Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)
Remous à droite, démission du président LR du conseil départemental
Le président du conseil départemental de la Drôme, Patrick Labaune (LR), ans, a annoncé sa démission hier, désavoué pour avoir agi en sous-main contre le maire de Valence, son collègue des Républicains Nicolas Daragon. La semaine dernière, Le Dauphiné libéré avait révélé une conversation entre M. Labaune et un élu local de Debout la France, Damien Toumi, enregistrée en mars à l’insu du président du département. M. Labaune y incitait ce dernier à se présenter à Valence aux prochaines municipales en critiquant le « gauchisme » de M. Daragon. «Je suis très inquiet sur Valence, arabisation forcenée, logements sociaux de partout, les gens gueulent [...] Et qui est-ce qui en profite, c’est le Front. Or le Front, ils ont pas de jeunes, aucun [...] donc je me dis y a une chance pour [...]. Tu vas t’investir politiquement sur Valence et moi, je serai derrière, sans apparaître parce que je peux pas », affirmait notamment M. Labaune. « Les propos rapportés sont exacts, mais il s’agissait d’une conversation complètement privée », souligne, aujourd’hui, l’élu. Par
CLAUDE WEILL
Adieu, monsieur le Député-Maire. Vous et les vôtres avez été pendant des décennies les piliers de la République. Ceinture tricolore en bandoulière et sourire débonnaire, vous étiez de toutes les manifestations publiques, incarnation paradoxale de cette France à la fois jacobine et décentralisée, où tout, jadis, remontait toujours à Paris mais qui laissait subsister, comme un antidote, une bizarrerie hexagonale, un archaïsme peut-être, ces communes qui sont le cauchemar des « modernisateurs » et l’horizon mental des citoyens. Vous étiez le notable par excellence. Le couteau suisse de la démocratie. La relation bien placée des gens qui n’en ont pas. L’élu « de terrain », qui n’ignorait rien des problèmes d’emploi, d’adduction d’eau ou de trottoirs, mais qui avait ses entrées à la préfecture et dans les ministères. Vous aviez la poignée de main facile et le bras long. On vous maudissait mais on vous aimait bien. La preuve : vous étiez régulièrement réélu. C’est fini. Dans l’Assemblée nationale qui vient de rendre son tablier, on comptait encore pas moins de députés-maires. En vertu de la loi de contre le cumul des mandats, il n’y en aura plus aucun dans la Chambre à venir (plus de sénateurs-maires non plus, d’ailleurs). Il ne se trouvera guère de nostalgiques pour vous regretter. Il paraît que dans les sondages, % des Français sont pour l’interdiction du cumul. Haro sur les « cumulards » ! Avec votre côté IIIe République, vous aviez fait votre temps. Vous portiez tous les péchés d’un système politique dont les Français ne veulent plus : monopolisation du pouvoir, clientélisme, absentéisme. Vous avez dû vous couper un bras. Une grosse moitié des doubles casquettes ont choisi, la mort dans l’âme, de renoncer à leur écharpe de maire, ce mandat si passionnant où l’on est en prise directe sur la vie des gens, «àportéede baffe », dit l’un d’eux. Ils sont presque aussi nombreux à avoir dit adieu aux fastes du PalaisBourbon ou du Luxembourg. Parmi eux, une kyrielle de ténors nationaux : les Baroin, Cazeneuve, Bartolone, Copé, Apparu et Cie. De sorte que cette relève, conjuguée avec la vague attendue d’élus En Marche !, venus pour la plupart de la société civile, va entraîner le plus grand renouvellement que le Parlement ait connu depuis . Il faudra s’acheter un nouveau « trombinoscope ». C’est une excellente chose. Le « système » était épuisé. Il avait grand besoin de sang neuf. Prenons garde pourtant que l’extinction de l’espèce des députés et sénateurs-maires, ces intercesseurs naturels entre le pays profond et la technostructure d’Etat, n’ait aussi des effets pervers. On pense ici au monde rural, aux communes aux rideaux de fer baissés, aux territoires sinistrés, à cette France « périphérique » du géographe Christophe Guilluy, dont la colère, le désespoir, le sentiment d’abandon, se sont puissamment exprimés le avril. A l’heure où il n’est question que de fusions de communes, de méga-régions, de dépérissement des départements au profit des métropoles, qui portera la voix de cette France qui perd ? Sans doute, le pays a besoin du dynamisme économique, intellectuel et même démographique des grandes métropoles, qui ont tous les atouts pour réussir dans la mondialisation. Mais leur attractivité est aussi facteur de déséquilibre. Le risque de cannibalisation, réel. Prétendre – selon le discours dominant – que les richesses qu’elles créent irrigueront par ruissellement les territoires environnants relève du dogme. L’expérience tend plutôt à prouver le contraire. Recoudre un pays déchiré, assurer la « cohésion des territoires », pour reprendre l’heureuse appellation du ministère concerné, est une tâche cruciale. Espérons que les malheurs du ministre en charge ne sont pas un mauvais présage…