Var-Matin (Fréjus / Saint-Raphaël)

Cette prof a du ciel bleu dans son passeport

Directrice d’école, Emmanuel Cocusse a connu différents univers qui ont forgé sa vision de l’éducation

- Textes : Nicolas PASCAL npascal@varmatin.com Photo : Philippe ARNASSAN

Je suis passée de l’amphi de la Sorbonne à la maternelle de Tourrettes ”

Enseigner aux tout-petits, aux jeunes adultes, aux Français, aux Costaricai­ns, aux Américains… Transmettr­e un savoir, peu importent les barrières : c’est le credo de l’actuelle directrice de l’école Monge Roustan, à Saint-Raphaël. Emmanuel Cocusse, qui enseigne également en CP, a réussi dans sa vie à concilier formation de la jeunesse et voyages… qui la forment, justement ! Comment en est-elle arrivée là ? Née à Juvisy (Essonne) de parents médecins, elle a vite développé le goût pour les études, passionnée par les langues étrangères et donc, inévitable­ment, par les voyages. « J’ai étudié khâgne au lycée Fénelon de Paris avant d’intégrer l’École normale supérieure en tant que germaniste, détaille-t-elle. Et chaque été j’apprenais les langues dans tous les pays d’Europe que je visitais. » Et tout cela à vélo, s’il vous plaît! Mais c’est la sociologie qui aura sa préférence : elle debvient professeur de sociologie et d’anthropolo­gie à La Sorbonne. Et ceci pendant quatre ans. Jusqu’à ce que son mari, qui travaille dans le sport de haut niveau, trouve une opportunit­é de carrière à Saint-Raphaël. « On est alors en 2001, à la naissance de mon deuxième enfant. Je me pose alors la question sur mon devenir profession­nel. Que faire ? » L’hésitation sera éphémère : Emmanuel Cocusse songe rapidement à passer (et réussir) le concours d’instituteu­r. «Un peu par

hasard », admet-elle au début. Mais cette voie va devenir une révélation.

«Je suis passée du grand amphi de la Sorbonne à la petite section de maternelle de Tourrettes, fait-elle remarquer avec sourire, sans malice. J’ai ensuite enseigné à Saint-Raphaël (Camail, les Plaines, Jean-Moulin…) » Des leçons à deux “publics” forcément bien différents… « Chez les jeunes adultes on n’est rien, juste une heure dans une journée, on ne va pas changer leur vision du monde. Juste susciter une curiosité intellectu­elle. En revanche, chez les tout jeunes, je pouvais agir sur le rapport à l’école, l’envie d’apprendre, c’est déterminan­t pour la suite. À cet âge-là tout leur plaît, si c’est bien présenté ! Je sentais que ça allait me plaire», se souvient-elle. Sa vie raphaëlois­e lui plaît alors fort bien… sauf que l’appel du voyage est plus fort. Celle qui a toujours aimé faire du vélo sur tous les continents envisage, avec son mari, une nouvelle aventure. « Mais avec les enfants, l’expédition serait compliquée… Alors on s’est dit, allons travailler à l’étranger ! » Histoire aussi « de faire connaître une nouvelle culture aux enfants » qui ont, à cette époque, entre 3 et 8 ans. C’est en 2010. La petite famille s’envole pour le Costa Rica, et le lycée français de la capitale, San Jose. «J’ai fait là-bas fonction de directrice de la section maternelle de ce lycée bilingue. Le contrait était de trois ans, on y a passé des moments formidable­s… » À l’issue de cette expérience enrichissa­nte, la famille reprend le chemin… dans un vieux

camion de pompiers, pendant un an, depuis le Panama, à travers tous les pays d’Amérique centrale et du Nord jusqu’au Canada.

« On s’est amusé à atteindre quelques sommets de chaque pays ! Puis, au cours de notre périple, un jour, mon mari tombe sur un article du

Time magazine concernant le “cerveau bilingue”, relatant d’expérience­s de classes publiques bilingues dans l’Utah. » Il n’en fallait pas plus pour qu’Emmanuelle Cocusse prenne la décision de candidater ! Elle obtient un poste d’institutri­ce en immersion bilingue anglais français. «Je partageais deux classes avec une Américaine. À la mi-journée, on se les échangeait, faisant la moitié du programme dans notre langue. Des gens venaient du monde entier pour voir cette expérience de bilinguism­e précoce. J’ai ensuite été formatrice. » Les vieilles idées sont battues en brèche : tout montre désormais qu’une langue supplément­aire pour un jeune enfant est un gros avantage, ne nuisant pas à son développem­ent comme on pouvait le penser par le passé. « Mes enfants parlent couramment français, anglais et espagnol. Sans accent », sourit celle qui, après trois ans aux États-Unis, est rentrée à Saint-Raphaël l’année dernière. À la fois directrice et institutri­ce pour une classe de CP, elle n’a pas vraiment le temps de repenser aux voyages, même si elle est heureuse d’être de retour. « Je dois être touche-à-tout, ce n’est pas simple ! Heureuseme­nt que la Ville me sauve en me laissant Mme Vezzaro, qui assure de nombreuses tâches. »Allons, dans cet emploi du temps de ministre, il y a bien encore la place pour quelques autres rêves d’ailleurs ?

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