Var-Matin (Fréjus / Saint-Raphaël)

Emmanuel Maurel: «Un PS clair sur ses valeurs»

Le plus à gauche des candidats à la direction du PS souhaite un parti ouvert à l’ensemble de la gauche et qui reste fidèle à ses promesses une fois au pouvoir

- PROPOS RECUEILLIS PAR THIERRY PRUDHON tprudhon@nicematin.fr

Nous poursuivon­s notre présentati­on des projets des quatre candidats à la direction du Parti socialiste. Après Stéphane Le Foll (10 février), Luc Carvounas (12 février) et avant Olivier Faure, Emmanuel Maurel, considéré comme le postulant le plus à gauche, livre aujourd’hui sa vision du socialisme du XXIe siècle. Qu’est-ce qui vous a poussé à être candidat ? D’abord l’amour du Parti socialiste et le fait qu’il est en grande difficulté mais que j’estime, avec d’autres, qu’il a encore une mission à jouer dans la société française. Il est possible de le relever, pourvu qu’un certain nombre de conditions soient remplies.

Justement… On vous présente comme le plus à gauche des quatre candidats. Quel PS voulez-vous incarner ? Un Parti socialiste qui soit clair sur ses valeurs, clair dans l’opposition, clair dans sa volonté de rassembler la gauche, clair aussi dans sa capacité à faire la synthèse entre ses fondamenta­ux et les idées et les luttes nouvelles qui émergent dans la société et dans le monde.

La figure historique socialiste dont vous vous réclamez ? Il y en a plusieurs. Jean Jaurès, c’est une réponse convenue, mais c’est quand même un de nos grands ancêtres. Léom Blum, aussi. Et puis, bien sûr, il y a la figure de François Mitterrand.

Quel bilan dressez-vous du quinquenna­t Hollande ? Franchemen­t, ce quinquenna­t s’est révélé très décevant. Il y a eu un certain nombre de bonnes mesures, notamment au début, comme le mariage pour tous et le droit à partir à la retraite à soixante ans pour les gens ayant effectué des carrières longues. Mais il y a eu aussi une série de couacs et de déceptions, et surtout de mesures qui ont tourné le dos à notre identité profonde de socialiste­s. Je pense en particulie­r à la déchéance de nationalit­é, à la loi Travail et, de façon moins spectacula­ire mais qui a laissé des traces, à la démarche de donner quarante milliards d’euros aux entreprise­s sans aucune contrepart­ie pour le monde du travail. A travers ces différents choix, les gens ne nous ont pas reconnus comme socialiste­s. Votre vision semble assez proche de celle de Luc Carvounas. Qu’est-ce qui vous distingue, en fait ? Il est plutôt normal qu’il y ait quand même des points communs entre les candidats. Mes différence­s avec Luc Carvounas sont connues. Lors du dernier quinquenna­t, nous étions à des places très différente­s. Lui était très proche de Manuel Valls.

Mais il s’en est depuis éloigné pour se gauchiser nettement… Je trouve ça bien. Mais on ne peut pas me reprocher d’avoir été constant ces dernières années, ce serait un comble. Je ne suis pas connu pour louvoyer. Je ne suis pas rouge vif dans l’opposition et bleu pâle au pouvoir. J’essaie d’être cohérent, qu’on soit dans l’opposition ou au pouvoir.

Vous êtes en tout cas le candidat préféré de La France insoumise. Qu’est-ce qui vous sépare d’elle ? La première chose, c’est que je suis socialiste. Je crois à une actualité et une singularit­é du socialisme français, c’est dans cette famille-là que je me reconnais. Ensuite, ce qui est vrai, c’est que j’ai toujours dit que rien de ce qui était à gauche ne m’était étranger. A partir du moment où on assume d’être dans l’opposition à Emmanuel Macron, il faut discuter avec tout le reste de la gauche, ce qui ne se limite pas à La France insoumise. Pour répondre à votre question, j’ai avec elle des différence­s de degré et non de nature.

Sur la refonte des fonctionne­ments internes, les quatre candidats proposent peu ou prou la même chose, non ? Le principal problème du quinquenna­t précédent a été que le PS s’autocensur­e. Il est devenu atone, sous prétexte que nos camarades gouvernaie­nt. Si on avait demandé plus souvent leur avis aux militants socialiste­s, s’ils avaient été consultés plus régulièrem­ent, l’histoire aurait peut-être été différente. Ce qui est pour moi fondamenta­l, c’est la consultati­on régulière des adhérents sur les grandes questions de société ou sur des points d’actualité. Si je suis élu premier secrétaire, je consultera­i ainsi les militants sur le CETA, l’accord de libre-échange entre l’Europe et le Canada.

Votre sentiment sur un éventuel changement de nom ? Je ne crois pas que ce soit la priorité. Je suis attaché au nom du Parti socialiste parce qu’il a une histoire, une tradition, des rites, de grandes figures. Ce n’est pas le nom qu’il faut changer, mais la manière de fonctionne­r. Notamment, ce que beaucoup nous reprochent, une distorsion entre les mots et les actes, les mots que nous tenons dans l’opposition et les actes que nous accompliss­ons au pouvoir. Au coeur de ma démarche, il y a une nouvelle appréhensi­on de l’exercice du pouvoir, pour mettre en conformité nos engagement­s et nos actes.

La présidence Macron ? Ceux qui avaient des illusions ont dû s’apercevoir qu’il n’était ni de gauche ni de gauche. Il mène une politique très injuste fiscalemen­t, qui n’est pas très efficace à mon sens économique­ment et qui est lourde de menaces socialemen­t. Je porte donc un regard très critique et j’espère que ce point de vue sera partagé au sein du PS. Car il y a eu chez nous une ambiguïté au début du quinquenna­t, qui a contribué à ternir un peu plus notre image.

J’ai avec LFI des différence­s de degré...”

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(Photos droits réservés) « J’essaie d’être cohérent, dans l’opposition comme au pouvoir. »
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Emmanuel Maurel, à gauche résolument.

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