Var-Matin (Fréjus / Saint-Raphaël)
Rétention des fichés “S” : « impossible » répond le procureur de Paris
(La Défense Lincoln), qui met en scène la vedette de la série Breaking Bad, Bryan Cranston, dans le rôle d’un agent fédéral infiltré dans le cartel de Medellin. En son absence, c’est sa partenaire du film, Diane Kruger, qui a ouvert le défilé des stars avec Chloë Grace Moretz venue recevoir le Prix du nouvel Hollywood. Sont attendus jusqu’au 11 septembre pour cette 42e édition, James Franco et Stanley Tucci (auxquels sera rendu un hommage et qui inscriront leur nom sur les fameuses planches de la promenade) et Harry Potter en personne, Daniel Radcliffe. Une centaine de films, la plupart issus du cinéma indépendant US, seront présentés cette année à Deauville, dont une quinzaine en compétition officielle. L’ancien ministre de la Culture Frédéric Mitterrand y préside un jury « all stars » composé de Françoise Arnoul, Éric Elmosnino, Sara Forestier, Ana Girardot, Douglas Kennedy, Radu Mihaileanu, Emmanuel Mouret et Marjane Satrapi. Le procureur de la République de Paris, François Molins [photo AFP], a jugé, hier, sévèrement, dans une interview au Monde, l’idée « absolument impossible » de placer en rétention les individus fichés « S » ou celle de créer un parquet national spécial pour l’antiterrorisme. Placer en rétention les individus fichés «S» (sûreté de l’Etat) par les services de renseignement, comme le préconisent certains à droite, et notamment Nicolas Sarkozy, « c’est absolument impossible », répond le procureur. « Il ne peut y avoir de détention préventive en dehors d’une procédure pénale. C’est le socle de l’état de droit. On ne peut pas détenir quelqu’un avant qu’il ait commis une infraction », souligne-t-il. Depuis la vague d’attentats qui a touché la France, des voix s’élèvent aussi régulièrement pour réclamer la création d’un parquet national spécial pour les affaires de terrorisme. « Je ne sais pas si cela relève de l’ignorance ou de la mauvaise foi ! », réagit le procureur de Paris, en soulignant que « depuis trente ans, la justice antiterroriste fonctionne de manière centralisée et spécialisée », avec une section dédiée au sein du parquet de Paris, des juges d’instruction spécialisés, et la 16e chambre correctionnelle ou la cour d’assises spéciale, qui « a son propre fonctionnement, sans jury » populaire. Le procureur rappelle que son parquet a décidé « un durcissement considérable de sa politique pénale en criminalisant des dossiers correctionnels ». qu’elles représentent, sauf à violer l’État de droit ; d’autre part, il estime que la création d’une Cour de sûreté créerait une justice spéciale contraire à la Convention européenne des droits de l’homme. Ces deux arguments, qui correspondent aux attaques actuelles du gouvernement contre l’ancien chef de l’État, affaiblissent son intervention car contraires au principe de neutralité politique de la justice. L’essentiel, cependant, n’est pas là. La stratégie du procureur soulève plusieurs questions. La première concerne sa décision de criminaliser les délits. Sur quel texte s’appuie-t-il pour le faire ? Aucun, semble-t-il. D’où une interrogation sur l’État de droit aussi. La seconde vise la détention préventive d’individus dangereux : aujourd’hui, légalement impossible, ne deviendrait-elle pas conforme à l’État de droit si une loi la permettant était adoptée ? Enfin –Nicolas Sarkozy ne peut d’ailleurs pas l’ignorer non plus -, il existe en France depuis une Cour d’assises spéciale, composée exclusivement de magistrats professionnels, qui ressemble fort à l’ex-Cour de sûreté de l’Etat supprimée en ! Depuis ans, son existence n’a pas été remise en cause... En vérité, la nature du djihadisme bouleverse toutes les règles de la lutte antiterroriste car nous sommes face à des assassins qui viennent pour tuer et, c’est la difficulté, pour mourir en même temps. D’où la nécessité de s’interroger sur la prévention des crimes et l’arsenal juridique qui permettrait de stopper ces « bombes humaines » avant qu’elles ne tuent aveuglément. Sans doute faut-il des lois mais aussi un effort considérable sur le renseignement pour agir avant qu’il ne soit trop tard.