Var-Matin (Fréjus / Saint-Raphaël)

Jacques Chirac le « Varois » de l’été  à l’automne 

De l’« exil » durant la Seconde Guerre mondiale au Rayol-Canadel à la période tropézienn­e chez son ami François Pinault, l’ancien Président a marqué le coeur des Varois. Confidence­s

- LAURENT AMALRIC lamalric@nicematin.fr

Enfant à l’école communale du Rayol-Canadel, dans les années 40, le petit Jacques s’amusait à sectionner les fils noirs de communicat­ion de l’occupant allemand qui couraient dans les champs. Ce jeudi, c’est le fil de son existence qui s’est coupé, occasionna­nt une grande vague de tristesse le long de rivages varois qu’il fréquenta si longtemps.

Car depuis ce jour de l’été 1940 où il descend avec ses parents dans le sud pour se réfugier durant les cinq années de guerre, aux années 2000 à Saint-Tropez chez son ami François Pinault, en passant par la période présidenti­elle au fort de Brégançon, les épisodes varois jalonnent la vie de Jacques Chirac. Un Chirac intime que nous livraient, le temps d’une table ronde au Lavandou, plusieurs de ceux qui l’ont côtoyé à différente­s époques de son existence.

Il était alors bien difficile de canaliser une parole aussi enthousias­te que bienveilla­nte à l’égard de celui que Gilou Zunino appellait « Jacky ». « Que voulez-vous, il était à l’école avec moi au Rayol et, en plus, j’étais son aînée, alors on n’a jamais cessé de se tutoyer», se flattet-elle. À ses côtés, sa soeur borméenne Marie-Thérèse déballait une poche gonflée de courriers et autres cartes de voeux manuscrite­s. « Après toutes ces années, nous avons toujours gardé contact. Il faut dire que notre frère Darius était son meilleur copain d’enfance. Oui oui, le fameux gamin cité dans les biographie­s avec qui il a fait les quatre cents coups ! », s’esclaffent les deux soeurs.

Bouillabai­sse et choucroute

Le même Darius qui, des années plus tard, officiait pour André Delmonte, le chef du « Maurin-desMaures », qui régala les convives de Brégançon de sa réputée bouillabai­sse... «Un jour d’août 1995, un monsieur me téléphone. Il se présente comme l’intendant de la présidence. Sa requête : une bouillabai­sse pour le président de la République. Moi, je crois à une blague, et ne donne pas suite. Mais il insiste... Je doutais jusqu’à ce que, éberlué, je franchisse les grilles de Brégançon ! Par la suite, les commandes seront ponctuelle­s», s’amuse encore Dédé Delmonte. De Villepin, l’ami François Pinault et encore beaucoup d’autres dégusteron­t sa fameuse « bouille ».

Menu tout autre pour l’ex-curé de Bormes Didier Hascoët, qui a eu le privilège de partager deux fois la table présidenti­elle au fort. « J’ai commandé une choucroute, m’annonce le Président. J’ai d’abord cru à une farce. Nous étions en plein été et le mercure affichait 31°C à l’ombre... Mais non ! Nous sommes restés trois heures et demie à table. Je n’ai jamais autant mangé... À tel point que j’ai dû faire une sieste l’après-midi avant de dire la messe ! », se souvient le père Hascoët, désormais aumônier à l’hôpital Léon-Bérard de Hyères. Durant son « sextennat » entre Bormes et Le Lavandou, Didier Hascoët, dont la bonne humeur n’est plus à vanter, osa une fin de messe digne des Guignols de l’info... « Je l’ai tout bonnement imité. Après coup, je me suis dit que j’étais gonflé, mais le Président, avec les gestes amples qu’on lui connaît, m’a répondu : ‘‘Non, non, vous avez bien fait !’’ »

« Comme un enfant »

Une proximité et une simplicité dont il a toujours témoigné envers les Varois. « Lors d’une messe, je lui ai offert une photo de classe de lui au Rayol. Il était comme un enfant. ‘‘J’ai tenté de retrouver tous les noms, c’était comme un jeu’’, m’avait-il dit. Bernadette, elle, avait tout de suite reconnu son mari en me glissant : ‘‘Il avait déjà l’oeil volontaire’’ », témoigne la Borméenne Francine Brochot, alors journalist­e proche du couple présidenti­el. « Il avait la poignée de main facile. Il restera l’un des Présidents les plus abordables. Je garde de lui le souvenir d’un être jovial et proche des gens !», déclarait-elle hier au sujet de celui qui baptisa ses mémoires Chaque pas doit être un but. Dieu sait que dans le Var, l’empreinte est profonde.

 ?? (Photo Francine Brochot) ?? Après celui offert par l’équipe de France victorieus­e en , l’équipe de football de Bormes lui remettra un maillot floqué à son nom frappé du numéro  à l’occasion du corso, en février .
(Photo Francine Brochot) Après celui offert par l’équipe de France victorieus­e en , l’équipe de football de Bormes lui remettra un maillot floqué à son nom frappé du numéro  à l’occasion du corso, en février .

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