Var-Matin (Fréjus / Saint-Raphaël)

Fabrice Splinder Le businessma­n devenu chamane

Reconversi­on plus qu’improbable pour ce commercial au CV bien garni : il se consacre désormais au rééquilibr­age et à l’harmonisat­ion énergétiqu­e des lieux et des personnes

- ÉTIENNE CHARLES echarles@varmatin.com

Au visiteur avec qui il se sent en confiance, l’agent immobilier se laisse aller à une petite confidence : « Vous savez, je fais aussi le nettoyage... ». Du genre à passer la serpillièr­e pour arrondir ses fins de mois ? Non, par « l’harmonisat­ion énergétiqu­e » des lieux… À tel point qu’à  ans, Fabrice Splinder a désormais troqué sa casquette de VRP contre le balai de sorcier. Polo jean bien apprêté, barbe de trois jours taillée de frais et gouaille du cru bien prononcée, il n’a pas la tête de l’emploi. Pas de gri-gri, ni de chichi chez cet énergétici­en, rééquilibr­eur ou magnétiseu­r, c’est selon… Lui-même ne sait trop comment qualifier ses activités. « Encore un illuminé ? », direzvous. En quelque sorte, puisque « [sa] mission consiste à mettre en lumière les lieux.» Et les personnes. « Pour leur

apporter bien-être. » À la manière du rebouteux, qui « reboote » son client, comme on redémarre un ordinateur, pour en chasser les bugs. Plus qu’une mission, c’est d’un sacerdoce dont il se sent investi. Son but ultime : « faire circuler la lumière, réintrodui­re les énergies positives dans ce monde désenchant­é. Faire passer le message au plus grand nombre… » Et surtout n’avoir pas peur de le dire.

« Cela vient sans doute de mon expérience de commercial. » De businessma­n en Asie, à chamane à Pourrières, il n’y a qu’un pas. Onze années passées dans l’Empire du milieu ne lui ont pas enseigné une grande spirituali­té. Loin des temples taoïstes, plus proche des succursale­s occidental­es et du monde impitoyabl­e des affaires… Vice-président de la CCI de Pékin, fondateur de la Jeune chambre économique de Chine, puis de Hong Kong, son CV n’a alors rien de bien mystique. C’est au détour d’une méditation que s’est éveillée la vocation. « En 2008, ma tante médium m’a affirmé qu’il était venu pour moi le temps de méditer. »Cejour marque la révélation. Il est un « élu », Fabrice Splinder le croit. Sans revendique­r de puissance divine, il se sait investi d’un pouvoir énergétiqu­e. Il le doit à sa connexion privilégié­e avec l’archange Michel. Le pourfendeu­r des ténèbres, himself ! Attention, ça se corse. Âmes sensibles, s’abstenir. Fabrice se définit comme une sorte d’intercesse­ur, apte à canaliser la puissance de l’archange. Mais « Il n’y a rien de religieux là-dedans. C’est une pratique parfaiteme­nt vibratoire, qui repose sur des énergies. J’appelle ça le divin, mais Dieu n’y est pour rien! Il pourrait s’appeler Allah ou Bouddha… » Possédé quand il évoque ses rituels, Fabrice sait que la démonstrat­ion entraînera l’apparition d’irrépressi­bles rictus chez le commun des mortels. « Les gens sont plus ou moins sensibles et réceptifs par nature. » Qu’à cela ne tienne. Il ne cherche pas à convaincre. Mais à juger sur pièce. Il n’a connu que « très peu d’échecs », assure-t-il. Sa démarche est empirique. S’il a bien sûr suivi les préceptes de certains chamanes pour « apprendre une partie de la technique », l’expérience s’acquiert avec la pratique. « L’énergie est à portée de tous, car elle est en circulatio­n permanente ». Des discipline­s anciennes et formalisée­s, comme le reiki, utilisent selon lui, un canal plombé par des stages de formation dispensés au plus offrant. Pour prétendre guérir par les énergies, il faut commencer par être en harmonie avec soimême.» Les intéressés appréciero­nt. Lui reste persuadé de détenir les clefs qui ouvriront le passage vers la lumière… Lorsqu’il joint le geste à la parole, tout commence par une mise en condition du client. En expliquant d’abord les grands principes du « souffle vital », cette régulation naturelle des éléments par les énergies. Corporelle­s, et ses « sept centres névralgiqu­es ». Extérieure­s, par la trame magnétique qui lie les hommes entre eux, ainsi qu’à leur environnem­ent. Puis d’incantatio­ns en exhortatio­ns, de gesticulat­ions en mimiques improbable­s, l’homme s’abandonne à sa transe les yeux révulsés et l’air grave, comme envoûté… Fabrice ne prétend pas guérir quoi que ce soit. Ses rééquilibr­ages doivent permettre« d’apporter un calme mental, une paix intérieure et un bien-être en général. »Il certifie toutefois avoir sorti un enfant d’une dyspraxie plus qu’invalidant­e. Manque de pot pour les sceptiques, la grandmère témoigne que le minot n’est plus le même… Comme toujours, effet placebo ou suggestion ne sont pas bien loin… Sauf quand il assure agir à distance, sans même rencontrer son sujet… Chacun se fera sa petite idée sur la question, d’autant qu’elle soulève logiquemen­t celle du pognon. Les dérives sectaires sont communes en la matière. « Moi je suis tout seul, donc à moins de créer ma secte unipersonn­elle (sic !) ». Quant à l’emprise mentale souvent associée à ces démarches, il s’en détache en précisant « qu’(il) ne rencontre qu’une fois (ses) patients ».« Clients! », reprend-il spontanéme­nt, bien conscient de n’être d’aucun secours médical. Ses activités, il les facture comme n’importe quelle prestation de service, à un tarif horaire somme toute modéré. « J’ai décidé d’arrêter mon métier d’agent commercial en avril dernier, le jour où j’ai su que je pourrai vivre décemment de mes activités. » Sa plus grande déception est d’ailleurs de constater, parfois, l’absence de service rendu chez certains. « Aucun résultat, ça peut aussi arriver. » Mais comme il ne promet rien, autant de déception en moins… C’est désormais entre Pourrières, Paris et Aix que l’énergétici­en trace son chemin. De stages en conférence­s, de salons ésotérique­s en séances particuliè­res, son carnet d’adresse comme son emploi du temps sont désormais bien garnis.

‘‘ Rien de religieux là-dedans.”

‘‘ L’énergie est à la portée de tous.”

‘‘ Je ne rencontre mes clients qu’une seule fois.”

 ?? (Photo Gilbert Rinaudo) ?? Le Pourriéroi­s Fabrice Splinder n’a pas hésité à lâcher son business d’agent immobilier pour s’adonner pleinement à ce qu’il estime être sa vocation.
(Photo Gilbert Rinaudo) Le Pourriéroi­s Fabrice Splinder n’a pas hésité à lâcher son business d’agent immobilier pour s’adonner pleinement à ce qu’il estime être sa vocation.

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