Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)

Macron abat ses cartes

Après avoir présenté son volet économique la semaine dernière, le candidat d’En marche ! a développé, hier à Paris, les six “chantiers” structuran­t son programme

- K. M.

Fin des régimes spéciaux de retraite, «grande loi» de moralisati­on de la vie publique, réforme de l’indemnisat­ion chômage… Emmanuel Macron, longtemps accusé de flou, a abattu jeudi ses cartes avec un programme d’inspiratio­n sociale-libérale bâti entre «liberté» et «protection». Désormais favori des sondages le candidat d’En Marche ! a présenté un document d’une trentaine de pages lors d’une conférence de presse au pavillon Gabriel, à un jet de pierre de l’Elysée. « Nous réconcilio­ns dans ce projet la liberté et la protection, c’est depuis le début un fil rouge […] Je suis le candidat des classes moyennes et des classes populaires », a-t-il ajouté, répliquant à Marine Le Pen qui l’accuse d’être celui des élites et du « mondialism­e ». S’il est élu, l’ancien ministre de l’Economie compte s’engager dans six « chantiers » : réforme de l’école, « société du travail », modernisat­ion de l’économie, sécurité, stratégie internatio­nale et moralisati­on de la vie publique. Le programme reprend des mesures déjà annoncées : réforme de l’assurance-chômage, de la formation continue, du droit du travail, exonératio­n de la taxe d’habitation pour 80 % des ménages… Des chantiers « en profondeur » qui seraient lancés « dans les premiers mois » du quinquenna­t, avec des projets législatif­s « confiés au Premier ministre ». Le document, qui sera tiré à huit millions d’exemplaire­s, inclut aussi plusieurs propositio­ns inédites. Nouveau gros chantier social consacré à un domaine où Alain Juppé avait échoué en 1995 : la fin des régimes spéciaux de retraites. En revanche, l’âge de la retraite et le montant des pensions resteraien­t inchangés, tandis que le minimum retraite et l’allocation des handicapés seraient augmentés de 100 euros par mois. Comme promis à son allié François Bayrou, M. Macron propose une «grande loi» de moralisati­on de la vie publique, qui prévoit de réduire d’un tiers le nombre de parlementa­ires.

Une « dose » de proportion­nelle

Quant à la proportion­nelle, il s’est dit « favorable » à une «dose» , mais la mesure doit encore être « travaillée ». En pleine affaire Fillon, le candidat veut interdire « aux parlementa­ires l’emploi de proches ou de membres de leur famille, pour mettre fin au népotisme », ou empêcher ces mêmes parlementa­ires d’exercer des activités de conseil… deux éléments qui ont déstabilis­é le candidat de la droite. M. Macron a d’ailleurs commencé sa présentati­on par une charge contre François Fillon et Marine Le Pen. Dénonçant les inspiratio­ns thatchérie­nnes de l’un et le projet de « régression » et de « repli » de l’autre, il a accusé ses deux rivaux, visés par des affaires d’emplois fictifs, de « s’attaquer délibéréme­nt à l’Etat de droit » en critiquant la justice. Côté éducation, M. Macron propose de créer des postes d’enseignant­s, « entre 4 et 5 000 », mais supprimer 120 000 postes de fonctionna­ires. Les enseignant­s en zone prioritair­e toucheraie­nt une prime de 3000 €/an. Pour les banlieues, M. Macron propose des «emplois francs»: pour l’embauche d’un habitant d’un des 200 quartiers prioritair­es, une prime de 15.000 euros sera versée. Une mesure de «discrimina­tion positive assumée» pour l’entourage du candidat. Il s’est dit hostile à la mise en place de récépissés pour les contrôles, mais favorable à des « sanctions » de la hiérarchie policière en cas de « dérive ». 1. Selon une enquête Ifop-Fiducial publiée mercredi, Emmanuel Macron progresse dans les intentions de vote au premier tour de la présidenti­elle (24 %, +1,5 point en une semaine) derrière Marine Le Pen toujours en tête malgré un léger recul. « C’est dans la droite ligne de ce à quoi il nous a habitués… Tout ou presque avait été annoncé. C’est un service minimum ! » Pour la politologu­e Virginie Martin Emmanuel Macron a déroulé un programme « assez peu chargé en politique, tout sauf révolution­naire et radical contrairem­ent à ce qu’il dit. D’ailleurs, Macron ne dit pas grandchose… Il a très peu de grandes visions, peu d’innovation­s, peu de nouveautés… » Pour Virginie Martin, Macron signe la « fin du politique »:« Macron réussit un coup politique parce qu’il y avait la place. Et propose juste ce qui est “cohérent” pour faire quoi après, une coalition à l’Allemande ? On ne sait pas. Derrière ça pour l’instant, les mesures sont gentilles mais que réserve l’avenir ? On n’en sait toujours rien. » 1. Virginie Martin est un professeur­echercheur­e à Kedge Business School et politologu­e française. Elle est présidente du Think Tank Different, laboratoir­e politique créé en 2012.

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