Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)
Quelle nouveauté ?
Peut-on faire en politique du neuf avec du vieux ? La question est aujourd’hui posée aussi bien au chef de l’État qu’à ses opposants. Après avoir refermé « la page du vieux monde » en 2017, Emmanuel Macron place sa réélection sous le signe de la nouveauté. Son parti a changé de nom et s’appelle désormais Renaissance, comme si LREM venait du Moyen-Âge alors qu’il est né en 2017. Ce samedi, lors de son discours d’investiture, Jupiter est devenu soudain Phénix en lançant :
« Ce peuple nouveau, différent d’il y a cinq ans, a confié à un président nouveau un mandat nouveau. »
La nouveauté est aussi à l’ordre du jour à gauche avec cette Nouvelle Union populaire écologique et sociale (Nupes) que Jean-Luc Mélenchon présente comme une nouvelle page de l’Histoire politique de la France et la fin d’un système. Cette volonté affichée de nouveauté, vieille comme le monde tant la promesse de temps nouveaux est une rhétorique récurrente des acteurs de l’Histoire, est en filigrane un aveu d’échec. Que vaut le passé récent quand on s’empresse ainsi d’en tourner la page ? L’esprit nouveau fait surtout écho à un mécontentement général accompagné d’un besoin de changement mal défini. C’est bien l’état de la France d’aujourd’hui, un pays dans l’attente plus que dans l’espérance à l’issue d’une élection présidentielle qui s’est jouée davantage sur le rejet que sur l’adhésion.
Certes, il y a eu des programmes et des propositions sur des problèmes immédiats ou quotidiens, comme la question brûlante du pouvoir d’achat, mais rien ou presque sur l’avenir du pays, alors que la guerre est à nos portes. Le mot « nouveau » recouvre donc pour l’heure du vide et demande un contenu. Emmanuel Macron tarde à l’expliciter et à lui donner une incarnation en la personne d’un nouveau Premier ministre. Le temps de la campagne législative sera en outre si bref qu’il semble bien difficile d’en faire une rampe de lancement pour une Renaissance à inventer.
Il en va de même pour les oppositions. Le Rassemblement national (RN) défend une politique réactionnaire au sens strict du terme et le repli sur soi.
Quant à Jean-Luc Mélenchon, sa volonté de sortir de l’Europe, de l’Otan et de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) ressemble à un grand bond en arrière qui a fait dire, hier, à l’ancien Premier secrétaire du PS, JeanChristophe Cambadélis : « Mélenchon nous conduirait dans la situation de la Corée du Nord. »
Reste Les Républicains, également tournés vers le passé, sans idées nouvelles ni vision du futur, placés sur la défensive après la déroute de leur candidate à la présidentielle. Autant dire que la nouveauté est une recette aussi creuse qu’éculée, sans cesse reproposée au pays pour lui faire croire qu’il occupe une place spéciale dans le monde. Nihil novi sub sole (rien de nouveau sous le soleil, en latin).
« La nouveauté est une recette aussi creuse qu’éculée »