Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)

Le procès d’un policier accusé de viols

Claude M. est accusé devant la cour d’assises du Var d’avoir contraint en juin 2018 une prévenue à lui pratiquer une fellation dans les toilettes du tribunal de Toulon

- V. W.

De mémoire de magistrats, d’avocats ou de policiers, la situation est aussi dramatique qu’inédite. Deux viols au sein même du tribunal judiciaire de Toulon, commis par un fonctionna­ire des forces de l’ordre, « c’est du jamais vu », reconnaît le procureur de Toulon, Bernard Marchal.

Et pourtant, c’est bien ce qui amène ce lundi Claude M., alors brigadier-chef, devant la cour d’assises de Draguignan. Le policier est accusé par Angélique C. de l’avoir contrainte à pratiquer une fellation le 13 juin 2018 en échange d’un appel téléphoniq­ue à sa fille. Ce jour-là, la jeune femme était retenue dans les geôles du tribunal dans l’attente de son passage en comparutio­n immédiate. Effondrée à l’annonce de son placement en détention, elle avait supplié le policier de lui laisser joindre sa fille. « J’étais effondrée par la décision. S’il avait fallu me couper un bras pour l’appeler, je l’aurais fait. » Claude M. aurait-il ressenti cette détresse pour profiter de ses faveurs ? L’intéressé dément. « Je reconnais le rapprochem­ent sexuel, l’acte masturbato­ire avant sa comparutio­n immédiate. Pour les autres, je nie les faits. »

« Elle se caressait les seins »

Les autres, ce sont d’abord Rufino (1), qui accuse également Claude M. de l’avoir forcé à commettre une fellation. Les enquêteurs avaient pu remonter jusqu’à elle car son ADN, ainsi que celui du policier, avait été retrouvé dans les toilettes du personnel où les faits avec Angélique C. avaient eu lieu. Il y a aussi Nahima, Kassandra et Patricia, qui se disent victimes de harcèlemen­t sexuel lors de leurs passages dans les geôles du tribunal toulonnais. « Tout ça, c’est faux ! Je ne sais pas pourquoi elles affirment ça. Sans doute parce que je leur refusais de fumer. »

En ce qui concerne Angélique C., Claude M. affirme que la fellation avait eu lieu avant sa présentati­on devant les juges – quand elle n’était pas encore « anéantie » par l’annonce de sa mise en détention –, et le résultat de son comporteme­nt « aguichant ». « Elle se caressait les seins, se léchait les lèvres, raconte-t-il. J’étais surpris. J’ai failli aller voir le procureur. J’aurais dû… »

Selon lui, Angélique C. a demandé à aller aux toilettes. Et s’il l’a amenée dans celles réservées au personnel, c’était par souci d’hygiène.

« Là, elle m’a enlacé, s’est assise sur la cuvette et a regardé mon entrejambe… Puis elle a déboutonné mon jean et a caressé mon sexe. »

Un récit que conteste évidemment la victime.

« Quand il m’a sortie de la cellule, j’ai cru que c’était pour téléphoner à ma fille. Après, dans les toilettes, j’ai compris que ce coup de fil ne serait pas gratuit. J’étais tellement mal que j’ai fait abstractio­n. J’ai fait le vide dans ma tête… »

Une histoire, deux versions. Et un face-à-face qui se poursuivra aujourd’hui avec l’audition notamment d’un témoin qui a évoqué pendant l’enquête le comporteme­nt ambivalent d’Angélique C. dans les geôles. Le verdict sera rendu demain.

1. Le prénom a été modifié.

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(Croquis d’audience Rémi Kerfridin) Les enquêteurs ont raconté que lors de sa garde à vue, Claude M. adaptait son récit à chaque annonce d’un nouvel élément à charge.

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