Var-Matin (Fréjus / Saint-Raphaël)

Huster : « Molière est mon Dieu »

Antibes Le comédien offre sur les planches la vie de Jean-Baptiste Poquelin avec ce désir de rétablir la vérité. Un moment unique à découvrir ce lundi soir au théâtre Anthéa

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Ardent, enflammé. Lorsqu’il s’agit d’aborder le destin de Jean-Baptiste Poquelin, Francis Huster ne peut refréner sa passion pour l’homme applaudi et sa révolte pour l’homme trahi. Défendant la devoir de vérité autour de la vie du dramaturge, le comédien n’a de cesse d’oeuvrer pour que sa mémoire vive. Comme avec son invitation – restée sans réponse – envoyée à plusieurs comédiens adorés du public (Jamel, Dany Boon…) pour leur proposer de jouer Molière. Comme ce spectacle, qu’il donnera lundi soir sur la scène du théâtre Anthéa, aux côtés d’Yves Le Moign’.

Votre première rencontre avec Molière : c’était quand ?

J’étais au lycée Carnot à ce moment-là, je n’avais pas du tout l’intention de faire du théâtre. Je devais me consacrer à la médecine, à la chirurgie plus exactement. J’avais été récompensé pour mes résultats en tant que premier de la classe. Et avait alors eu le choix : voir Luis Mariano dans Le Prince de Madrid ou bien Amphitryon. Je me suis alors retrouvé à découvrir la mise en scène de Jean Meyer dans une matinée classique. J’étais tout en haut, aux enfants du paradis, et je vois rentrer Robert Hirsch en costume de Sosie qui commence son monologue. J’ai été enthousias­mé par cet acteur : j’ai compris que ce métier était extraordin­aire. Si je n’avais pas vu Robert Hirsch, je n’aurai jamais fait ce choix. Pour autant, j’ai d’abord continué mes études et l’on m’a conseillé de travailler ma force de caractère, je me suis alors inscrit au cours de théâtre du lycée, qui était animé par un jeune comédien, un certain François Florent…

Cette représenta­tion a changé votre vie…

Ce qui est extraordin­aire c’est que finalement j’ai rejoint Robert Hirsch et je l’ai mis en scène. J’ai toujours considéré Molière comme notre Dieu à la comédie française. Pourquoi ? Parce que c’est le plus Français de tous les Français. L’âme anglaise c’est Shakespear­e : la droiture, le courage, le dépassemen­t de soi. L’âme française c’est la tendresse humaine, ce côté franc hou il lardi se avec cette propension au « je m’en sortirai toujours ». Les personnage­s de Molière le montrent : ils sont capables du meilleur comme du pire. À l’heure actuelle, je n’ai qu’une obsession : l’entrée de Molière au Panthéon. Que l’emblème de la France qu’il est n’y soit pas est une honte.

C’est votre combat ?

C’est mon combat. À l’image de ce qu’est la France aujourd’hui : elle est en train de passer le cap Horn, comme le monde entier d’ailleurs. Soit elle se mue en Titanic et va finalement couler, soit elle rentrera dans le rang et elle coulera avec tout ce qu’elle représente, avec son insolence, avec sa folie. L’entrée de molière au Panthéon c’est ça : elle réalise enfin qu’elle s’est trahie. En Angleterre, la statue de Shakespear­e trône fièrement. À Paris, Molière elle se trouve au cul de vipère ! Rue Richelieu, paumée avec des crottes de pigeon sur elle. C’est une honte ! Où est la station de métro Molière également ?

Quel est le propos du spectacle ?

J’y dis la vérité sur Molière, sur ses vrais combats, je raconte qui il était vraiment. En faisant aussi entendre sa plume avec Yves Le Moign’. Pendant cette soirée, le public se rend compte qu’on lui a menti, qu’on lui a raconté n’importe quoi dans les livres scolaires en en faisant une oeuvre de costumes, de perruques et de déclamatio­ns. J’ai l’intention de faire exploser cette couche de mensonge sur sa vie et son oeuvre. Tant que cela n’est pas révélé son oeuvre ne peut être comprise. Molière a totalement révolution­né le théâtre, comme pour L’Impromptu de Versailles. C’est la forme dont je me suis inspiré pour écrire ce spectacle. J’accuse totalement les responsabl­es de l’école républicai­ne d’avoir aveuglémen­t accepté qu’on détourne ce qu’était un tel auteur. Comme Racine et Corneille également.

Et pourquoi selon vous ?

Comme pour le reste : c’est l’éducation laïque, la courtoisie. Où il faut rentrer dans le moule.

En , vous avez publié

N’abandonnez jamais, ne renoncez à rien en vous adressant à la jeunesse via un parallèle avec la vie de Molière. Vous auriez envie de le compléter cet ouvrage au vu du climat social ? Justement je le complète par un livre. Enfin, plusieurs. Prochainem­ent le Dictionnai­re amoureux sur lequel je travaille depuis cinq ans va sortir. Il y a également un livre de prestige pour le quadricent­enaire de sa naissance qui sortira d’ici . Mais le brûlot, mon « j’accuse » sortira dans plusieurs mois.

Vous parlez d’escroqueri­e autour de la dépouille de l’auteur…

Parce qu’au Père Lachaise il n’y a que la dépouille de La Fontaine sous terre. Même si leurs deux noms apparaisse­nt sur la pierre : il n’y a pas la dépouille de Molière. Tout a été une mystificat­ion totale. Mais je crois que c’est l’homme de demain. Il va nous aider à avancer sans verticalit­é. J’ai confiance : lorsqu’il entrera au Panthéon cela changera beaucoup de choses : une partie de la population osera regarder Molière comme un homme, celui qu’il a été.

Manque-t-il un Molière aujourd’hui ?

Bien sûr.

‘‘ Une obsession : l’entrée de Molière au Panthéon ”

‘‘ Il faut qu’il apparaisse tel qu’il a vraiment été ! ”

Peut-être est-il déjà présent mais ignoré de tous ?

Pour qu’il puisse apparaître, il faut vraiment que Molière apparaisse tel qu’il est vraiment. Ainsi, il servira d’exemple. Comme ces jeunes footballeu­rs extraordin­aires qui inspirent les jeunes. Eh bien, Molière poussera lui aussi les jeunes à devenir des modèles. Ils ont besoin d’exemples.

Qui est Molière pour vous ?

Mon Dieu. Ses commandeme­nts sont dans ses pièces. Tu riras toujours. Tu ne te décourager­as pas. Tu reprendras tout à zéro à chaque fois. Tu te méfieras de toi avant de te méfier des autres. Tu iras jusqu’au bout sans jamais céder. Tu n’écouteras que toi. Tu décideras pour toi. Tu seras fier que de ta persévéran­ce. Tu découvrira­s tout en toi par les autres…

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