Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)
La colère gronde contre les nouvelles règles du marché
L’adoption, il y a quelques semaines, du nouveau règlement du marché hebdomadaire du samedi, ne provoque pas franchement une adhésion unanime. C’est même tout le contraire.
Entre les fruits et les légumes, au détour des fromages ou des vêtements, près des plantes ou des viennoiseries, c’est presque palpable. Il suffit de poser la question : «Que pensez-vous du nouveau règlement du marché ? » Grimaces, soupirs, colère. Ils sont peu, ceux qui se satisfont de ce nouveau document.
« Moi, ça me va, sourit Florian Lambic, producteur de fruits et légumes brignolais. Les tarifs augmentent, comme tout. Mais si ça permet de dynamiser le marché, si on paye un peu plus mais qu’on vend toute notre marchandise, tant mieux. » Il est bien le seul, dans le panel des commerçants interrogés, à envisager l’avenir avec « espoir » : «J’y crois encore, je ne suis là que depuis trois ans. Après, si dans un an, on paye davantage mais que rien d’autre n’a changé, on verra!»
L’abonnement dans le viseur
Le prix qui augmente, c’est en effet ce que reprochent bon nombre de commerçants. Mais ce n’est pas tout. Le principe d’un abonnement corrélé à la garantie de conserver son emplacement provoque la grogne de nombreux professionnels. « Avec l’abonnement, nous avons la garantie de garder notre place. La place, c’est primordial, c’est presque notre
fonds de commerce, souligne Patricia Rougny, fromagère. Si on ne s’abonne pas, cette place n’est plus réservée pour nous, les titulaires. »
Les titulaires, ce sont ceux qui, au regard de leur ancienneté et de leur assiduité, ont acquis un droit d’occupation tacitement reconduit chaque année. Avec le nouveau règlement, beaucoup ont l’impression
que tout est remis à plat. Sauf que l’abonnement permet de limiter la hausse du tarif d’installation. Conserver son emplacement et payer moins cher : l’abonnement, finalement, c’est « tout bénef’ » ? Pas tout à fait…
« Prêts à partir de Brignoles »
Dans un marché, les titulaires comme les commerçants
passagers sont parfois absents. En raison de la saisonnalité de leur produit, à cause d’une maladie ou d’une intempérie, pour des périodes de congés (cinq semaines permises par la profession). La plupart du temps, même en cas d’abonnement, les absences sont remboursées au commerçant : il ne paie son emplacement que s’il vient. À Brignoles, ce ne
sera désormais plus le cas. « On va payer 52 semaines sur 52. Une aberration. » Frédéric Van Der Steeg, horticulteur de Gonfaron, au stand prisé des amoureux de plants, ne décolère pas : « Ça fait plus de 20 ans qu’on fait le marché. Là, on ne sait pas à quelle sauce on va être mangés. Avec nos produits, on vient 5 ou 6 mois sur 12. On ne va pas payer 52 semaines sur 22 de présence.
Mais si je ne le fais pas, on me change de place ? Si c’est ça, on ira ailleurs, sur un autre marché. »
« Ça fait une drôle d’histoire »
Même constat du côté d’Aurélie Gallezot : «Je cherche déjà une place sur un autre marché. Ça fait une cinquantaine d’années qu’on est là, j’ai repris l’emplacement de ma mère. Ce n’est pas évident de le dire, mais : oui, si c’est appliqué comme ça, je ne viens plus ici. » Aux olives, à la rôtisserie, pareil. Grimaces, soupirs, colère.
S’il s’agit là d’un échantillon pas forcément représentatif de l’avis de tous, il a été difficile de trouver des défenseurs du nouveau système : « Ça fait une drôle d’histoire, dira tout de même Maryse, la mercière. C’est partout pareil, il faut s’y faire, mais ce n’est pas si terrible… »
Philosophe ? Fataliste ? Les autres restent moins conciliants : « On nous impose un choix, donc on n’a pas le choix. Moi, je ne peux pas faire autrement, j’accepte. Mais ce n’est pas normal. »
D’autant moins quand les commerçants commencent à comparer avec les marchés des alentours. À Cotignac ou encore à Garéoult, le principe est différent : on paye quand on est là. Un peu comme à Brignoles, avant que tout ne change.