Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)
Maîtres de cérémonie sans voix
Ils font lever les foules. S’enthousiasmer les supporters. Ils créent la communion et invitent au partage. Mais depuis la crise sanitaire, ils sont les oubliés des stades. Ils le font savoir. A haute voix !
P
as grand monde ne connaît leur visage, mais beaucoup ont déjà entendu leur voix. Stéphanie Poiret et Eric Dodrumez font partie de la vie des supporters du RCT, du TSCV ou du HTV. Plus maîtres de cérémonie que speakers à proprement parler, ils font vivre les rencontres, détaillent les enjeux, animent les salons VIP... Mais à cause du coronavirus, le micro ne répond plus. Le sport est à l’arrêt, et Stéphanie et Eric restent sans voix. Sans savoir aussi de quoi demain sera fait.
Des moments difficiles, Eric Dodrumez, à la tête de la société Eric Alliances Animations, en a déjà vécu. Son arrivée en 2016 au micro de Toulon/Saint-Cyr, par exemple, reste encore aujourd’hui un moment particulier.
L’agenda est vide
« Fabien Rossolini, le speaker historique du club, venait de décéder, et il fallait quelqu’un pour prendre la relève, se souvient-il. Ce n’était pas évident mais j’ai accepté. Moi qui viens plus du basket (il est responsable de la commission basket 3x3 dans les
Bouches-du-Rhône et vice-président d’un club aux alentours de Marseille), j’ai bien mis cinq matches à prendre la mesure du truc. Et avec le contexte, ce n’était pas facile à vivre...» Dans un style différent, plus en retrait, Eric s’impose petit à petit. Au point, aujourd’hui, d’être une partie intégrante du spectacle TSCV. Pourtant, avec ce satané Covid-19, le micro reste au placard. Et le porte-monnaie, après deux mois de disette, commence à crier famine... « Le hand n’est pas ma seule activité. Je suis également présent au HTV et dans deux clubs dans les Bouches-du-Rhône (Sapela 13 en basket et Plan-de-Cuques en handball), mais j’interviens aussi en grande surface et lors des festivals... À l’heure actuelle, tout est annulé. Alors qu’en temps normal mon agenda est rempli jusqu’à la fin de l’été, là, il est vide...»
«Un stade sans speaker, c’est glauque, non ? »
Indépendant, contrairement à sa confrère Stéphanie Poiret, Eric Dodrumez ne peut actuellement compter que sur les rentrées d’argent de son épouse. « J’ai zéro revenu et surtout zéro visibilité. C’est cela qui m’inquiète le plus. Il va peut-être falloir que je me mette à bosser en intérim pour pouvoir tenir... » Car même au sein de l’association des speakers et maîtres de cérémonies (ASMC, voir ci-dessous), on peine à trouver des informations sur la sortie de crise. « Les clubs vont être en difficultés financières, c’est certain, prédit Eric. Et on craint que les premières lignes budgétaires où ils feront des économies soient celles de l’animation, avec les traiteurs, les hôtesses d’accueil et nous. Est-ce qu’avoir un speaker pour leurs futures rencontres restera une priorité ? Je l’espère. Car un stade sans speaker, c’est glauque, non ? » Se voyant comme celui qui met en lumière les gens tout en restant dans l’ombre, Eric Dodrumez n’est jamais aussi satisfait que lorsqu’il permet aux spectateurs de passer un bon moment en famille. « On ne me connaît pas physiquement, et c’est tant mieux ainsi. Si, grâce à moi, une personne qui n’aime pas particulièrement le sport passe un bon moment, c’est parfait. Et si, grâce au sport, on peut réunir une famille et lancer leur soirée, c’est encore mieux. Mon objectif est de faire passer les émotions en mettant l’évènement en avant. » Encore faut-il qu’il y ait un évènement... Ce ne sera sans doute pas le cas avant deux mois.
Zéro revenu, zéro visibilité ”