Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)

« Il ne s’agit pas d’un parachutag­e, j’ai l’intention de m’implanter ici »

- PROPOS RECUEILLIS PAR LIONEL PAOLI lpaoli@nicematin.fr

La chemise blanche, lumineuse sur le pantalon crème, met en valeur un bronzage impeccable. Éric Zemmour paraît radieux. Les mocassins plantés dans la pelouse de son ami Marc-Etienne Lansade (1), le candidat d’extrême droite vient d’apprendre une « excellente nouvelle ». La cour d’appel de Paris confirme sa relaxe pour « contestati­on de crimes contre l’humanité ».

Il était poursuivi pour avoir affirmé, lors d’un débat télévisé, que « Pétain a sauvé les juifs français. »

« C’est bien la preuve qu’on m’a fait, au sens propre, un mauvais procès,

grince-t-il. Je n’ai jamais nié le génocide des juifs. On a voulu m’atteindre en déformant mes propos. Maintenant, la vérité est rétablie ; j’en suis heureux et soulagé. »

Puis, d’un geste vif, il balaie le problème. Comme pour renvoyer cet épisode dans les oubliettes. Et signifier qu’il entend désormais conjuguer ses engagement­s au futur.

Vous êtes candidat dans le Var où vous n’habitez pas. Vous êtes donc un « parachuté » ?

Il ne s’agit pas d’un parachutag­e ; j’ai l’intention de m’implanter ici. Vous le savez, j’ai une histoire particuliè­re avec ce départemen­t. C’est ici, l’été dernier, que j’ai accordé à votre titre la première interview qui annonçait ma campagne. C’est à Toulon que j’ai tenu mon premier meeting, c’est également ici que Marion Maréchal m’a rejoint. J’aime le Var et les Varois. En retour, j’ai l’impression qu’ils m’aiment bien.

Vous avez d’abord été annoncé à Cannes, dans la huitième circonscri­ption des AlpesMarit­imes. Vous avez hésité ?

Il n’en a jamais été question. [Il sourit] Vous savez, il y a eu beaucoup de rumeurs infondées qui circulent…

Dans cette 4e circonscri­ption du Var, vous avez obtenu l’un de vos meilleurs scores le 10 avril : 14,7 % des voix. C’est tout de même deux fois moins que Marine Le Pen (32,2 %). Vous pensez avoir une chance ? [Il hausse les épaules] Qui peut le savoir ? Dans une élection, il arrive de perdre – mon expérience récente me permet d’en témoigner. Mais personne ne peut prévoir les résultats à l’avance.

Les sondages promettent à Reconquête !, au mieux, un ou deux sièges au Palais Bourbon.

Cela ne vous décourage pas ?

Oh, il en faut davantage pour me décourager ! La campagne commence à peine. J’ai le sentiment que les idées que je porte trouvent un écho auprès des Français.

Quel intérêt d’être élu, si vous n’êtes pas assez nombreux pour former un groupe ?

(2)

Êtes-vous capable de me citer le nom de tous les députés RN ? Je parie que ce n’est pas le cas. En revanche, la France entière connaît le nom et les conviction­s de Jean Lassalle. C’est la personnali­té de l’élu qui compte. Après, ce qui est certain, c’est que la droite aurait eu davantage de chances si nous nous étions présentés unis.

Vous avez tendu la main au RN et à LR. Sans résultat ?

[Il secoue la tête] Aucun de mes appels n’a été entendu. J’ai bien compris que, pour des questions d’ego, les dirigeants de ces partis préfèrent perdre séparément plutôt que gagner ensemble. C’est regrettabl­e. D’autant plus que les électeurs, eux, souhaitent que nous fassions front commun.

Ne portez-vous pas une part de responsabi­lité ? Pendant la campagne, vous n’avez pas ménagé vos attaques contre Marine Le Pen… Bien sûr. Mais comme vous le dites, c’était la campagne. Moi-même, je n’ai été ménagé par personne ! Marine Le Pen a repris contre moi tous les arguments de la gauche. Elle est allée jusqu’à dire que j’étais entouré de nazis ! Faut-il rester bloqué sur des petites phrases prononcées de part et d’autre ? Je ne le crois pas.

Relever que le « nom de Le Pen est associé à l’échec pour la huitième

fois », au soir du premier tour, ce n’était peut-être pas la meilleure façon de préparer l’union…

On ne doit jamais regretter d’avoir dit la vérité.

N’était-ce pas, a minima ,une erreur stratégiqu­e ?

Il faut savoir dépasser ce genre de choses. Regardez à gauche : ils ont été sans pitié les uns avec les autres pendant la campagne. Mais aujourd’hui, ils sont unis. Pourquoi, à droite, ne sommesnous pas capables de faire la même chose ? C’est d’autant plus regrettabl­e que la Nupes de JeanLuc Mélenchon réactive le clivage gauche-droite.

À Nice, le frontiste Philippe Vardon a été privé d’investitur­e parce qu’il réclamait, comme vous, des candidatur­es d’union. S’il quitte le RN, ou s’il est exclu, vous êtes prêt à l’accueillir ?

Bien sûr. C’est un homme de conviction, intelligen­t et cultivé.

S’il le souhaite, nous l’accueiller­ons les bras ouverts. Nous sommes sur la même ligne.

Dans les Alpes-Maritimes, Reconquête ! ne présente pas de candidat dans la circonscri­ption d’Éric Ciotti (LR). Est-ce lui qui vous l’a demandé ?

Pas du tout. Nous avons voulu faire un geste pour montrer que nous étions unitaires. C’est pour cela que nous n’avons pas présenté de candidat contre Marine Le Pen, Nicolas Dupont-Aignan et Éric Ciotti.

Un mot sur la présidenti­elle. Franchemen­t, vous vous attendiez à un score aussi faible (7,07 %) ? Au début du mois de février, lorsque nous dépassions Marine Le Pen, évidemment pas ! C’est la guerre en Ukraine qui a rebattu les cartes. Notre dynamique a été cassée.

‘‘ Si Philippe Vardon le souhaite, nous l’accueiller­ons à bras ouverts ”

‘‘ La guerre en Ukraine a rebattu les cartes ”

Votre première réaction, appelant à ne pas accueillir les réfugiés ukrainiens, ne manquait-elle pas d’humanité ?

Je pense qu’elle était maladroite sur la forme.

Je n’ai aucune difficulté à accueillir ces Européens qui sont catholique­s et partagent notre culture occidental­e. C’est que je ne voulais pas, c’est que cela serve de prétexte pour recevoir n’importe qui ! Je souhaitais que l’émotion n’emporte pas toute capacité de réflexion.

Songez-vous déjà au match retour de 2027 ?

[Il éclate de rire] C’est un peu tôt ! Mais je suis là pour inscrire mon mouvement dans la durée.

1. Le maire de Cogolin, qui a quitté le FN en 2017, l’a rejoint en février.

2. Pour former un groupe à l’Assemblée nationale, il faut au moins quinze députés.

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(Photo Frank Muller) « La droite aurait eu davantage de chances si nous nous étions présentés unis », affirme Eric Zemmour.

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