Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)
Union européenne - USA : le spectre d’une confrontation commerciale
La tension est de nouveau montée d’un cran hier entre l’Union européenne et les Etats-Unis d’Amérique, avec l’annonce par la Maison-Blanche que les taxes sur certaines importations seront promulguées dans les tout prochains jours. « Nous tablons toujours sur une annonce
à la fin de la semaine », a indiqué Sarah Sanders [photo EPA], porte-parole de l’exécutif américain. Donald Trump avait annoncé, jeudi dernier, son intention d’imposer 25 % de taxes sur les importations d’acier et 10 % sur celles d’aluminium, tout en restant évasif sur le calendrier et les pays concernés. Si la commissaire européenne au Commerce Cecilia Malmström espère toujours éviter « toute escalade » et voir l’Union européenne exemptée, celle-ci fourbit néanmoins ses armes en préparant des représailles ciblant des produits américains emblématiques.
Beurre de cacahuète
Le président du Conseil européen, Donald Tusk, a averti, hier, que les guerres commerciales étaient « mauvaises et faciles à perdre » en réponse au président américain qui avait argué qu’elles étaient « bonnes et faciles à gagner ». « Il est désormais temps pour les responsables politiques des deux côtés de l’Atlantique d’agir de façon responsable », a-t-il plaidé, précisant que le contentieux serait au programme du prochain Sommet européen à Bruxelles les 22 et 23 mars. « Il n’y a pas de gagnants dans une guerre commerciale », a renchéri la commissaire européenne. « Cela nuirait aux relations transatlantiques. » Puis, la commissaire suédoise a détaillé les mesures en préparation par Bruxelles, à commencer par une liste de produits américains qui pourraient être taxés afin de compenser en valeur le dommage causé à l’industrie européenne. Cette liste, encore en discussion, comprend « des produits en acier, industriels et agricoles », et notamment « certains types de bourbon » ainsi que « le beurre de cacahuète, les airelles et le jus d’orange », a précisé Mme Malmström. La président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker avait déjà révélé que des marques symboliques comme Harley-Davidson et Levi’s, ainsi que le bourbon, étaient dans le collimateur de Bruxelles. L’idée de l’UE est de maximiser l’impact politique aux EtatsUnis de ces mesures de rétorsion en ciblant des produits parfois fabriqués dans des Etats favorables à Donald Trump, tout en minimisant ses effets sur les consommateurs européens. Ces mesures de rétorsion, conformes aux règles de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), rééquilibreraient la perte pour l’UE, évaluée à 2,8 milliards d’euros et mettraient environ trois mois à être effectives.
Taxes “mûrement réfléchies”
Ce protectionnisme affiché de Donald Trump a poussé son principal conseiller économique, Gary Cohn, à claquer la porte de la Maison-Blanche mardi. Le secrétaire américain au Commerce, Wilbur Ross, a pourtant tenté, hier, de temporiser assurant que la décision d’appliquer ces taxes avait été « mûrement réfléchie » mais que les Etats-Unis ne cherchaient pas une guerre commerciale. De son côté, le secrétaire au Trésor Steven Mnuchin a souligné sur la chaîne Fox Business que des « dérogations » étaient à l’étude et que l’administration « négociait des deals » au cas par cas. Outre des mesures de rétorsion, l’UE peut également mettre en place en quelques semaines des mesures dites de « sauvegarde » pour protéger son industrie. Cela consisterait à restreindre temporairement les importations européennes d’acier et d’aluminium pour préserver les deux branches concernées des flux étrangers, comme l’autorise l’OMC. Enfin, Bruxelles déposera au besoin, peutêtre avec les autres pays touchés, une plainte devant l’OMC. « C’est une mesure importante, mais ce sera long », a concédé Ceciliae Malmström. Une telle procédure prend généralement deux ans.