Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)

« Grâce au sport, l’égalité devant la règle existe »

En cette Journée internatio­nale du sport et de la paix, le président de l’ONG monégasque Peace and Sport Joël Bouzou vous invite à brandir un carton blanc lourd de sens sur les réseaux sociaux.

- PROPOS RECUEILLIS PAR THOMAS MICHEL tmichel@nicematin.fr 1. La Fondation s’est associée à l’athlète Paula Radcliffe, qui dispense des cours de sport en vidéo.

En 2013, l’Assemblée générale des Nations Unies a proclamé le 6 avril comme Journée internatio­nale du sport pour le développem­ent et la paix. Depuis 2015, l’ONG monégasque Peace and Sport associe cette date à sa campagne #WhiteCard. Le concept est simple, ce mardi, qui que vous soyez et où que vous soyez, brandissez un carton blanc, symbole de votre engagement pour la paix dans le monde. Prenez-vous en photo et postez votre contributi­on sur les réseaux sociaux avec les hashtags #WhiteCard et #Monaco_Matin, qui s’associe pleinement à l’opération. Président-fondateur de Peace and Sport, l’ancien champion du monde de pentathlon moderne, Joël Bouzou, défendra ses valeurs aujourd’hui lors d’un Forum sur la paix organisé au Mexique. Un keynote digital lors duquel il rappellera l’importance d’offrir des modèles à la jeunesse. S’il tend la perche à Kylian Mbappé pour rejoindre les Messi, Drogba et Matuidi au club des ambassadeu­rs Peace and Sport, Joël Bouzou rappelle qu’à ses yeux l’engagement d’un simple éducateur de Monaco comme de Bretagne compte tout autant.

Quelle résonance prend la campagne #WhiteCard dans la situation actuelle ?

Le risque actuel, c’est que la citoyennet­é soit cassée, parce qu’on subit la situation et que les conséquenc­es de la pandémie ne seront pas uniquement médicales. Donc il faut absolument qu’on entretienn­e un lien avec les citoyens. Grâce au maintien d’une activité physique, comme le fait la Fondation Princesse Charlène actuelleme­nt (), ou d’outils digitaux. Il y a plein de solutions. Parmi elles, il y a le carton blanc pour lequel tous nos partenaire­s sont mobilisés car c’est un moyen d’impliquer en attendant qu’on puisse de nouveau se rassembler et bouger ensemble. Il permet de réaffirmer une certaine façon de concevoir les rapports entre les gens, par le sport.

Peace and Sport opère habituelle­ment sur des terrains en proie à des conflits. La crise sanitaire met en exergue son

spectre d’actions bien plus large. Je viens d’assister à la session du CIO avec le prince Albert II et les cinq années à venir seront des années où la solidarité globale n’aura jamais été aussi importante. On s’aperçoit maintenant que les maladies des pauvres touchent aussi les riches ; que la pollution des pauvres touche aussi les riches. Il y a une convergenc­e et un besoin de partage. On ne peut plus vivre avec des politiques infinies dans un monde fini. En cela, le sport est un fantastiqu­e levier pour renforcer la solidarité, l’acceptatio­n de la diversité, la tolérance, l’ouverture d’esprit, la promotion de l’équité. Car c’est un leurre de penser que l’égalité existe, l’égalité n’existe pas. Tout le monde connaît une histoire différente. Par contre, l’égalité devant la règle peut exister, et le sport est un fantastiqu­e vecteur pour ça, comme le carton blanc.

La #WhiteCard est devenue la vitrine de Peace and Sport. Comment tirer son épingle du jeu dans la nuée d’ONG ? Comment prouver votre crédibilit­é ? La White Card, c’est quelque chose qui est global et neutre, qu’on peut faire de façon individuel­le. C’est aussi un acte connecté à Peace and Sport et donc ancré sur la notoriété de Monaco et de son couple princier, formé de deux olympiens. C’est quelque chose qui résonne dans le monde. On est aussi crédible par la crédibilit­é de notre leadership.

En cela vous commencez à avoir un sacré club d’ambassadeu­rs. Quand Lionel Messi brandira le carton blanc, ça aura une énorme résonance. Tout comme Siya Kolisi, le capitaine de l’équipe d’Afrique du Sud de rugby, Didier Drogba, Paula Radcliffe, Tony Estanguet, Christian Karembeu, Yohan Blake, Teddy Riner… Des champions et aussi des leaders gouverneme­ntaux. Bien sûr Monseigneu­r, mais aussi Juan Manuel Santos ou Muhammad Yunus, tous les deux Prix Nobel de la paix. Ce sont des références. Ils ne font pas les choses n’importe comment. C’est parce que la cause est reconnue, crédible et efficace, qu’ils suivent.

Le bouche-à-oreille fonctionne bien ou vous allez chercher ces personnes par la main ?

Les deux. Par exemple aujourd’hui on a énormément de résonance dans le monde du MMA. La

Fédération internatio­nale trouve intéressan­t de travailler avec nous car on sait que le MMA fonctionne très bien auprès des hooligans.

Des gens qu’on rattache à des règles alors qu’ils n’en respectent pas beaucoup au départ. La Fédération internatio­nale d’escalade a aussi lancé une initiative, qui s’appelle Climbers for Peace. Elle encourage tous les grimpeurs à rejoindre la campagne #WhiteCard en prenant des photos et en expliquant pourquoi ils le font. À quel moment de votre vie, avezvous perçu la puissance du sport comme vecteur d’harmonie ?

Ça commence par une éducation, avec un père professeur d’éducation physique qui était à dispositio­n, pas seulement de moimême et de mes deux soeurs, mais de tous nos amis. Même si la famille était d’un niveau social moyen, ça n’était pas un problème d’acheter les équipement­s pour les autres. On a été habitué très tôt à partager. Ensuite, j’ai commencé à faire de la compétitio­n et j’étais un jeune athlète du sud ouest qui montait à Paris et trouvait les gens un peu bizarres. Ils n’avaient pas le même accent, la même culture, parfois il y avait de la crispation. Ça a été pareil au niveau internatio­nal après, et le sport m’a appris très tôt le partage et le respect de la différence. Le respect ne se décrète pas, il se découvre, se vit. Ça doit vous infuser. Quand vous intégrez la différence, les autres deviennent vos amis.

Ce qui a été votre cas ?

Quand j’avais  ans, je faisais des stages en Allemagne et mes meilleurs amis étaient Allemands. Or j’avais deux grands-pères à la maison, l’un socialiste, l’autre gaulliste. Ils avaient des joutes verbales au niveau politique mais ils étaient d’accord sur une chose : détester les Allemands [rires]. J’ai été capable, par le sport, de voir autre chose que ce qu’on m’avait transmis. C’était pareil quand j’ai découvert les cultures africaine ou asiatique. Aujourd’hui, j’ai des amis partout.

C’est un leurre de penser que l’égalité existe”

Le respect ne se décrète pas, il se découvre, se vit”

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(Photo Peace and Sport) « Le carton blanc, c’est une valeur qui permet de faire la promotion des droits de l’Homme et de véhiculer le concept de la paix au sens des Nations unies, celui de la démocratie. »

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