Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)

Dans le Var la téléconsul­tation explose, le coût global de la dépense a baissé

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Pour Marie-Cécile Saulais, directrice de la CPAM du Var et Arnaud Boyer, directeur adjoint, le recours à la téléconsul­tations va se maintenir à un haut niveau.

Les chiffres de la téléconsul­tation sont impression­nants. Comment pensez-vous qu’ils vont évoluer ?

Nous sommes passés de  téléconsul­tations par semaine au début de l’épidémie à   actuelleme­nt, avec un pic à   la semaine du  mai. Je pense que cela va se stabiliser à un haut niveau. Ce dispositif convention­nel mis en place pour faciliter l’accès aux soins sur les territoire­s désertifié­s a naturellem­ent pris sa place durant la crise comme dispositif d’accès aux soins protégé.

Comment ces téléconsul­tations sont-elles prises en charge ?

Jusqu’au  juillet, tant qu’on reste dans le cadre de l’urgence sanitaire, elles sont prises en charge à  % par l’assurance maladie pour tous les patients qui présentent une suspicion de Covid-. La prise en charge est aussi à  % pour les patients qui bénéficien­t d’une ALD, dans le cadre de leur pathologie, comme pour une consultati­on classique en temps normal. Pour les autres motifs de consultati­on, la prise en charge est partagée, là aussi comme c’est l’usage, entre la CPAM et les mutuelles. On n’est toujours pas dans le tiers payant généralisé.

Comment régler la consultati­on ?

Pour une téléconsul­tation classique à  euros, le médecin se fait payer directemen­t la part sécurité sociale par nous. Il reste  euros à régler, soit par le patient, au téléphone avec sa carte bancaire ou en envoyant un chèque, soit le médecin se fait payer par la mutuelle. Les médecins ont les outils pour vérifier l’état des droits du patient. Et ceux qui restent sans complément­aires sont heureuseme­nt minoritair­es. La prise en charge à  % durant la crise a permis d’éviter que le paiement soit un frein à la téléconsul­tation. Mais il y a un axe de progrès pour faciliter le paiement.

Si ses confrères réparent les membres, elle, c’est le moral qu’elle soigne. Élément fondamenta­l dans le processus de guérison. Elle pose un regard mesuré sur la téléconsul­tation, lui trouve des atouts mais aussi des inconvénie­nts. « Nous avons été obligés de nous adapter du jour au lendemain à cause du confinemen­t. Ainsi, nous avons utilisé la téléconsul­tation pour maintenir le lien avec les patients et leurs familles. C’était

Le boom des téléconsul­tations a-t-il entraîné une explosion des dépenses ?

Le coût de la téléconsul­tation du  mars au  mai s’élève à   euros. Mais le montant de la dépense globale sur cette période a baissé, malgré la prise en charge à  %. Cela correspond à la fréquentat­ion des cabinets médicaux qui a engendré une baisse d’activités de  % pour laquelle nous avons d’ailleurs mis en place un dispositif d’aide.

Ne craignez-vous pas une augmentati­on du nombre global de consultati­ons ?

Il n’y a pas de raison pour que le système soit inflationn­iste. C’est le médecin qui prend l’initiative de la téléconsul­tation s’il estime que la situation est appropriée. La téléconsut­lation s’insère facilement dans un dispositif de suivi des patients, mais elle ne peut pas tout remplacer. C’est le médecin qui va réguler. Si la dépense augmente dans les mois à venir, ce sera plutôt un effet de rattrapage, qui d’ailleurs est souhaitabl­e ! Car on peut craindre des risques de complicati­ons pour les personnes qui ont renoncé à consulter durant le confinemen­t. indispensa­ble. Mais ce n’est pas aussi évident que cela d’écouter les gens à distance. Dans mon travail de psychologu­e, je n’entends pas que les mots, j’observe aussi la personne, ses réactions, la manière dont elle se tient, ce qu’elle fait avec ses mains. Au-delà du verbal, la communicat­ion non verbale est une source d’informatio­n à part entière. Par téléphone ou en visio, on se prive en partie de cela. » Pour autant, Hélène Brocq est lucide : « sans la téléconsul­tation pendant le confinemen­t, ç’aurait été bien difficile. Contre toute attente, les craintes se sont rapidement envolées, l’adhésion a été très rapide pour les familles comme pour les patients. Ces derniers, passées peut-être les premières minutes, ont réussi à parler librement lors des téléconsul­tations. » Toutefois elle tempère immédiatem­ent : « les premiers temps, ils étaient très centrés sur la période d’incubation du virus et sur les risques de tomber malade. Ça les rassurait d’en parler avec un profession­nel. En revanche, il était difficile d’aborder des éléments plus intimes, plus profonds. D’autant que certains ne pouvaient pas forcément s’isoler de leur voisin de chambre pour se confier. Il y a certaines choses qu’on ne dit pas devant des tiers. »

Les mots prennent plus de poids encore

Hélène Brocq le constate d’autant plus qu’elle voit de nouveau les patients dans son service à l’hôpital. «Dès qu’on a renoué avec des consultati­ons en présentiel, ils se sont livrés avec plus d’intensité. La téléconsul­tation, c’est donc un bon outil de surface même si ça ne remplacera jamais la présence et le contact humain. » Contact qui est déjà un peu limité avec le port du masque. Il suffit de le constater au quotidien : difficile de lire les émotions rien qu’avec le regard. Même si la vidéo permet d’enlever le masque, une partie de la communicat­ion non verbale reste amputée.

Un autre écueil

Et la psychologu­e soulève un autre écueil : «Pour le profession­nel c’est très fatigant car cela implique une concentrat­ion maximum, pour essayer de déceler des indices dans ce que l’on perçoit du patient à travers la manière dont il parle, dont il respire. Il faut essayer de se représente­r la personne mais surtout, il faut trouver les mots justes car elle aussi perçoit moins les réactions du soignant et accorde davantage d’importance aux mots que l’on prononce. » Pour bien comprendre, souvenons-nous de ce parallèle : lorsqu’il y a des turbulence­s dans l’avion, qui regardons-nous ? L’hôtesse de l’air. Car son comporteme­nt, nous indique (en partie) s’il y a lieu de s’inquiéter. C’est un peu la même chose ici : le patient guette les expression­s du soignant car lui aussi a besoin d’écouter le langage corporel de son interlocut­eur. Hélène Brocq conclut : « l’important est de garder l’humain au centre du soin car sinon, on risque de se priver de la richesse de la subjectivi­té. On ne peut et on ne doit pas tout dématérial­iser ! »

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(Photo C.R.) Arnaud Boyer et MarieCécil­e Saulais dirigent la CPAM du Var.

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