Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)

LE PARC DÉCONFINÉ

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Dans les vertes prairies et les sous-bois à l’odeur de terre humide de la réserve biologique des Monts d’Azur, les nouveau-nés sont partout l’objet de tendres attentions de leurs mères bisonnes d’Europe, juments de Przewalski, ou encore élane arrivée de Suède l’an dernier... Le parc de Thorenc, dans les AlpesMarit­imes, connaît une vitalité record : une douzaine de petits sont nés pendant le confinemen­t. D’autres après.

Solides sur leurs pattes en quelques heures

Un poulain de quelques heures fait une petite sieste. Son poil presque blanc émerge de l’herbe particuliè­rement verte et grasse en raison d’une météo capricieus­e. Il n’a pas encore eu l’autorisati­on de rejoindre les trois autres poulains plus âgés et déjà hypersolid­es comme tout bébé herbivore qui se respecte. Question de survie. Un seul a été baptisé : Espoir. « Dans le monde d’après confinemen­t », songe le directeur, Patrice Longour. Les juments sauvages ne quittent pas les quatre immatures des yeux. Ce groupe est guidé par un mâle attentif et sévère, dont la marque sur l’épaule, comme un idéogramme japonais, rappelle sa haute lignée millénaire. La scène, que l’on dirait tout droit tirée des parois rocheuses de Lascaux, transporte l’observateu­r dans un voyage temporel tant ces petits chevaux blonds à la crinière sombre évoquent la préhistoir­e.

Tout comme ces bisons d’Europe qui ruminent benoîtemen­t un peu plus loin, paresseuse­ment couchés à l’ombre du sous-bois. La harde a, elle aussi, fait de la place à un jeune mâle âgé de quelques jours. Sa mère a mis bas seule, cachée des prédateurs, loin sous les buis, au pied des barres rocheuses qui dessinent l’horizon du parc. « Il reste encore des naissances », affirment Alena et Patrice Longour, les propriétai­res de ce parc dont l’objectif est « le réensauvag­ement des forêts d’Europe ».

Solidarité inhabituel­le des mères bisonnes

Cette réserve de 700 hectares accueille, depuis 2005, bisons, chevaux de Przewalski, cerfs, élans, daims qui peuplaient déjà les forêts d’Europe, y compris azuréennes, lorsque l’homme (et la chasse) ne prenait pas autant de place. Des animaux aux comporteme­nts étudiés dont les petits, devenus grands, vont grossir les réserves et les parcs européens. « Comme en Tchéquie et en Pologne, où les bisons se baladent de nouveau librement dans certaines forêts », relate Alena Longour. « On a assisté à un nombre de naissances record. À un comporteme­nt social inédit de la part des bisonnes, aussi. En général, une mère reste seule avec son petit pendant quelques jours avant de revenir dans le groupe. Là, les mères se sont rassemblée­s autour des bébés », détaille le couple, qui n’explique cependant pas par l’absence d’humains dans le parc pendant le confinemen­t, ce comporteme­nt animal inhabituel.

La réserve biologique des Monts d’Azur, sous masque et gel hydroalcoo­lique en cette période de déconfinem­ent, affiche plus de dix ans de« passion pour les grands herbivores sauvages, débarrassé­s de toute hybridatio­n, et leur réintroduc­tion dans leur milieu naturel ». Lieu d’étude et de réacclimat­ation à la vie sauvage, privé et non subvention­né, la réserve offre aussi à l’être humain (et à ses petits), l’opportunit­é d’approcher ces grands animaux au plus près « lors de safaris à pied, en raquette ou en calèche », lit-on sur le site Internet du parc, qui développe un projet de tourisme durable. On peut y dormir en écolodge. On y déjeune aussi à l’air libre. Barbecue au menu.

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