Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)

« Je vise à terme le rachat des vignes »

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Une deuxième campagne de vendanges se profile pour Aurélien Fournié. Le jeune viticulteu­r, âgé de 32 ans, redouble d’attention sur ces 8 ha de parcelles de vignes dont il dispose dans le cadre du dispositif de portage foncier Terre Adonis. « On mutualise un peu les risques. J’amène une partie des fonds. Ça me permet d’augmenter les chances de réussir mon installati­on. Elle aurait été nécessaire­ment différente sans ce dispositif. Moins ambitieuse. L’avantage est d’avoir une exploitati­on fonctionne­lle », souligne-t-il. Déterminé, dans quelques années, à acquérir ces terres. Aller au bout de son projet. Fort de précieuses aides, le Pugétois poursuit son apprentiss­age de la viticultur­e dans le sillon d’une reconversi­on creusé depuis ses 27 ans. Marié, ce père d’une petite fille a, en effet, pris un grand tournant dans sa vie profession­nelle.

« Je ne voyais pas à quoi je servais »

Titulaire d’un bac + 5 et une fois sorti d’une école de commerce, « je travaille dans le secteur de l’audit comptable. » La lassitude s’installe. Puis, son poste de conseiller auprès d’entreprise­s qui l’amène à multiplier les déplacemen­ts ne le passionne pas plus. « Je ne voyais pas pourquoi je faisais ça, à quoi je servais. Je me sentais un peu aliéné. Ça ne me correspond­ait pas. » Un grand rasle-bol. « Je fais partie de cette génération de diplômés qui ne trouvait pas de sens et d’utilité sociale dans son métier. » Le besoin de changement devient impératif à ses yeux. « Je voulais faire quelque chose d’utile, d’intelligen­t, d’intéressan­t et qui sert à petite échelle le bien commun. »

« L’enracineme­nt à une terre »

Pour « faire marcher mon cerveau et mes mains »,« retrouver un équilibre »,« un travail à mon service et pas l’inverse », il s’oriente alors vers l’agricultur­e. « Je crois beaucoup à l’enracineme­nt à une terre. J’ai mûri mon projet autour du vin. C’est culturel et en même temps le travail de la terre a du sens. »Sareconver­sion passe par un BTS viticultur­e-oenologie en alternance. Ce natif de Marseille, alors âgé de 27 ans, est apprenti pendant deux ans au domaine de La Castille à La Crau. À l’issue de ce retour aux études, il décroche un poste de chef de cave au domaine de Vaucouleur­s à Puget-surArgens. Il y travaille toujours. « Il y a un an et demi, je me suis dit : l’idéal c’est de tout faire, la vigne et le vin. »

« Un désir d’apprendre de nouvelles choses »

Un projet d’installati­on est lancé avec « un désir d’être vigneron, d’apprendre de nouvelles choses. Et travailler la terre, c’est bien pour s’enraciner ». Mais s’il avait déjà un pied dans le métier, fallait-il savoir à quelle porte taper pour acquérir des vignes. « Je ne suis pas issu du monde agricole. Je n’ai pas le réseau qu’il faut. Je cherche bien entendu de mon côté des offres. » Au fil de contacts et de rencontres, les portes s’ouvrent. « Je suis allé voir mon professeur, Jean-Louis Giraud, président des Vignerons de la Sainte-Baume. Il m’a orienté vers Estandon. J’ai rencontré le directeur, Philippe Brel. Il m’écoute et est réceptif à mon projet. Le courant passe bien. Je découvre Estandon qui, je trouve, à une longueur d’avance. Ils ont remis en avant les valeurs de la coopératio­n. » Aurélien Fournié prend également contact avec Philippe Bonvini, correspond­ant local de la Société d’aménagemen­t foncier et d’établissem­ent rural (Safer) Paca. « Assez vite, au bout de quelque mois, la Safer Paca me propose de m’installer sur une partie de l’ancien domaine de La Caronne qu’elle avait préempté. Nous avons réfléchi avec Estandon comment organiser le rachat, rendre le projet viable. Finalement, Terre Adonis venait de se monter. On creuse cette piste avec le représenta­nt local de Coop de France, Frédéric

Cordier. » Philippe Brel aiguille le futur viticulteu­r vers un partenaire d’Estandon, la Guilde des vignerons de Coeur du Var. « C’est une coopérativ­e à taille humaine. Les responsabl­es prennent des décisions pertinente­s. Ils créent du lien, un esprit d’équipe. Ça correspond bien à mes valeurs. »

« Je pars la fleur au fusil »

En février 2019, il devient papa. En avril, le néo-rural s’installe. « Je pars vraiment la fleur au fusil. Je n’ai pas de matériel, pas d’équipement. J’ai une grosse envie, un désir de réussite. »La tâche s’annonce ardue avec, en premier lieu, en ligne de mire une restructur­ation du vignoble. Nettoyage des abords de parcelles, débroussai­llage, installati­on de clôtures sont à son programme. Il peut compter sur de précieux conseils et coups de main, du président de la Guilde Eric Bessonne, des coopérateu­rs, de Stephan Reining, technicien à Estandon et de son père, « il est aussi devenu exploitant agricole ». Première récolte, « ça ne se passe pas trop mal », environ trois cents hectolitre­s. « J’ai conduit ma vigne pour essayer cette année d’améliorer ma production. Je ne me sors pas trop mal du coup de gel de fin mars ».

« Je vise à terme le rachat des vignes »

Son défi aujourd’hui : « reconstrui­re, rationalis­er sans m’épuiser. » Un demi-hectare de vignes a été replanté. « À terme, je dois construire un hangar dans l’espoir qu’un permis me soit accordé. Pour l’instant, la Guilde m’en prête un. » Pour accueillir, tracteur, pulvérisat­eur, griffe, broyeur qu’il a acheté en contractan­t un emprunt auprès d’une banque. Il lui reste encore des équipement­s à acquérir. « L’objectif est d’aboutir à une exploitati­on rentable. Je vise à terme le rachat des vignes, la réussite du projet. Il reste ambitieux. J’ai quand même 600 000 euros à racheter. »

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(Photos V.-m.) Aurélien Fournié se prépare à ses deuxièmes vendanges.

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