Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)
La technique qui fait mouche
Il a plusieurs cordes à son arc. Une passion transmise par son grand-père du côté du Verdon notamment à Fontaine l’Evêque. Un monteur de mouches hors pair et une sentinelle de la nature. Originaire de Cotignac, Jean-François Caren est garde-pêche particulier bénévole, depuis cinq ans, au fil de l’Issole. Et bien entendu, il est un mordu de pêche mais il voue une bienveillance particulière à l’eau « précieuse dans le Var ». Des obligations professionnelles éloignées de ce milieu naturel pendant trente ans. Après avoir navigué dans la Marine nationale – « à chaque retour j’allais jeter un coup d’oeil dans les cours d’eau, regarder un peu les poissons, retourner les galets » –, le Garéoultais, âgé de 57 ans, revient à ses premières amours, « l’eau douce» .« J’ai quitté Toulon pour m’installer dans l’arrière-pays.»
Libellule, scarabée, écrevisse…
Il replonge dans sa passion avec une autre corde, bien distincte, à son arc : la pêche à la mouche et son montage. Pourquoi cette technique ? «Pour pêcher avec ce dont les poissons se nourrissent en priorité. Un ver de terre ne vit pas dans l’eau. Un poisson nageur (leurre, NDLR), c’est un bout de plastique. Une cuillère, c’est métallique, elle déclenche uniquement le reflex d’agressivité chez la truite. » Jean-François Caren joint la parole aux gestes en sortant de son sac plusieurs boîtes. A l’intérieur des centaines de mouches. Combien ? « Je n’ai jamais compté. Ça, c’est une libellule, là un scarabée, ici une écrevisse… J’ai plein d’autres exemples. Regardez, ça ressemble réellement à ce que les poissons sont susceptibles de manger. » Une réalité à se casser le nez ou plutôt à duper le plus malin des poissons. « Je ne suis pas autodidacte. Je n’invente rien. Je ne fais que copier. J’ai fait des recherches sur internet et dans des revues spécialisées. Cette passion a été grandissante. J’ai commencé par des montages d’imitations d’insectes très simples, puis après on essaye de progresser. »
De la larve à l’âge adulte
Avant de se mettre en poste, le garde-pêche s’intéresse au milieu. «Je commence par retourner des cailloux pour connaître la biomasse de la rivière. Pour voir s’il y a plus de porte-bois, de larves d’éphémères ». Il tient dans une main, une larve de plécoptère et dans l’autre un spent (insecte mort). Les insectes sont reproduits à toutes les époques de leur vie : de la naissance à l’âge adulte. En fonction de la saison, des stades de reproduction, il utilise telle ou telle mouche. De quoi sont faits ses appâts ? « J’utilise des plumes de coq, de cul de canard, des poils, des matériaux naturels, synthétiques… Certains privilégient le végétal. Tout est bon pour confectionner une mouche. ». Les heures passées sur son étau à ce montage, pour lui, ne se comptent pas. « C’est une passion. On y passe le temps que l’on a envie.» Prendre son temps aussi sur le terrain. « Dès que je suis aux bords d’une rivière, je me pose. Je regarde à gauche, à droite. Ensuite on s’approche de l’eau et on voit les poissons. En attraper c’est l’aboutissement du temps que l’on a passé. Mais au bout, le plaisir est de remettre le poisson à l’eau. Je ne sais plus qui disait ça : c’est faire un cadeau à un autre pêcheur. »