Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)

À la plage du Veillat, les interdits partent en fumée

Depuis le 1er juillet, un arrêté municipal délimite des espaces non-fumeurs sur les plages d’Agay et du Veillat entre 9 et 19 heures. Le dispositif est-il respecté ? Nous l’avons testé

- ESTELLE HOTTOIS saint-raphael@nicematin.fr

Deux larges panneaux, disposés aux deux extrémités de la zone surveillée, annoncent la couleur. Rouge, assurément, à l’image de l’immanquabl­e cercle barré. Jusqu’au 27 septembre, entre 9 heures et 19 heures, interdicti­on formelle de fumer « du tabac » sur une longueur de cent mètres à compter du poste de secours du Veillat. L’arrêté municipal, scotché en rikiki à l’arrière des encadrés, est-il suffisamme­nt dissuasif ? Testons. Le plan d’attaque est décliné en deux étapes : gommer le flou des limites de l’espace non-fumeurs, puis titiller les maîtres-nageurs sauveteurs… également CRS. Non fumeuse – mais joueuse –, je dépose mon barda légèrement à l’extérieur de la superficie contrôlée, j’étale ma serviette. Et le cirque commence.

« Ils vous observent ! »

Je pioche une cigarette dans un paquet à demi entamé, emprunté à un complice, et l’installe à la commissure des lèvres. D’une maladresse assumée, j’actionne le briquet à gaz. Des étincelles, une flammèche, puis… plus rien. Je me tourne dans toutes les positions : face au vent, debout, dos au vent, recourbée. Rien n’y fait. Le manège est interrompu par un jeune garçon compatissa­nt. Il s’approche et me propose un coup de main. L’adolescent saisit l’engin et, avec toute la dextérité du fumeur expériment­é, l’allume en un rien de temps. Est-il au courant de l’interdit ? « Oui, mais je ne choisis pas ma place en fonction de ça, murmure-t-il. Ça fait deux jours que je traîne ici, et je n’ai pas été contrôlé. Une bonne planque, et c’est réglé .» Une femme, assise sur une chaise pliante plantée à quelques pas, capte notre conversati­on. Elle sermonne pas ; ils vous observent. Vous savez, on voit vraiment tout de là-haut ». Le jeune homme hausse les épaules, et retourne sur ses pas pour s’en rouler une. Son attitude déplaît. « Il semblerait qu’on soit cernées, grince la dame en s’adressant à sa fille, allongée à ses côtés. Le garçon devant, maintenant, la fille derrière. Si c’est ça, je vais me baigner. » À son retour, la femme scanne les Si ça se trouve, l’interdit ne concerne que la zone entre les deux panneaux… »

Touché ! Je m’avance vers le binôme, et confirme l’informatio­n. « Pourtant, il est marqué ‘‘plage non-fumeur’’... Ça fait deux ans que je viens, et deux ans que je n’y comprends rien. », finit-elle par lâcher, poings sur les hanches. Première case cochée. Ne reste que la seconde. Cette fois-ci, je déplace mes affaires au centre de l’espace interdit. Vont-ils me repérer ? Le paquet, aveu délibéré de culpabilit­é, est abandonné au coin de ma serviette, tandis que le filtre de la cigarette retourne contre ma bouche. Elle se consume un peu, beaucoup, entièremen­t. Les cendres se mêlent au sable. Ni vues, ni connues.

Regards moralisate­urs

Une heure est passée. L’attention des sauveteurs CRS ne s’est pas détournée des baigneurs. Pourtant, ce n’est pas faute d’avoir essayé ; les bâtons de nicotine, agités vers le ciel, n’ont aimanté que les regards moralisate­urs ou réprobateu­rs des familles alentour, cous dévissés vers ma position. Ainsi ai-je assisté au grand bal des sourcils froncés. Des broussaill­eux sexagénair­es au-dessus de grandes lunettes noires ; des plus fins, collés au front inquiet d’une maman dérangée. Il semblerait que ce soient eux, plutôt, qui fassent respecter la loi. Je remballe pour la dernière fois et déguerpis. Qu’ai-je évité ? « Un premier avertissem­ent, informe JeanFranço­is, sur la plage du Veillat. On matérialis­e la zone par des gestes, et on rappelle l’interdit. Ce n’est pas si fréquent : il n’y a que trois ou quatre distraits par jour. Pour les récalcitra­nts, l’arrêté municipal prévoit une sanction de 17 euros, que nous sommes habilités à délivrer. Au troisième coup, l’amende passe à 68 euros ; elle relève désormais du code de santé publique. » Pas cette fois !

‘‘ Ça fait  ans que je ne comprends rien… ”

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(Photos Clément Tiberghien) En zone non-fumeur, seuls les sourcils froncés de mes voisins tentent de me décourager.
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presque : « Vous ne devriez environs. Et glisse à sa progénitur­e:«
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responsabl­e du dispositif

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