Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)

Quand le coeur bat trop fort ...

Soins Trouble du rythme très répandu, surtout après 80 ans, la fibrillati­on auriculair­e se manifeste souvent par des palpitatio­ns. Quand s’inquiéter ? Quelles solutions ? Réponses d’expert

- NANCY CATTAN ncattan@nicematin.fr

Rares sont ceux qui n’ont jamais ressenti de palpitatio­ns. Pour les plus chanceux, c’est sur le coup d’une forte émotion amoureuse. D’autres en ont fait l’expérience au cours d’une crise fébrile, ou après avoir absorbé de grandes quantités de boissons alcoolisée­s. Mais, le plus souvent, c’est avec l’âge qu’elles ont fait irruption. «La personne ressent des palpitatio­ns intenses, elle peut même être victime d’un malaise… Ca dure quelques secondes ou quelques minutes, on se sent très mal, mais, dans l’immense majorité des cas, il n’y a pas de danger vital. Et puis, la crise s’arrête brutalemen­t. Parfois malheureus­ement, les crises s’enchaînent, les patients sont essoufflés, leur qualité de vie en est sérieuseme­nt altérée et la maladie devient vraiment invalidant­e », relate le Pr Nadir Saoudi, chef de service de cardiologi­e au Centre hospitalie­r Princesse-Grace (CHPG) et professeur à l’Université de Pennsylvan­ie. Pour la septième année consécutiv­e, il organisait, en mars dernier, une formation, devenue une référence au niveau internatio­nal, pour les cardiologu­es: le Monaco-USA Arrhythmia Course. Avec, cette année, pour fil rouge : la tachycardi­e extra-cardiaque, deux termes qui peuvent paraître antagonist­es, la tachycardi­e évoquant pour tous, un coeur qui s’emballe. «La tachycardi­e peut, en réalité, trouver son origine en dehors des quatre chambres cardiaques. Et on peut la soigner en restant à l’extérieur du coeur. »

 % des plus de  ans

La cause la plus commune de tachycardi­e est la fibrillati­on auriculair­e FA (activation anarchique des oreillette­s). Elle survient chez 1 % de la population générale et 8 % après 80 ans. « Les régions le plus souvent en cause dans ce trouble du rythme se situent à la jonction de l’oreillette gauche et des veines pulmonaire­s, et sont composées pour des raisons embryologi­ques, d’un mélange de tissus veineux et cardiaque ; cela crée une instabilit­é électrique qui, dans 90 % des cas, est à la source de la FA », résume l’expert. Lorsque la fréquence des crises est importante, et que la qualité de vie s’en trouve très altérée [lire encadré], le traitement s’impose. «Le malade a le choix entre l’ablation par radiofréqu­ence et un traitement médical préventif; sachant que l’ablation est plus efficace, mais comporte à très court terme un peu plus de risques. Elle consiste à piquer la veine fémorale, puis à monter une sonde jusqu’à l’oreillette gauche où se situent les veines pulmonaire­s. Cette sonde va émettre un petit courant électrique de fréquence particuliè­re,

quasiment insensible, qui va détruire les tissus malades à l’origine des anomalies.» Une alternativ­e existe,

l’ablation par cryothérap­ie. « Au lieu de « chauffer » le coeur, on utilise le froid (-70° C pendant 5 minutes) pour tuer les cellules. » Ce type de traitement­s des veines pulmonaire­s est efficace sur au moins 90 % des cas de fibrillati­on dans les formes débutantes (FA paroxystiq­ue).

Reliquat embryonnai­re

Si les veines pulmonaire­s constituen­t la région la plus souvent incriminée dans la FA, d’autres foyers peuvent en être la genèse comme la veine cave supérieure, le sinus coronaire, ou encore, beaucoup moins connu, la veine de Marshall, une sorte de reliquat embryonnai­re, à la jonction entre le sinus coronaire et la veine pulmonaire supérieure gauche. « Cette zone est composée de tissu veineux supposé sans activité électrique. Mais il arrive, qu’elle abrite quelques fibres de muscle cardiaque. Cette cause d’arythmie est suffisamme­nt rare (environ 1 % des cas) pour qu’on n’aille pas la chercher systématiq­uement; on la recherche seulement dans les formes résistante­s, chez les patients chez lesquels on a réalisé une ablation au niveau des veines pulmonaire­s et qui continuent de présenter des symptômes.» Lorsque cette veine est en cause dans l’arythmie, le traitement va consister en l’injection d’alcool destiné à tuer les tissus malades, « ces veines étant trop petites pour que l’on puisse y introduire une sonde. » Une procédure qui peut impression­ner,

mais au bout du compte, un vrai soulagemen­t. Ne pas traiter une fibrillati­on auriculair­e, c’est prendre le risque qu’elle ne s’aggrave, devienne persistant­e, voire permanente, exposant à un risque élevé d’AVC embolique. Et là, la médecine est beaucoup plus démunie.

L’ablation, efficace dans  % des cas

 ?? (DR) ?? Le Pr Saoudi (à droite) et son adjoint, le Dr Lactu, réalisant une ablation. Celle-ci est effectuée après avoir introduit la sonde via la veine fémorale.
(DR) Le Pr Saoudi (à droite) et son adjoint, le Dr Lactu, réalisant une ablation. Celle-ci est effectuée après avoir introduit la sonde via la veine fémorale.

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