Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)
« Je vous en conjure, retirez cette décision scélérate »
Lors du conseil municipal, la majorité a voté une augmentation de 20 % des indemnités de ses élus. Une délibération indéchiffrable qui a causé l’indignation de l’opposition
Si le rituel veut que le second conseil municipal soit largement consacré à la constitution des multiples commissions, l’augmentation de quelque 20 % des indemnités attribuées aux adjoints et conseillers de la majorité a suscité, jeudi soir, des passes d’armes cordiales mais fermes. Sur un plan général, on retiendra la véritable performance consistant à évoquer le sujet sans jamais mentionner le moindre chiffre. Ce qui, pour le moins, ne fait pas oeuvre d’une grande transparence, puisque le contribuablepayeur n’aura pas l’heur de savoir combien percevaient et combien « gagneront » les élus. Lesquels, pour ceux que nous avons contactés, ne connaissent pas le montant de ces émoluments. Cela ne manque pas de poser question... L’unanimité s’est évidemment faite sur le principe des indemnités versées aux élus, compte tenu des obligations et contraintes qu’imposent leurs charges. Cependant, l’augmentation proposée a été considérée par les oppositions comme un camouflet, au moment où guette une crise sociale et économique sans précédent. Jean-Bernard Miglioli, pour le groupe « Mieux dans ma ville », ouvrait le ban, en rappelant que, début mai, le maire Richard Strambio avait salué l’exemplarité de plusieurs associations qui avaient reversé tout ou partie de leur subvention à la municipalité. « Un mois plus tard vous proposez la majoration de 20 % de l’indemnité des élus. Cet acte administratif est inacceptable et en total décalage avec la réalité sociétale que nous vivons et traversons. (...) A l’heure où nombre d’entrepreneurs ou commerçants vont se déclarer en cessation de paiement ; où de nombreuses familles peinent à se nourrir ; où une partie de nos concitoyens sont en chômage partiel ou en proie au licenciement économique ». D’ajouter : « Une élection au 1er tour n’équivaut pas à un chèque en blanc. Ce petit plaisir nous coûtera la bagatelle de 420 000 euros sur 6 ans de mandature, au détriment d’autres priorités. Les élus de la majorité confondent salaire et indemnité. Celle initialement perçue était largement suffisante. Je vous en conjure, retirez cette décision scélérate...» M. Miglioli était suivi par Mathieu Werth, représentant de « Draguignan, plus loin, ensemble » qui ajoutait que « diminuer le nombre d’adjoints et de conseillers délégués aurait été un geste fort donné à la population ». Richard Strambio n’a forcément pas bougé d’une ligne : « J’ai, pour ma part, fait économiser 50 000 euros à la collectivité. Car je n’ai pas de voiture de fonction, pas de frais de représentation (...) Je n’ai pas à recevoir de leçon de morale. » De renchérir : « Les élus sont libres de disposer de leur indemnité et de ne pas la percevoir ou de la reverser à une association de leur choix. Les élus dracénois ne font pas du « tripatouillage » avec des frais de représentation qui maquillent des indemnités plus faibles ». Et de renchérir sur l’irréprochable moralité de la municipalité, laquelle « prendra toujours les bonnes décisions face à l’urgence ou la détresse de ses administrés ». On veut bien l’entendre, mais pourquoi ne pas dire qui gagne quoi ?