Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)
La ville de rêve postconfinement s’échafaude
Retour au « bon sens paysan » tout en s’adjoignant les possibilités offertes par les nouvelles technologies, une architecte mentonnaise dresse le portrait-robot de l’habitat de demain
Avoir pris goût au télétravail et aux réapprovisionnements alimentaires par « paniers paysans » dans un monde plus silencieux et moins « hystérique » fait forcément cogiter sur sa vie d’après. Outre les familles qui font la joie des « JT-cliché » ces temps-ci après avoir quitté leur cité pour emménager dans un logement campagnard en Lozère, la question se pose : quelle est la ville de rêve post-confinement ? Une aubaine pour tous les architectes et urbanistes qui planchent depuis des années sur une alternative au « tout métropole » et à la densification urbaine. « Je pense qu’on aura la chance d’être plus écoutées. Les gens ont redécouvert l’importance d’un logement adapté à une vie plus agréable avec balcon et terrasse quasi-indispensables, surtout dans notre région. Les promoteurs sont en train de prendre conscience qu’il faut faire des logements dont on puisse profiter dedans et dehors, tout en faisant entrer la campagne dans la ville, avec des lieux que l’on va pouvoir partager comme des potagers, carrés végétalisés, etc. », débute la présidente de l’Ordre des architectes régional, Françoise Berthelot.
Sociologues dans la ville
Basée à Menton, elle ne prône pas pour autant une ville de sciencefiction écolo, végétalisée à outrance et bardée de panneaux photovoltaïques, mais invite à revisiter quelques fondamentaux sans pour autant tout « tartiner de vert ». « Il faut repenser une ville où la voiture prenne moins de place, avec des quartiers qui retrouvent une identité, un habitat passif (qui ne consomme pas d’énergie, Ndlr), participatif et tourné vers l’extérieur, avec des lieux de vie et équipements communs, des commerces de proximité... Comme les gens qui se sont réunis de balcon à balcon pour se parler, il faudrait recréer du lien social, retrouver ce cercle amical où les générations se mélangeaient, sans peur de l’autre, où les grands-mères tricotent sur le pas de la porte en surveillant leurs petits enfants. Ne plus penser les villes comme un « tuyau » de circulation, configurées par rapport au trafic routier, mais davantage comme un lieu de villégiature », poursuitelle avec le voeu d’être épaulée dans cette mission par paysagistes et sociologues. Dans les années 60 et 80, « ona massacré les entrées des villes avec des zones commerciales et artisanales aujourd’hui obsolètes. Des centaines de milliers d’hectares ont été artificialisés, étanchéifiés, asphaltées », se désole Denis Dessus,
président du Conseil national de l’Ordre des architectes. « On ne pourra hélas pas revenir sur ces espaces-là et tout casser. On doit faire avec et arrêter de penser de travers », convient Françoise Berthelot. Certains avancent déjà le concept de « Smart Cities », ces villes ultraconnectées, bien desservies et aux services proches. « Dans la ville de rêve il y a deux axes. Revenir à quelque chose d’autrefois comme dit plus haut. Mais ne pas oublier la technologie. Tout est une question de dosage. Mais ces histoires de villages autosuffisants (voir photo), quasi en autarcie, m’effraient un peu... », conclut la Mentonnaise.