Var-Matin (Fréjus / Saint-Raphaël)

Le bonheur au labeur

- De THIERRY PRUDHON Reporter edito@nicematin.fr

Cela pourrait tenir dans une petite annonce : « Président soucieux de passer pour un grand démocrate invite les petits malins ayant une idée de génie pour faire partir tout le monde à la retraite à soixante ans, à taux plein, à lui écrire. Palais de l’Elysée, , rue du Faubourg Saint-Honoré,  Paris. » Faut quand même suivre… Depuis des décennies, tous nos gouvernant­s, de droite comme de gauche (avec quelques contorsion­s en sus), s’emploient à nous faire intégrer qu’il faudra bosser plus longtemps. Pas le choix, au regard de l’allongemen­t sensible de la durée de la vie.

Et voilà que le gouverneme­nt, par la grâce d’une année écoulée pourrie par les manifs, et alors qu’il a pourtant déjà son schéma bien en tête, veut nous refaire le coup du dialogue. « Etre à l’écoute. » Ces jours-ci, les ministres remontés comme des automates n’ont plus que cette antienne aux lèvres. Hier matin, Agnès Buzyn a ainsi embouché le clairon : la réforme des retraites fera l’objet d’une « concertati­on citoyenne », dont elle n’a toutefois pas dévoilé les détails. Tous ceux qui se sont sentis bernés par un Grand Débat dont les nobles envolées ont peu regonflé leur porte-monnaie en tremblent d’avance. Soyons juste néanmoins. A défaut de solutions miracles qui n’arriveront sans doute jamais, il faut mettre au crédit du gouverneme­nt de vouloir donner du temps au temps dans ce dossier, contrairem­ent à la façon dont il a remanié, à la va-vite, le code du travail ou l’assurance-chômage. Depuis le début des années quatre-vingt, pas loin d’une dizaine de réformes ou tentatives de réforme des retraites ont été amorcées, sans que le problème soit résolu. Il y a donc urgence à se poser, une bonne fois pour toutes, pour installer un système équitable apte à perdurer plusieurs décennies. Mais plus que sur l’âge de départ à la retraite, pour lequel la marge de manoeuvre apparaît quasi nulle, c’est en amont, sur l’organisati­on du travail, qu’il importe de se concentrer. Ce chantier-là est colossal. Et vierge. Dans une économie en perpétuell­e mutation, instable et imprévisib­le, qui ne laisse pas d’inquiéter les jeunes et leurs parents, tout reste à inventer. Y compris les conditions d’un hypothétiq­ue bonheur au labeur. Les salles de gym ou les massages dans les entreprise­s ne sont jusqu’ici que d’aimables dérivatifs. Pour faire passer la pilule des retraites à retardemen­t, il s’agit désormais de penser, autant que la compétitio­n le permettra, des parcours individual­isés, une autonomie accrue des salariés, des journées et des carrières à la carte. Vaste sujet, complexe, exaltant. A cette aune, la consultati­on de tous pourrait se révéler utile. Et, pourquoi pas, féconde.

« Il s’agit de penser des parcours individual­isés, des journées et des carrières à la carte. »

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