Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)

« On a un potentiel de médailles dans les dix séries »

Philippe Mourniac, le directeur de l’équipe de France de voile olympique, originaire de Sainte-Maxime, savoure la belle semaine des Bleus et se projette sur les Jeux de Paris 2024.

- PROPOS RECUEILLIS PAR OLIVIER BOUISSON

Il a passé toute la semaine dernière au plus près des athlètes tricolores, lors de la Semaine olympique française (SOF), de retour à Hyères après trois ans d’absence. Philippe Mourniac est depuis octobre 2021 le nouveau directeur de l’équipe de France de voile olympique, après deux olympiades en tant qu’entraîneur des hommes en 470 (Rio 2016, Tokyo 2021). Lui, le Maximois de naissance qui a grandi dans le Var et effectué ses premières sorties en mer avec le club nautique de Sainte-Maxime, à qui il est toujours resté fidèle. À l’issue de la SOF 2022, qui a souri aux Bleus (11 médailles, dont 2 d’or), Philippe Mourniac en tire un bilan positif et appréhende les Jeux de Paris 2024 avec enthousias­me.

Quel bilan faites-vous de cette semaine ?

On n’avait plus connu la SOF sous ce format depuis 2018, car en 2019 il n’y avait que quatre séries présentes, puis il y a eu la Covid. Le premier bilan est que c’est génial de retrouver une grande semaine d’Hyères qui est l’événement le plus important de la voile olympique française. La SOF, c’est notre Roland-Garros à nous. Ça nous fait très plaisir, car c’est à la maison. Après, on pensait que confirmer les bons résultats de Palma (première étape de la Coupe du monde début avril) ne serait pas forcément évident et là, on a quasiment doublé le nombre de médailles. Le bilan est forcément très positif.

La France obtient ses onze médailles dans sept séries différente­s sur les dix représenté­es, ce qui veut dire que le potentiel est immense… Oui, c’est ce que je dis à tous nos partenaire­s, nous avons vraiment un potentiel de médailles dans les dix séries. Il n’yapasde choix à faire. La deuxième richesse est que ça ne se réduit pas à un seul athlète par série, il y a de la densité partout. C’est vraiment super et voir à Hyères un deuxième podium en 49er par exemple, c’est top, voir deux filles sur le podium de l’Ilca 6, il faut se pincer pour y croire ! Je ne suis pas un historien du sport, mais je ne suis pas sûr qu’on ait déjà vu ça en France. C’est bien de voir des athlètes qui ont la pêche, le sourire. Il y a une dynamique de la gagne qui est en train de se mettre en place. Il faut qu’on la garde, car c’est notre essence pour notre objectif de 2024.

Vous parlez de l’Ilca 6. Justement, que pensez-vous du retour en force de la Hyéroise Marie Barrué, 2e ?

Dans sa préparatio­n, on ne l’attendait pas à Palma (24e), mais on voulait qu’elle fasse une perf’ à Hyères. Elle l’a faite, on ne peut que la féliciter. Marie ne peut pas être plus ciblée que quand elle évolue à Hyères. Elle est née ici, elle est élue à la mairie, ses parents travaillen­t dans la voile, elle est entourée de gens qui la connaissen­t et la solliciten­t en permanence. Elle est ici comme on risque d’être en 2024 à Marseille et elle a répondu présente de la meilleure des façons. Elle a un potentiel de feu et avec la jeune Louise Cervera (3e à Hyères et 4e à Palma, originaire de Mandelieu), le potentiel est là.

Chez les hommes, en Ilca 7, le Maximois Jean-Baptiste Bernaz ne fait que dixième...

J. B. était en tête à Palma et a dû s’arrêter pour cause de maladie. À Hyères, il est en tête les premiers jours et a moins bien navigué en fin de semaine, mais il part au mondial (du 21 au 28 mai au Mexique) avec l’intention d’arracher une médaille, il a envie d’être champion du monde. Il a toutes les armes pour faire un super résultat.

En Kitefoil, comme Axel Mazella, Lauriane Nolot décroche aussi l’argent. Peut-elle aller plus haut ?

Pour eux, qui sont vraiment des locaux, c’est super d’avoir performer ici, mais aussi pour tous les autres qui ont l’habitude de s’entraîner à l’Almanarre, le spot de l’équipe de France. Pour Lauriane, elle a déjà fait 2e à Palma, elle réitère à Hyères, c’est top. On avait l’impression d’avoir une extraterre­stre avec l’Américaine (Daniela Moroz), et on a le sentiment qu’on se rapproche. L’objectif est de gagner en 2024 et on est dans la position du chasseur. Entre Lauriane, Poema Newland, Jessie Kampman (Sainte-Maxime) et Alexia Fanchelli (Hyères), on a vraiment une équipe très dense.

En planche à voile, Nicolas Goyard a survolé la compétitio­n dans ce qui ressemblai­t à un championna­t de France ....

En IQ, on fait 4 médailles, mais on sait que l’on a un potentiel de feu. Quelques étrangers ont fait l’impasse, mais la France a une telle densité. Pour moi, ils font (Photo O. B.) une erreur, ils ont plutôt intérêt à courir là où sont les Bleus.

En 470, Hippolyte Machetti et Aloïse Retornaz sont déjà sur un podium après quelques mois d’entraîneme­nt, c’est prometteur...

Je n’étais pas inquiet. Je savais qu’avec l’arrêt de Kevin Peponnet on a perdu un incroyable barreur, mais on sait qu’Hippolyte (originaire de Valbonne et licencié à Cannes) c’est du très, très haut niveau. C’est directemen­t médaillabl­e. Avec Eloïse (médaillée de bronze à Tokyo), ils sont depuis très longtemps sur la série et ont la capacité de s’adapter l’un à l’autre très vite. Commencer par une médaille d’argent et mettre des « clients » derrière, c’est top.

La seule série où personne n’a accroché la Medal race est le Nacra 17. De quoi s’inquiéter ? Pas du tout, je sais que le potentiel est là. On a perdu un véritable as avec l’arrêt du projet de Quentin Delapierre et Manon Audinet (8es à Tokyo), mais on a deux équipages avec un fort potentiel (Berthomieu­Mourniac / Besson-Ancian). Ils se sont mis en place et on a reçu le nouveau matériel tardivemen­t, donc on est encore en train de monter le puzzle. L’entraîneur a pris une grande décision : on va recentrer tout ça sur Marseille pour arrêter de courir à gauche et à droite, et se focaliser sur le travail technique. Franchemen­t, je ne suis pas inquiet. Je pense qu’on va les voir chatouille­r le top 10 rapidement. C’est une série qui est aussi médaillabl­e.

Les athlètes méditerran­éens ont réalisé de belles performanc­es, avaient-ils un avantage à courir dans des conditions familières ? À ce niveau-là, tous les athlètes sont capables de performer quelle que soit la mer. Maintenant, l’athlète qui navigue en Méditerran­ée développe généraleme­nt beaucoup de sensibilit­é, de qualités techniques dans les petits airs, avec un clapot important. On a beaucoup de sudistes dans l’équipe et ils ont beaucoup de toucher de barre.

Beaucoup d’athlètes ne s’entraînent pas encore sur le plan d’eau olympique de Marseille. Où en est le projet ? Depuis le début de projet, pas mal de séries sont venues. Après cette semaine d’Hyères, beaucoup de remorques vont faire route sur Marseille. Jusqu’en novembre, beaucoup de séries vont y passer du temps. On a encore un problème de place, mais il faut imaginer que là où il y avait le Pôle France avant (au Roucas blanc), tout est en constructi­on pour sortir la future marina olympique, début 2023. Pour l’instant, on est dans un espace intermédia­ire mais on a des salles de travail, de récupérati­on, des vestiaires, de quoi stocker le matériel. Bien sûr, ce n’est pas aussi facile qu’ici à Hyères où tout existe et où il y a plus de place, mais il faut que les athlètes aient l’impression d’aller à la maison.

‘‘

Une dynamique de la gagne se met en place.”

‘‘

La marina olympique de Marseille sera livrée début 2023.”

À titre personnel, comment est cette nouvelle vie ?

Forcément excitante, quand on a la chance d’être impliqué dans une équipe qui va participer à des Jeux olympiques en France. Ça arrive au mieux une fois par siècle !

 ?? ?? Philippe Mourniac a pris sa première licence au club nautique de Sainte-Maxime en 1972. Il lui est toujours resté fidèle.
Philippe Mourniac a pris sa première licence au club nautique de Sainte-Maxime en 1972. Il lui est toujours resté fidèle.

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