Var-Matin (Fréjus / Saint-Raphaël)

« Nous avons besoin de renouveler notre pensée »

Sous la présidence d’Hervé Morin, Les Centristes planchent à Nice sur les nouvelles questions sociétales majeures, tout en restant résolument ancrés politiquem­ent auprès des Républicai­ns UDI : « Des alliés, pas des supplétifs de LR »

- THIERRY PRUDHON 1985.

L’évolution vertigineu­se de la société oblige tous les partis à refonder leur réflexion, y compris et surtout à droite. L’université de rentrée des Centristes, ce week-end à Nice, est une loupe des nouvelles problémati­ques sur lesquelles chacun s’astreint désormais à cogiter. Les cadres du parti planchent ainsi sur trois thèmes majeurs : la réforme des retraites et la dépendance ; la bioéthique et la PMA pour toutes ; un nouveau modèle de croissance plus écologique. « Nous avons besoin de renouveler notre pensée politique, de sortir de nos réflexes sur l’immigratio­n, les déficits ou la sécurité, pour aborder des sujets que nous n’évoquions jusqu’ici qu’à la marge. L’environnem­ent, par exemple, n’est pas un sujet réservé à la gauche » ,a plaidé le patron des Centristes Hervé Morin, par ailleurs président de la Normandie et de Régions de France. Autant d’orientatio­ns nouvelles et obligées qu’il inscrit dans un credo : «Ilfaut repartir des territoire­s, de leur savoir-faire, pour bâtir les politiques. La réussite passera par là. On ne peut pas continuer à être le seul pays d’Europe à croire que le quotidien des habitants se règle depuis les ministères. »

« Rassembler »

Le maire LR de Nice Christian Estrosi, tout comme le président LR de la Région Sud, Renaud Muselier, sont En cette semaine marquée par la mort de Jacques Chirac, « mon » Président et mon ami, je lui dédie

() cette chronique. Cet hommage, j’en suis persuadée, sera partagé, par ceux, nombreux dans la belle région azuréenne, qui ont partagé ses combats mais aussi par ceux, tout aussi nombreux, qui, au-delà d’opposition­s légitimes, ont salué l’homme de coeur qui a su se faire aimer des Français.

P… mais qu’est-ce qu’elle me veut cette gamine avec ses nattes ? Mes c… sur un plateau ? Ça ne lui suffit pas mon magnifique discours de Johannesbu­rg, « Notre maison brûle et nous regardons ailleurs » ?

Hé non, Jacques, le jalon posé était visionnair­e mais il faut maintenant passer la vitesse supérieure. Certes, la physionomi­e à la fois butée et exaltée de Greta Thunberg, ses propos menaçants et culpabilis­ants ont choqué et suscité un sentiment venus conforter cette vision, dont ils sont eux-mêmes les apôtres. L’un et l’autre ont mis en exergue les actions concrètes lancées, sur le terrain, pour répondre à l’urgence écologique, du tram niçois aux cent mesures de la « Cop d’avance » de la Région. « L’Etat doit être davantage à l’écoute et oeuvrer en partenaria­t avec les territoire­s » ,a insisté Christian Estrosi. A six mois des municipale­s, ce rendez-vous niçois est d’injustice et de doute. Soyons clairs : la question n’est plus de convaincre les politiques mais les citoyens. Faire le tri de ses déchets, manger bio ou vegan, acheter une voiture électrique, ne pas prendre l’avion, vivre dans une yourte avec des toilettes sèches, tout cela est un crachat dans l’océan Pacifique de l’exigence écologique. Il faut tout bouger, accepter des limitation­s importante­s de nos libertés et des changement­s drastiques de nos modes de vie. Aucune politique systémique ne pourra se faire à l’échelle des États-nations, qui devront accepter des transferts massifs de souveraine­té. Or que voyons-nous ? Partout les peuples se recroquevi­llent sur eux-mêmes et les partis nationalis­tes engrangent les succès électoraux. Boris Johnson sort de l’Europe pour faire de son pays une plateforme dérégulée, Donald Trump renie l’accord de Paris et ses bien modestes exigences environnem­entales, Jaïr Bolsonaro laisse brûler la forêt aussi politique. L’occasion pour Les Centristes – qui sont sortis de l’UDI fin 2017, Hervé Morin n’étant plus en phase avec la ligne plus « autonomist­e » de son président Jean-Christophe Lagarde – de réaffirmer leur ferme ancrage à droite : « Nous sommes face à une exigence, celle d’être capables d’incarner demain une alternance. Et pour cela, il faut rassembler tout le monde, dans la diversité. Je

amazonienn­e et partout la crispation identitair­e est à l’oeuvre. Il faut comprendre la douleur des nations et des peuples qui se sont construits au cours des siècles et comprendre que le souveraini­sme soit ontologiqu­ement incompatib­le avec la lutte contre le réchauffem­ent climatique et la sauvegarde de la biodiversi­té. Il faut que les politiques arrêtent de mentir et que les citoyens arrêtent de se mentir.

C’était autre chose, de mon temps, les grandes manifestat­ions syndicales ! Tu te souviens en  quand j’étais à la manoeuvre pour les accords de Grenelle ? J’ai négocié en cachette, pistolet à la ceinture avec Krasucki ! Et en  ?

Les syndicats avaient mis  millions de personnes dans les rues contre ma réforme des retraites…

C’est vrai, Jacques, et l’on ne peut que constater le dépérissem­ent de l’action syndicale. Aujourd’hui la CGT se contente – selon les comptes d’un collectif de médias indépendan­t – de jeter   personnes sur le pavé de Paris Le Cannois Gilles Cima est le président azuréen de l’UDI. Il avait prévu de se rendre, «enami» , à l’université de rentrée des Centristes. Il n’y est pas venu. Il a, en effet, peu goûté l’interview d’Hervé Morin dans nos éditions de vendredi. « L’UDI n’existe plus, je n’ai pas besoin de m’en distinguer. Moi, je ne suis pas dans une démarche solitaire, contrairem­ent à Jean-Christophe Lagarde. Je suis dans une démarche de constructi­on d’une alternativ­e avec mes amis LR. On n’est pas sur le même schéma », y déclarait le président des Centristes. Réplique de Gilles Cima : « L’UDI existe bel et bien, davantage en tout cas que Les Centristes. Nous avons des élus dans toute la France et soixante parlementa­ires, quand M. Morin n’en compte qu’une douzaine. Pour notre part, nous sommes des alliés des Républicai­ns, mais pas des supplétifs. Nous avons eu le courage de bâtir un projet et de mener une liste aux européenne­s. M. Morin n’est animé que par une rancoeur viscérale à l’égard de Jean-Christophe Lagarde. »

crois à un grand mouvement central, favorable à l’économie de marché dans un corps social modernisé » , a posé l’ancien ministre de la Défense. Renaud Muselier, en écho, a appelé à « l’ouverture et au consensus ». « Gaullistes et centristes ont appris à unir leurs forces, a abondé Christian Estrosi.

contre la réforme des retraites. Mais ce dépérissem­ent des corps intermédia­ires est un danger mortel pour la démocratie, et tu l’avais anticipé quand tu avais mis ta campagne de  sous le signe de la fracture sociale. Le concept avait été construit par Marcel Gauchet (), et ses phrases résonnent de façon prémonitoi­re :

« Un mur s’est dressé entre les élites et les population­s, entre une France officielle, avouable, qui se pique de ses nobles sentiments et un pays des marges, renvoyé dans l’ignoble, qui puise dans le déni opposé à ses difficulté­s d’existence l’aliment de sa rancoeur. » Un quart de siècle après, les « gilets jaunes » ont confirmé de façon tragique ton diagnostic.

Dis donc, c’est beau mais c’est loin ! Quand je vois ces milliers de Français qui ont attendu plusieurs heures pour m’écrire un petit mot sur les registres de l’Élysée, je repense à tous ces meetings, ces voyages, ces discours, ces banquets, ces embrassade­s, ces poignées de main qui ont construit quarante années de compagnonn­age avec

Nous devons construire l’avenir, non en nous épurant mais en faisant des additions. » D’ores et déjà, Hervé Morin a évidemment apporté son soutien à Christian Estrosi, dont l’un des principaux adjoints est l’ancien député centriste Rudy Salles, pour l’élection municipale de 2020.

les Français. Pour arriver à l’Élysée, il faut dire qu’ils m’en ont fait voir… deux défaites à l’élection présidenti­elle, les journalist­es qui me traitaient de nul ou de graine de dictateur, et les trahisons de ceux qui se prétendaie­nt mes amis. Il faut certes mépriser les hauts et repriser les bas, disait ma grand-mère, mais quand je vois ceux qui m’ont trahi dire du bien de moi sur les plateaux télé et les éditoriali­stes qui m’ont méprisé me tresser des couronnes, j’en rigole mais finalement, ça m’en touche une sans faire bouger l’autre. Heureuseme­nt, vous êtes là, Françaises, Français, et vous me dites que le lien que nous avons tissé est une parcelle brillante de notre histoire. Je peux partir en paix.

Dans ce pays habité par un désir violent d’égalité, porter sur le pavois un des siens n’est acceptable que si celui qui en est le bénéficiai­re l’a payé du prix du sang et des larmes. Jacques, ce sont tes souffrance­s, tes échecs, toi à qui tout semblait promis, qui t’ont rendu proche de nous. Tu resteras un des nôtre avec tes qualités et surtout avec tes manquement­s. Tellement français.

1. [Ndlr] Roselyne Bachelot fut la porte-parole de Jacques Chirac lors de la campagne pour son second mandat en 2002, puis devint ministre pour la première fois de 2002 à 2004.

2. Le Désenchant­ement du monde,

Lundi

Mardi

« Jacques, ce sont tes souffrance, tes échecs, toi à qui tout semblait promis, qui t’ont rendu proche de nous. »

Vendredi

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(Photo Th. P.) Rudy Salles, Christian Estrosi, Hervé Morin, Renaud Muselier et Christian Kert, hier à l’université de rentrée des Centristes à Nice.

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