Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)
La petite-fille de De Funès tacle Georges Ginesta
Vice-présidente des Rencontres de l’avenir, Julia de Funès juge « condescendants » les propos du sénateur sur le musée dédié à son grand-père
Son parcours ne surprendra que ceux qui connaissent mal la famille De Funès. Fille d’Olivier, pilote d’avion, nièce de Patrick, médecin, Julia est docteur en philosophie, spécialisée dans le monde du travail. Elle a posé ses bagages à Saint-Raphaël, pour trois jours, avec une double actualité : les Rencontres de l’avenir et l’installation du futur musée consacré à son grand-père.
Y a-t-il un lien entre le futur musée De Funès et votre présence aux ?
Rencontres de l’avenir Rien à voir ! Même si tout s’est fait par l’intermédiaire de Nicolas Bouzou, l’organisateur des Rencontres, avec qui j’ai coécrit un livre publié en septembre (). Nicolas m’a proposé d’être vice-présidente du festival, en participant ou en modérant certaines tables rondes. [Elle sourit] Tout cela s’est fait très naturellement.
L’avenir, c’est un thème qui vous parle ?
Oui ! La plupart des intellectuels invités sont jeunes : ils incarnent l’avenir, sont optimistes, rejettent toute forme de cynisme. Je m’inscris dans cette lignée.
N’êtes-vous pas à contre-courant d’une France qui broie du noir et voit l’avenir en… jaune ?
Le mouvement des gilets jaunes, je trouve ça super ! Fondamental même ! On ne peut pas nier qu’il y a des inquiétudes et une colère que je trouve tout à fait justifiée. Mais on peut contester certaines choses et aller de l’avant : il n’y a aucune contradiction à mes yeux.
Vous laissiez entendre que Nicolas Bouzou a aussi participé à la naissance du musée consacré à votre grand-père ?
La génèse de ce projet est compliquée. Initialement, ce musée se trouvait dans l’orangerie du Château de Clermont (Loire-Atlantique) qui appartenait autrefois à mes grands-parents. Il a été créé en par deux admirateurs de mon grand-père, Roselyne et Charles Duringer, qui louaient ce local au nouveau propriétaire. Mais ce dernier a voulu vendre. En , il a fallu fermer.
À l’époque, votre famille a été critiquée…
En effet. Je recevais, sur Facebook, des commentaires assez délirants: « Les De Funès ne font rien pour ce musée, ils bradent des objets pour récupérer euros… » Nous n’avons jamais rien vendu ! Et nous nous sommes battus pour trouver un autre lieu. Ce qui n’est pas si évident, alors même que la demande populaire est colossale ! (Elle sourit) C’est là qu’on voit que la politique, parfois, est vraiment déconnectée du peuple.
Pourquoi Saint-Raphaël ?
Nous avons d’abord sollicité le maire de Saint-Tropez. Il a refusé parce que sa ville a déjà le musée de la gendarmerie. Il y a trois mois, j’en ai parlé à Nicolas Bouzou, qui est proche du maire de Saint-Raphaël. Il m’a proposé de lui en glisser un mot. J’avais aussi rendez-vous avec le maire de Nice, mais Frédéric Masquelier a dégainé le premier : il a dit oui sans la moindre hésitation ! Du coup, ça s’est fait très rapidement. Il y a des aménagements à prévoir, la collection à transférer, mais le musée ouvrira l’an prochain.
La totalité des objets exposés vient de votre famille ? Non. Il y a beaucoup d’effets personnels – des lettres, des montres, un César (), des films de famille tournés par Louis –, mais il y a aussi de nombreux accessoires prêtés par des collectionneurs.
Allez-vous faire appel aux fans pour compléter ce fond?
Pas pour l’instant. Mais dans un second temps, pourquoi pas ? Cela sera à voir avec la municipalité de Saint-Raphaël.
Vous avez de bons rapports avec les admirateurs de Louis ?
Ça a parfois été compliqué avec une minorité de fans qui dépassaient les bornes. Lorsque ma grand-mère était encore vivante (), cela pouvait même être dangereux. Il a fallu poser des limites, imposer un peu de distance… Mais globalement, il y a un véritable respect.
Lorsque la création du musée a été soumise aux élus, lors du dernier conseil municipal, l’ancien maire, Georges Ginesta, a ironisé : « On va se prosterner pendant vingt ans devant le sécateur de De Funès ». Cela vous a blessée ?
Je trouve cela condescendant. Vis-à-vis de mon grand-père, bien sûr, mais surtout vis-à-vis du peuple français. Si ce monsieur savait à quel point les gens sont demandeurs de ce musée, à quel point le rapport à mon grandpère est affectif… Il est rentré dans les foyers, dans les familles. Balayer ça d’un revers de la main, c’est mépriser ces mêmes citoyens qui l’ont élu.
Votre père, Olivier de Funès, racontait que ses passagers s’inquiétaient lorsqu’ils apprenaient qu’un De Funès était aux commandes…
Je pense qu’il disait cela pour faire rire. Mais c’est certain, un De Funès pilote, ça intrigue ! Je suis dans le même cas : lorsqu’on annonce une « philosophe De Funès »... il y a quelque chose qui ne va pas ! (Elle éclate de rire)
Cette « ombre portée » n’a jamais été un problème ?
Non. Les gens sont assez délicats, très pudiques. Lorsqu’ils parlent de mon métier, ils n’évoquent pas mon grand-père et vice-versa. Croyez-moi : De Funès n’est pas un nom difficile à porter !
Pourquoi Louis de Funès demeure-t-il aussi populaire, alors que les jeunes générations ignorent qui est Fernandel ?
Le rire a un rapport étroit avec la vérité. Et Louis était tellement juste… Comme Chaplin, il décelait des vérités humaines intemporelles. Les racistes, les petits chefs existeront toujours. Lorsque Don Saluste dit dans La Folie des grandeurs : « Qu’est-ce que je vais devenir ? Je suis ministre ; je ne sais rien faire…» (Elle rit) Ça nous parle encore aujourd’hui !
Avec une minorité de fans, il a fallu poser des limites ”