Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)
La conservation du patrimoine s’exporte
Conservateur-restaurateur au sein de cette institution dracénoise, Jacques Rebière vient d’assurer une formation dans la capitale comorienne, pour sensibiliser l’archipel à la protection patrimoniale.
Il faut être fier d’avoir hérité de tout ce que le passé avait de meilleur et de plus noble. Il ne faut pas souiller son patrimoine » ,affirmait Gandhi, dans l’un de ses écrits.
Une pensée à laquelle adhère pleinement le conservateur-restaurateur, Jacques Rebière. Depuis plus de vingt ans, au sein du laboratoire de conservation de Draguignan, le passionné redonne vie aux pièces historiques et mène de multiples actions pédagogiques, axées sur l’importance de la conservation du patrimoine, en France comme à l’étranger.
Sa récente intervention, auprès du Centre national de documentation et de recherche scientifique des Comores, est l’une d’elles.
« Un seul musée, resté dans son jus »
Parti le 12 juin, rentré il y a à peine quelques jours, le restaurateur était accompagné d’une équipe de six personnes, toutes spécialisées en la matière. Mais pourquoi ont-elles choisi de poser leurs valises dans la capitale comorienne ?
« Les liens que le laboratoire dracénois entretient avec le Centre national de documentation et de recherche scientifique des Comores ne datent pas d’hier, explique Jacques
Rebière. Et si nous avons choisi cette destination, c’est bien parce qu’à Moroni, et dans l’archipel en général, les notions de conservation et de protection du patrimoine font cruellement défaut », note le Dracénois. L’exemple le plus criant, selon Jacques Rebière : le musée national des Comores, implanté à Moroni. «Depuis son inauguration en 1982 par François Mitterrand, la bâtisse est restée dans son jus, regrette le restaurateur. Le scotch a jauni, les photos sont tombées de leur vitrine, les cartels sont plus que sommaires et il n’existe toujours aucun plan du musée, ni protection contre les insectes.
Alors qu’en y regardant de plus près, cet endroit recèle pourtant des pièces magnifiques, à forte valeur historique. Ce musée étant unique dans le pays, les Comoriens n’ont aucun élément de comparaison. Et donc très peu de notions de protection patrimoniale. C’est là que nous intervenons. »
Une soixantaine de participants
À l’initiative conjointe du laboratoire de conservation et du CNDRS, entre cours théoriques et exercices pratiques, Jacques Rebière et son équipe ont ainsi formé durant deux semaines une soixantaine de volontaires,
venus des quatre coins de l’archipel et issus du monde culturel et administratif. « Parmi eux, nous avions même deux ministres, des Affaires étrangères et de l’Éducation, souligne le restaurateur. Et les thématiques abordées ont été les suivantes : gestion des musées, gestion informatique des collections, conservation des archives, médiation culturelle et politique des publics. Grâce au financement de l’ambassade de France, nous avons pu les équiper en matériel informatique. »
De retour en France, les formateurs se connecteront régulièrement avec les groupes de travail comoriens
pour s’assurer que la formation n’a pas été vaine, et que le message est bien passé.
Un message on ne peut plus clair dans l’esprit de Jacques Rebière : «Cen’estpas inscrit dans la Déclaration universelle des droits de l’homme, mais nous partons du principe que tout peuple a le droit de raconter et de se réapproprier son histoire. Qui plus est lorsqu’il s’agit d’une ancienne colonie française comme les Comores. Cela suppose qu’il y ait des archives, des collections. Et donc, des actions de conservation. »