai pas pensé. »

La nuit est tombée, et la file d’attente continue de s’allonger devant le cinéma du coin. Dans le chaos actuel, regarder un film avec Laure Calamy n’a jamais paru aussi essentiel. �

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