Var-Matin (Fréjus / Saint-Raphaël)
Le bras de fer
Ne pas reculer. Ou plus exactement, ne pas trop reculer. Tel est, après le mouvement de jeudi dernier, avant celui qui s’annonce demain, l’équation à résoudre pour le gouvernement et le Président dans cette semaine décisive. Rester droit dans ses bottes serait absurde, et d’ailleurs quelles bottes, puisqu’Edouard Philippe n’a pas encore rendu publiques les principales dispositions du texte de la réforme. Mais abandonner la lutte en rase campagne, plier bagage et renoncer à toutes ses ambitions serait pire, si c’est possible, pour l’image d’Emmanuel Macron, pour tout ce qu’il voulait, tout ce qu’il veut encore incarner : le progrès dans la réforme, et, plus largement, la modernisation de la France. Il perdrait alors de tous côtés : la droite lui reprocherait d’être un réformateur en peau de lapin, la gauche se réjouirait de son échec, la CGT exulterait. Et, dans la dernière moitié de son quinquennat, le Président en serait réduit à expédier les affaires courantes, ce qui n’est pas dans son tempérament. Reste à transiger. Sur quoi ? Soutenu, et même, dit-on, encouragé par le chef de l’Etat, Edouard Philippe l’a précisé : pas question de le faire sur l’essentiel. C’est-àdire à la retraite par points et à la disparition programmée des régimes spéciaux. Mais il lui reste de la marge. Il pourrait différer la date de mise en application du nouveau système, donc ralentir le mouvement pour le rendre moins brutal. Il pourrait renvoyer à plus tard, – et notamment à un organisme paritaire syndicats-patrons – l’équilibre financier du système, dont le déficit prévu sera intenable en . Il pourrait surtout, pour des catégories bien précises comme les enseignants, annoncer des mesures de revalorisation salariale. Il lui faut surtout se donner du temps pour démontrer que la réforme, si elle réduit les régimes spéciaux, n’a pas pour conséquence de réduire toutes les pensions. Regagner donc la bataille de l’opinion publique. Seulement voilà : le leader de la CGT, Philippe Martinez, requinqué après le succès de la manifestation du décembre, a été clair dimanche : ce qu’il veut, lui, c’est le retrait pur et simple du projet de réforme gouvernemental. Donc la reculade. Cela s’appelle un bras de fer, avec menace de paralysie renouvelée des transports. Qui gagnera ? La semaine sera longue.
« Il pourrait surtout, pour des catégories bien précises comme les enseignants, annoncer des mesures de revalorisation salariale.»