Var-Matin (Fréjus / Saint-Raphaël)
David Ginola : « Je n’ai rien vu venir »
Quand il est apparu dans la salle des Muses, au palais Acropolis, il a suscité une immense vague de sympathie. D’affection même. Tant les gens ont eu peur pour leur Magnifico.Revenud’entreles morts par la grâce d’une succession de gestes qui lui ont été providentiels, David Ginola n’a pas su, pas pu, masquer son émotion lorsqu’il a revu Alexia, cette infirmière qui a joué un rôle déterminant le 19 mai dernier. Mais avec ce sourire ravageur et une envie folle de croquer la vie, l’ancien footballeur professionnel s’est trouvé une nouvelle cause. Après avoir luttécontrelesminesantipersonnel dans le monde entier [il avait succédé à Lady Di, ndlr] c’est pour les gestes qui sauvent que David s’est engagé. Après nous avoir régalé de ses gestes techniques sur un terrain.
David, on se pose tous la question après ce que vous avez vécu: comment allezvous? Ça va… (Petit blanc) .Iln’ya pas de séquelles visibles.
Comment vous abordez la vie maintenant? Si je vous dis que j’ai changé radicalement, je vous mentirais. Mais je suis revenu à la vie! Il y a eu un avant mai et un après. Dire que tout a changé et que tout est différent aujourd’hui, ce n’est pas vrai. On reste avec ses enfants, sa vie, son travail. Je suis revenu à la vie active en faisant face à tout le reste.
La vie. Le mot prend un sens différent désormais? Forcément, j’ai failli la perdre. La retrouver en ne sachant pas véritablement pourquoi… Quand on vous dit que vous êtes un miraculé et que j’avais plutôt neuf chances sur dix d’y rester, ça laisse perplexe sur plein de choses.
Vous n’aviez jamais connu d’alerte auparavant. Cela a été soudain? Apparemment j’ai fait un petit infarctus durant la saison de ski. Quelques semaines plus tôt. J’ai été fatigué. On était parti hors piste avec des jeunes de l’équipe de France… Et au milieu du hors-piste, après une heure et demie de ski, j’ai ressenti une grosse fatigue.
Et le mai non plus, pas le moindre signe annonciateur? Non. J’ai juste eu un peu mal à l’aine à un moment. Mais tout le monde me disait que j’étais magnifique! Je faisais des ciseaux retournés. Ils m’ont même dit que j’étais encore bon pour jouer en club. On m’a quand même dit à l’hôpital que ce qui m’est arrivé faisait suite à un effort violent. Ce n’est pas en restant à table que cela serait arrivé.
Vous ne vous êtes jamais considéré comme malade du coeur. Vous n’aviez jamais intellectualisé le fait que cela pouvait arriver ? Non seulement je ne l’avais jamais intellectualisé. Mais pour tout le staff du centre cardio de Monaco, je reste une énigme. À part d’avoir perdu trois ou quatre kilos, je n’ai aucune séquelle physiologique ni neurologique. La tuyauterie est neuve. Donc moi, je suis reparti illico dans le stress des émissions en direct pendant l’Euro. Personne m’a dit d’y aller doucement. C’est grâce aussi au processus qui s’est enchaîné dès le premier instant jusqu’à l’intervention chirurgicale. Ils m’ont massé pendant près de minutes en attendant les pompiers. Sans jamais s’arrêter. Ça m’a sauvé.
Ce nouveau rôle d’ambassadeur des gestes qui sauvent, c’est quelque chose qui vous tient… À coeur forcément? C’est ultra-important. Quand je parle avec Frédéric Mendy [qui a pratiqué le massage cardiaque sur David Ginola pendant de longues minutes, ndlr] je sens toute l’émotion qu’il a de m’avoir sauvé la vie. Pour son fils, il est un héros. Tout le monde devrait connaître ces gestes basiques. Il doit y avoir des cours dans les écoles. En famille on doit savoir quoi faire.
Vous soutiendrez la cause jusqu’au bout? J’espère ne plus avoir à le faire, le jour où tout le monde sera au courant des gestes qui sauvent. Et ça viendra vite je pense. On ne parle pas pour soi là. On parle de sauver la vie des autres: et ça peut être son propre enfant, son mari, un ami ou un inconnu. Surtout que ça représente quoi dans la vie? Que dalle! On ne parle pas de plusieurs années d’études. En revanche ça peut changer à tout jamais la vie de celui que l’on peut sauver. Quand je sais, je me sens plus fort. C’est ça tout l’enjeu de cette cause nationale.