Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)

« L’inquiétude vient plutôt des nappes phréatique­s »

Malgré une situation actuelle où les niveaux de sécheresse deviennent déjà inquiétant­s, les maraîchers ne semblent pas particuliè­rement inquiets à court terme pour leur production. « les problèmes vont débuter début juillet »

- ALEXANDRE REYNAUD MATHILDE TRANOY mtranoy@nicematin.fr

Les quelques journées de pluie qui se sont abattues ces derniers jours sur le départemen­t ne seront sans doute qu’une maigre satisfacti­on dans un début d’année très sec. La préfecture du Var a d’ailleurs émis en fin de semaine dernière sa première « alerte renforcée sécheresse » concernant le bassin-versant de l’Huveaune amont. Une question logique se pose : va-t-on manquer d’eau dans les cultures ? « Un bon maraîcher a toujours de l’eau, lance Marcellino Massa, du haut de ses 80 printemps, installé au Cannetdes-Maures. Il ne peut pas cultiver s’il n’a pas d’eau tout le temps. »

« Superficie­llement, ça va… »

C’est grâce à cette philosophi­e que la majorité des maraîchers ont leur solution : un forage ou un raccord au canal de Provence. Ainsi dans la partie plus littorale du Var, les producteur­s résistent et ne tirent, pas encore, de conclusion­s alarmantes. «Jenesuis pas embêté pour le moment, confirme Didier Ricca. Nous bénéficion­s du canal de Provence. Le maraîchage et les arbres fruitiers ne sont pas vraiment impactés. » Alors jusqu’ici tout va bien… tant qu’il y aura de l’eau au bout du tuyau.

Oui mais, le constat est-il le même vont commencer début ou mi-juillet. On va avoir des sources qui vont se tarir. Les troupeaux, on les fait marcher pour aller manger plus loin. Ce qui va être ennuyeux, c’est pour les gens qui font de la transforma­tion fromagère en alpage » compatit l’éleveur.

Problème en foin cet hiver

Le recours au foin ne se fera pas avant l’automne, « quand on sera en manque de pousse d’herbe à cette période ». Là encore, le profession­nel pressent «un problème d’approvisio­nnement cet hiver. Tous les départemen­ts producteur­s de fourrage de la région, dans le 04, le 83 et le 13, ont constaté une baisse de leur production en raison de la sécheresse. On voit que la pousse n’est pas bonne, on sait qu’il va y en avoir moins, mais on ne sait pas dans quelle proportion. On est dans l’expectativ­e. Et comme nous ne sommes pas un départemen­t producteur de fourrage, nous sommes tributaire­s des autres ».

« Nous sommes tous impactés »

« Nous sommes tous impactés par la sécheresse, nous confirme-t-on au siège en surface et sous terre ? Sur le chemin de Loou, à La Roquebruss­anne, Pierre Venel cultive fruits et légumes qui finiront à la vente dans des paniers. « Superficie­llement, ça va… », soupire ce cultivateu­r qui a recours à un forage.

« L’inquiétude vient plutôt des nappes phréatique­s. Nous sommes au même niveau que l’année dernière au mois de juin. On est déjà en décalage de deux mois. Si on regarde 40-50 ans en arrière, il pleuvait plus régulièrem­ent. Ça n’augure rien de très bon. On est inquiets à moyen terme. Les légumes sont composés d’eau donc tout cela n’est pas très favorable. Surtout quand on conjugue ça aux gelées tardives. »

Pour rappel, l’année dernière, les agriculteu­rs ont été obligés de réduire leur consommati­on d’eau en pratiquant le goutte-à-goutte, uniquement le matin. Un procédé le plus économe et efficace.

Pour des anciens, l’histoire n’est qu’un éternel recommence­ment.

« Pendant les années 89, 90, 91, on n’a pas eu une goutte d’eau pendant trois ans. Même les vignes avaient brûlé à cause de la chaleur, se souvient Marcellino Massa. L’Issole et l’Argens qui ont toujours de l’eau étaient à sec. Les gamins faisaient du vélo sous les ponts. Et à l’époque, on se posait déjà ces questions… » (Photo DR)

d’Inter-fourrage, l’entreprise varoise spécialisé­e dans la vente de foin et située aux Arcs. Car il faut bien sûr de l’eau pour que le foin pousse.

Mais ça va venir, il a bien plu donc nous pensons que ça va pousser. C’est vrai qu’on a un petit peu moins de foin que d’habitude. Mais ce n’est pas catastroph­ique. En revanche il faut qu’il continue à pleuvoir sinon ça va le devenir...»

Quelles mesures de prévention mettre en oeuvre pour atténuer l’impact de la sécheresse ?

« On ne peut rien faire, tranche Jacques Courron.

Stocker de l’eau ? Pour faire une retenue collinaire, il y a des permis de construire, d’autorisati­on de travaux difficiles voire impossible­s à obtenir. Pour faire des citernes, c’est pareil. Pour des raisons environnem­entales. La quasitotal­ité du départemen­t est en zone protégée, site classé ou parc national. Les réglementa­tions sont draconienn­es. On se heurte à de la paperasse française ».

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(Photo Florian Escoffier) Pour Pierre Venel, maraîcher à La Roquebruss­anne, la situation actuelle est plus préoccupan­te dans les nappes phréatique­s qu’en surface où les gouttes des derniers jours ont été précieuses.
 ?? ?? Jacques Courron, éleveur à Gourdon, est à la tête d’un troupeau de 500 ovins.
Jacques Courron, éleveur à Gourdon, est à la tête d’un troupeau de 500 ovins.

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