Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)
le bonheur de rendre
Le coeur sur la main. La main sur le détecteur à métaux. Depuis plus de quarante ans, Jean-Pierre et Christine Bonnet sont à la recherche... du sourire des gens. « Aujourd’hui, c’est vraiment ce qui nous motive, avoue la retraitée. Voir un visage s’illuminer quand on leur rend un bijou, il n’y a rien de plus beau ! » Pour ce petit moment de bonheur partagé, le couple lucois ne compte pas ses heures. Passées le plus souvent depuis 2019 dans l’eau trouble du « Drop-in Dracénie water jump parc » à Vidauban, à la recherche des objets perdus par les clients.
À la pêche aux objets perdus
Jean-Pierre, ancien plongeur-démineur, est à la manoeuvre. « Je ratisse le fond avec mon détecteur d’une main et je gratte au hasard de l’autre. » Très souvent, la pêche est bonne. Montres, gourmettes, téléphones, Go-Pro... «Et même une perruque, un capot de maquette de sous-marin, une canne à pêche et une prothèse dentaire ! »
Le plaisir de rendre efface les douleurs physiques. Heureusement. Car à bientôt 70 ans, le couple ne parvient plus à répondre à toutes les sollicitations. « Entre la préparation, la recherche et le nettoyage des objets trouvés et du matériel, une intervention demande deux jours de travail. Ce n’est pas rien. »
Avant de mettre leur nez dans le plan d’eau vidaubanais, Christine et JeanPierre ont débuté sur la terre ferme. Celle, fertile, de Normandie. «Unami gendarme nous a fait découvrir la détection, se souvient Jean-Pierre. Madame a trouvé un bouton argenté. C’était la chance du débutant. » Et le début d’une passion.
Au sein d’une association, le couple a écumé les plages, les champs. « Toujours en demandant l’accord du propriétaire. » Mais sans savoir qu’en réalité, il faut également obtenir une autorisation préfectorale (lire par ailleurs). C’est en revenant dans le sud, au gré des mutations professionnelles, que les détectoristes se heurtent à la complexité administrative. « Nous étions dans un champ, sur les hauteurs de Draguignan, non loin d’un site archéologique, lorsqu’un conservateur est venu en nous prévenant que les gendarmes pouvaient nous confisquer notre matériel. On ne le savait pas...»
« Concilier notre passion avec les exigences de la loi »
Échaudés, Christine et Jean-Pierre décident de se tourner vers la recherche d’objets perdus. « SOS objets perdus Var » voit donc le jour. « De la sorte, nous sommes parvenus à concilier notre passion avec les exigences de la loi, précise Jean-Pierre. Comme quoi, c’est possible ! Il y a même la possibilité pour ceux qui le souhaitent de se faire un peu d’argent en intervenant pour les assurances. »
À « SOS objets perdus Var », le succès a été immédiat. D’autant plus que le couple ne facture pas ses interventions. « Mais cela soulève de la suspicion chez certains, soupire Christine. Ils disent que ce n’est pas normal qu’on ne demande rien en échange. On nous a même accusés de vol lorsqu’on ne parvient pas à retrouver les objets ! » Désormais, pour éviter tout débat, une participation est demandée lors des plongées à Vidauban.
Mais les Lucois interviennent aussi à domicile. Pour retrouver des clés jetées par la fenêtre après une dispute, des bijoux cachés dans une habitation suite à une succession et même... un corps après la disparition d’une dame âgée, souffrant d’Alzheimer. «La famille, sur les conseils d’une voyante, nous a demandés en novembre dernier de fouiller l’étang de Badelune, au Cannet-des-Maures. Mais elle n’était pas là. » Sa dépouille sera découverte par une promeneuse quelques jours plus tard.
Dans quelques jours, la saison va reprendre au « Drop-in ». Christine et Jean-Pierre savent qu’ils vont être sollicités tout l’été. « Ce sera dur, mais c’est tellement bon de rendre les gens heureux ! » En attendant, le couple a rendez-vous la semaine pour rendre à un fils le pendentif de son défunt père, retrouvé dans la vase. Et ça, ça vaut tout l’or du monde.