Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)
Nicolas Bay: «Nous aurons un débat à l’automne»
Le secrétaire général du Front national renvoie après les législatives la nécessaire clarification du projet de son parti. Dans l’immédiat, il espère une cinquantaine de députés à l’Assemblée
Il a l’âge d’Emmanuel Macron. Exactement le même, puisqu’il est né comme lui le 21 décembre 1977 ! Député européen et secrétaire général du Front national, Nicolas Bay positive sur la situation de son parti et fixe à l’automne les nécessaires arbitrages qu’il aura à opérer sur sa ligne politique.
Marine Le Pen a estimé que Les Républicains étaient sortis « atomisés » de la présidentielle. Le FN n’en est pas sorti indemne non plus… Marine Le Pen a obtenu près de millions de suffrages au second tour, c’est un record en nombre de voix et en pourcentage dans l’histoire du Front national. Elle a, en outre, progressé entre les deux tours, elle a donc acquis aujourd’hui le statut de leader naturel de l’opposition. D’autant plus que nous serons sans doute la seule véritable opposition dans la future Assemblée, dans la mesure où nombre d’élus LR ont rejoint Emmanuel Macron ou envisagent de gouverner avec lui. Même François Baroin, censé être le chef de file des Républicains, a annoncé qu’il souhaitait collaborer avec la future majorité. Les choses ont au moins le mérite de la clarté : il y a vraiment une recomposition politique qui s’opère, non plus sur le vieux clivage droite-gauche, mais sur celui entre les mondialistes, soutenus par le PS et LR, d’un côté, et les patriotes, qui sont défendus par Marine Le Pen, de l’autre. Mais on a toujours beaucoup de mal à y voir clair sur votre ligne économique et sur l’euro… Indéniablement, la question monétaire est inquiétante pour nos compatriotes, d’autant plus que nos adversaires ont joué avec les peurs et essayé de rendre le débat très anxiogène sur ce sujet. Mais bien évidemment, nous devons tenir compte de cette peur, même si la renégociation des traités européens était davantage un débat de la présidentielle que des législatives. Lors de cette campagne, nous avons bien d’autres aspects de notre projet économique à défendre, comme le patriotisme économique, la lutte contre la concurrence déloyale, l’abaissement des charges, de la fiscalité et des contraintes qui pèsent sur nos entreprises.
Mais sur les aspects monétaires, notamment, quand votre projet sera-t-il clarifié ? Nous aurons un débat après le cycle électoral, à l’automne. Il n’y aura alors aucun tabou. Nous évoquerons à la fois ce qui a bien fonctionné dans ces campagnes et les sujets sur lesquels il sera nécessaire de réfléchir pour être plus efficace et plus rassembleur dans le futur. Dans l’immédiat, ce qu’attendent les électeurs qui ont voté pour Marine Le Pen, mais pas seulement, c’est une opposition solide pour éviter qu’Emmanuel Macron dispose d’un chèque en blanc pour les cinq prochaines années.
Vous espérez combien de députés à l’Assemblée ? C’est assez difficile à dire dans le cadre du scrutin majoritaire à deux tours qui est assez antidémocratique. Mais il y a quarante-cinq circonscriptions où Marine Le Pen a dépassé la barre des % le mai, et environ soixante-dix où elle a obtenu entre et %. Ce sont autant de circonscriptions où les perspectives de victoire existent bel et bien. Nous sommes déterminés à constituer un pôle d’opposition à la fois constructive, bien sûr, mais aussi extrêmement ferme, qu’attendent les Français.
Etes-vous de ceux qui souhaitent voir le FN changer de nom ? Là encore, ce sera un débat d’après-législatives. Pas plus que d’autres, cette question n’est taboue. Mais la réflexion devra être plus générale. Elle ne devra pas simplement porter sur le nom du mouvement, mais sur les aspects d’organisation, de stratégie et sur la formulation de notre projet.
Quel jugement portez-vous sur les premiers pas d’Emmanuel Macron ? On voit bien qu’il ne s’expose pas sur les grands chantiers de politique intérieure et qu’il s’est concentré sur plusieurs réunions internationales. On peut aussi constater qu’il n’a rien obtenu de particulier. Nous le jugerons non pas sur les apparences ou sur le protocole, mais sur les actes.
Quelle analyse faites-vous de ce fameux plafond de verre sur lequel Marine Le Pen a nettement buté, face à un candidat pourtant novice ? Emmanuel Macron était en réalité le candidat du système coalisé. La droite et la gauche ont appelé à voter pour lui, sans parler de larges soutiens médiatiques. Malgré tout cela, Marine Le Pen a quand même obtenu % des voix. Je ne crois pas qu’il y ait de plafond de verre, puisque ce plafond remonte à chaque élection. Nous avons connu une étape de progression importante. Il nous appartient maintenant de réfléchir pour que notre progression soit encore plus spectaculaire à l’avenir.