Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)
L’extension de Monaco commence... à Marseille
Arrivé lundi, l’engin qui permettra la fabrication des premiers éléments de l’extension en mer de Monaco est depuis hier au port de Marseille. Un colosse d’acier au fonctionnement innovant
Sur la digue du port de Marseille, au loin, se profile une bien étrange embarcation : une double arche, suffisamment colossale pour qu’on pense qu’elle est tout près, alors qu’elle est encore bien loin. Et pour cause: l’engin mesure 27 mètres de haut (la hauteur d’un immeuble de neuf étages), sur 56 de long et 50 de large. Cet énorme bâtiment, c’est la matrice qui donnera naissance aux caissons de béton qui constitueront les nouvelles frontières maritimes de la Principauté de Monaco.
Made in Pologne
Ces deux arches sont le caissonnier, baptisé Marco Polo. Un engin qui a coûté la bagatelle de 21 millions d’euros et qui a été spécialement fabriqué à la demande de Bouygues Travaux publics pour ce chantier. Un équipement unique en France. Arrivé au large lundi, il est au port de Marseille depuis hier, après un voyage de quatorze jours autour de la péninsule européenne, puisqu’il a été fabriqué à Gdynia, en Pologne. C’est des rivages de la Baltique qu’il a entamé son incroyable périple. Il a été fabriqué aussi loin parce que l’entreprise qui l’a conçu a de l’expérience dans le domaine : elle a fourni des installations pour les piles de la nouvelle route du littoral à La Réunion, elle aussi bâtie sur la mer. Et si c’est bien dans la cité phocéenne que naîtront les premières «pierres» de l’Anse du Portier, c’est que la configuration du lieu est presque idéale.
Et pourtant il flotte…
«Nous avons besoin d’un tirant d’eau de 22 mètres, et nous tenions absolument à réaliser cette fabrication en France », explique Eric Cheype, directeur des travaux chez Bouygues Travaux publics. Un tirant rendu nécessaire par le procédé incroyable qui va être utilisé. « Les caissons vont être coulés sur la plateforme, et ensuite le caissonnier sera immergé pour permettre le tractage des caissons », poursuit le directeur. Et s’il faut immerger le caissonnier, c’est pour libérer les blocs de béton de 10 000 tonnes, qui vont… flotter. Une idée qui génère l’étonnement des néophytes, mais qui semble toute naturelle pour Eric Cheype : « C’est la poussée d’Archimède ! » Tout simplement. Les caissons seront ensuite tractés jusqu’au point de finition, sur la digue, puis jusqu’à leur destination à Monaco. Pour réaliser cette construction, la plateforme entre les deux arches a été entièrement revêtue de bois. Comme un gigantesque dancefloor de plusieurs centaines de mètres carrés qui permettra, une fois recouvert d’une membrane, de « démouler » les blocs plus facilement. Une fois l’opération monégasque terminée, ce gigantesque engin très innovant pourra être utilisé pour de futures opérations en mer du groupe Bouygues : « C’est une technologie adaptable qui pourrait servir pour les socles d’éoliennes, par exemple », confie le directeur de travaux. Ou pour d’autres extensions en mer…