Var-Matin (Fréjus / Saint-Raphaël)
Plongée dans les coulisses d’une opération « pigeons »
Pour limiter au maximum la prolifération des volatiles, Antibes mène, jusqu’à la fin de l’année, une campagne de stérilisation. Un enjeu sanitaire pour les oiseaux comme l’Homme
Au détour d’une ruelle, flânant sur les places, posés sur votre étendoir, nichés sur un rebord de fenêtre… Difficile de passer une journée sans les croiser. En ville, les pigeons sont un peu les rois du macadam. Des « habitants » pas toujours les bienvenus, surtout quand ils deviennent un peu trop envahissants. À Antibes, on estime le nombre de volatiles « entre 3 000 et 4 000 même si un recensement exact est impossible », reconnaît Christophe Lombart, responsable du service d’hygiène de la Ville. Pour éviter que la famille ne s’agrandisse trop, la municipalité mène depuis une quinzaine d’années des campagnes automnales de stérilisation. « La présence des pigeons en trop grand nombre génère des problèmes sanitaires. Les fientes, surtout en cas de grande concentration, peuvent transmettre à l’humain des maladies gastriques, de peau ou des gênes respiratoires si elles sèchent et sont inhalées sous forme de poussières », détaille
la municipalité.
« Notre mission n’est pas du tout de les tuer ! »
Chaque année, 8 500 € sont consacrés à ces interventions. Une paille dans le marché passé avec une entreprise spécialisée pour «la gestion des animaux en milieu urbain » et dont l’enveloppe annuelle s’élève à 90 000 €.
Mais sur le terrain, la mission, qui se déroule entre septembre et décembre, est de haut vol… Étape n° 1 : la capture. « Dans le centreville, elle se passe sur les toits souvent à proximité de squares ou de points de nourrissage car on sait que les pigeons y ont leurs habitudes. Des cages, avec du grain et de l’eau en guise d’appât, y sont disposées et régulièrement relevées », détaille Christophe Lombart. À Juan-les-Pins, en manque de toits plats, l’opération se fait au sol, à l’aide de graines, de filets… et sous le regard des curieux de tout poil. « Il y en a deux types : ceux qui aimeraient qu’on les fasse tous disparaître et les personnes scandalisées », glisse Christophe Lombart.
« Il arrive souvent qu’on se fasse insulter : ça va du assassin ! à des mots bien moins agréables encore… Mais contrairement à ce que les gens pensent, notre mission n’est pas du tout de tuer les pigeons », confie Thomas Miceli, l’un des huit techniciens spécialisés intervenant à Antibes.
Au moins 600 pigeons recensés chaque année
Une fois capturés, direction le Gard pour les oiseaux antibois, où le Dr Cindy Biache, rare vétérinaire spécialiste de ce type d’intervention en France, les opère. «Les oiseaux sont ensuite mis en cage de réveil dans un espace chauffé pour éviter l’hypothermie. Graines, eau, antibiotiques et vitamines sont mis à leur disposition », détaille-t-elle. Environ 2 % des volatiles, trop fragiles, ne reviendront pas du voyage.
Pour le gros des troupes, retour à la cité des Remparts où deux à trois lâchers mensuels sont organisés.
Avec vue mer, s’il vous plaît. Ce 28 novembre, c’est depuis la plage jouxtant le Fort Carré que 200 volatiles ont repris, un peu sonnés,
leur liberté ; une bague verte en plus à la patte. « Chaque année, sa couleur change pour permettre un recensement fiable de la population. Une campagne automnale permet d’identifier au moins 600 pigeons. Leur espérance de vie est de4à5ans» , précise Christophe Lombart.
À Antibes, les passants attentifs sauront ainsi qu’en croisant un gris columbidé bagué de blanc, ils ont là à faire à l’un des doyens de la cité, recensé en… 2016.