Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)
Le tour de la case prison par la ministre de la Justice
Plus de trois heures à la rencontre des agents pénitentiaires. Hier, la garde des Sceaux s’est intéressée au travail mené derrière les murs de la prison de La Farlède, une « source d’inspiration »
Dans la cour de terre battue, en contrebas de la coursive, des détenus lancent des regards. Ils ont compris qu’il y avait une visite officielle dans la prison. On perçoit quelques cris, des gravillons cognent le carreau. Hier matin, Nicole Belloubet, la nouvelle ministre de la Justice a réalisé un tour assez large du centre pénitentiaire de La Farlède, l’unique prison varoise. Saturée par la surpopulation carcérale – avec 140 matelas au sol, annonce la direction. « Plutôt 170 », estime un syndicat. Une prison encore neuve (elle a ouvert en 2004), avec douche dans les cellules, espaces fonctionnels, salles de formation, ateliers de travail – « un élément de reconstruction. Il y a des sources d’inspiration ici. » Au détour des allées désertes, des surveillants grommellent. « Ils ont fait une prison sans détenus », tant le parcours de la ministre a été balisé. Les syndicats s’agacent de voir les personnels pénitentiaires plus nombreux que d’ordinaire – « On a rappelé des agents ! » – pour assurer un circuit sans anicroche.
« Comment on fait pour que deux s’en sortent?»
Celle qui pose les questions et s’intéresse à l’envers du décor, c’est la garde des Sceaux. En particulier, sur l’accompagnement des détenus vers la sortie de prison. Ici, 30 % des sorties sont « accompagnées». La culture de l’aménagement de peine progresse. « On fait un métier qui est systématiquement confronté à l’échec , reconnaît une conseillère d’insertion et de probation. Mais quand un sur dix s’en sort… » C’est déjà ça de pris. «Et comment on fait pour que deux s’en sortent? » demande du tac au tac Nicole Belloubet, qui étudie justement la possibilité de « créer plus de conseillers ». La surpopulation carcérale, la ministre la constate très concrètement, lorsqu’elle entre dans une cellule. Environ neuf mètres carrés pour trois hommes, qui patientent alors dans le couloir. Encadrés de surveillants. Nicole Belloubet ressort et va à leur rencontre. « Ce n’est pas trop difficile ? » Le trio s’est connu en prison et a même demandé à être ensemble. Tant qu’à vivre dans la promiscuité, on essaie de subir le moins possible. L’un d’eux témoigne devant une ministre qui est juriste et connaît parfaitement l’appareil judiciaire. Et ses travers. « Je suis là pour une affaire de 2011, expose-t-il. J’ai été jugé en 2017, mais depuis, j’ai refait ma vie. Entre le moment où j’ai fait la bêtise et le moment où j’ai été puni… trop de temps est passé.» En 2018, seront définis les moyens alloués à la justice. En même temps qu’est annoncée une « réflexion sur les peines ».