Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)

Un confinemen­t réussi

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« J’ai trouvé des traces de ma famille en 1510 à Méounes, raconte Jérôme Dussueil. Une terre du village porte d’ailleurs notre nom. Au tout début du XVIIIe siècle, le village a subi deux catastroph­es. »En 1706, les Astro-Sardes, qui faisaient route vers Toulon, ont ravagé le village. Trois ans plus tard, le grand hiver a eu des répercussi­ons catastroph­iques en Provence. « Une partie de ma famille a fui le Var et s’est installée à Marseille », raconte ce passionné d’histoire. En 1720, la peste fait son apparition à Marseille. «Jenesaispa­s comment mes ancêtres ont eu l’informatio­n. Toujours est-il qu’ils ont quitté la cité phocéenne en maijuin. Le 31 juillet, les portes de Marseille étaient fermées. » Un choix qui s’est révélé judicieux. « Méounes, mieux que les autres villages a eu conscience du danger et a mis en place une organisati­on méthodique pour s’isoler des communes voisines », raconte Jérôme Dussueil. L’accès à Marseille a été rapidement fermé. « Puis, une sorte de cordon sanitaire armé a été mis en place. Les jeunes du village patrouilla­ient jour et nuit sur tous les confins de Méounes. La route principale a été détournée. Des soldats du roi sont également venus prêter main-forte. Les milices et les troupes du roi avaient ordre de tirer à vue sur tous ceux qui essayaient d’entrer au village. » Des cabanes et refuges ont été construits le long des lignes de défense avec approvisio­nnement en eau, nourriture et bois de chauffage pour la milice et l’armée.

« Je ne sais pas comment ils ont tenu »

Un maître chirurgien, aidé de ses intendants de santé, a joué un grand rôle dans cette lutte contre la pandémie. « Il était très compétent. Il a tout de suite fait adopter des mesures de prévention. Pour se rendre à Méounes, il fallait produire un document. Au moindre doute, les visiteurs étaient mis en quarantain­e. Certains y sont d’ailleurs morts... » Le confinemen­t a probableme­nt duré jusqu’à la fin de l’année 1721. « Je ne sais pas comment ils ont tenu, s’étonne Jérôme Dussueil. J’imagine qu’ils avaient des jardins, des poules, des lapins... Il est certains qu’ils ont tout de même dû souffrir de la faim. » Méounes a gagné. A l’issue de l’épidémie, aucune victime n’était à déplorer au village. Il en ressort, selon Jérôme Dussueil citant un texte de l’époque, que la population de Méounes fit preuve d’organisati­on, de discipline associée à une grande vigilance et à une efficace cohésion. « L’épisode de la peste a donné davantage de sens au terme de communauté villageois­e. La complicité née de la lutte contre l’épidémie a structuré davantage l’univers villageois, en renforçant l’identité du village face aux communes voisines. »

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(Photo DR) Les médecins de peste, maladie qui, hormis à Méounes, a fait des ravages en Provence, portaient une tenue spécifique.

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