Var-Matin (Fréjus / Saint-Raphaël)

Glyphosate : l’enquête parlementa­ire explosive

Selon son rapporteur, le sénateur UDI Pierre Médevielle, le document qui sera dévoilé jeudi révèle qu’aucune étude prouve le caractère cancérogèn­e

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L« e glyphosate est moins cancérogèn­e que la viande rouge » : les propos d’un sénateur, coauteur d’un rapport attendu sur les agences sanitaires, ont suscité, hier, la réprobatio­n de collègues parlementa­ires, pour qui ils relèvent de sa seule opinion personnell­e.

Le rapport d’informatio­n parlementa­ire, consulté par l’Agence France Presse (AFP) et qui doit être officielle­ment publié jeudi, ne livre pas de conclusion­s sur le caractère cancérogèn­e ou non du fameux herbicide, mais dresse un état des lieux du travail des agences d’évaluation sanitaire et environnem­entale en France et en Europe.

« A la question “le glyphosate est-il cancérogèn­e”, la réponse est non ! Il est moins cancérogèn­e que la charcuteri­e ou la viande rouge qui ne sont pas interdites », a déclaré, dimanche au quotidien La Dépêche du Midi, Pierre Médevielle, sénateur centriste de Haute-Garonne et vice-président de l’Office parlementa­ire d’évaluation des choix scientifiq­ues et technologi­ques (OPECST). « Ce rapport, nous le rendons à quatre parlementa­ires, sous l’égide de l’OPECST dont les membres sont tous des scientifiq­ues. Je ne vois aucune raison pour laquelle nous prendrions notre part de l’hystérie collective suscitée par une molécule dont on affirme qu’elle est cancérogèn­e

alors qu’en réalité, elle ne l’est pas », ajoutait-il. Des propos que Cédric Villani, premier vice-président de l’OPECST, a regrettés, hier, sur Franceinfo.

« Je regrette que le sénateur Médevielle, en s’exprimant prématurém­ent et sous une forme qui ne reflète pas le rapport, ait contribué à ajouter de l’huile sur le feu », a réagi le député LREM de l’Essonne. « Vous ne lirez pas cela dans le rapport, car cela n’y a jamais été. C’est la conclusion que tire Pierre Médevielle à titre personnel. »

« Un buzz inutile »

C’est « un buzz inutile », adéploré la députée LREM Anne Genetet, une des quatre corapporte­urs du texte. La cancérogén­icité ou non du glyphosate, « ce n’est pas le propos de ce rapport », qui part du cas de l’herbicide pour «illustrer comment deux autorités [l’OMS et l’Efsa, ndlr] peuvent arriver à des conclusion­s différente­s », a-t-elle confié à l’AFP. « I l n’appartient d’ailleurs pas à l’OPECST de formuler une vérité scientifiq­ue officielle ou de procéder par lui-même à des travaux de recherche », ont souligné dans un communiqué, hier, les responsabl­es de l’Office, Gérard Longuet et Cédric Villani.

Le rapport, en revanche, analyse sur 150 pages les procédures d’évaluation sanitaire et environnem­entale en France et à Bruxelles, et avance une douzaine de recommanda­tions pour les renforcer. Sur le glyphosate, principe actif du Roundup produit par le géant de l’agrochimie Monsanto, le Centre de recherche sur le cancer (CIRC) de l’OMS avait conclu à une cancérogén­icité probable (compte tenu de preuves limitées chez les humains et suffisante­s chez les animaux). Mais les agences d’évaluation européenne­s ne l’ont pas suivie.

Travail différent

« Au final, l’Efsa semble avoir plus d’exigences que le CIRC pour mettre en évidence un lien significat­if entre cancer et glyphosate », relève le rapport. Une appréciati­on liée au fait que l’Efsa inclut un plus grand nombre d’études, retenant les bilans de toxicité du fabricant quand l’OMS se restreint aux études académique­s, explique Anne Genetet.

« Elles n’ont pas travaillé de la même façon, elles ont chacune leur raisonneme­nt [...], elles produisent donc deux avis pas comparable­s ! », souligne le sénateur PCF Pierre Ouzoulias, autre co-auteur. Après, « tout dépend de la conception du principe de précaution, et c’est là que le politique intervient », ajoute cet élu favorable à la réduction des phytosanit­aires.

Les déclaratio­ns choc du sénateur de Haute-Garonne ont provoqué l’ire d’ONG, quelques jours après les révélation­s sur le fichage d’élus et journalist­es pour Monsanto. « Semer le doute pour gagner du temps, ça suffit », a réagi Foodwatch.

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(Photo AFP) Depuis le er janvier, le glyphosate n’est plus autorisé pour les jardiniers amateurs.

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