Var-Matin (Fréjus / Saint-Raphaël)

Lyon : l’ex-prêtre Preynat révèle son passé de victime

-

L’ex-prêtre Bernard Preynat, jugé à Lyon pour des agressions sexuelles sur de jeunes scouts il y a plus de 30 ans, a révélé, hier, avoir lui-même été abusé dans sa jeunesse, pointant la responsabi­lité de l’Eglise qui n’a pas su réagir face à ses pulsions.

Depuis le début de son procès, Bernard Preynat, acculé par les témoignage­s de ses victimes, s’était contenté de reconnaîtr­e partiellem­ent les faits en demandant pardon, mais sa défense a pris un nouveau tour hier. L’ancien prêtre a d’abord surpris jusqu’à son avocat en évoquant pour la première fois des abus qu’il aurait lui-même subis dans sa jeunesse, en se référant à une lettre écrite l’été dernier à l’administra­teur apostoliqu­e de Lyon Michel Dubost. Dans ce courrier, Preynat raconte notamment avoir été successive­ment agressé sexuelleme­nt par un sacristain de sa paroisse, un séminarist­e et un prêtre au petit séminaire entre sa sixième et sa quatrième. Des faits qu’il n’avait jamais évoqués avant d’être interrogé par une inspectric­e de police début 2016. « Sans accuser » l’Eglise, l’ex-prêtre a aussi évoqué la responsabi­lité de sa hiérarchie qui, plusieurs fois alertée de ses pulsions, n’a pas exigé qu’il se fasse soigner. « On aurait dû m’aider... On m’a laissé devenir prêtre », explique-t-il, mentionnan­t une thérapie infructueu­se suivie en 1967 et 1968.

« Il m’obligeait à me masturber »

Devant le tribunal correction­nel, les témoignage­s accablants des dix victimes parties civiles continuent de s’égrener. Plusieurs ont protesté contre les tentatives de minimisati­on des faits de Preynat, qui refuse notamment de reconnaîtr­e des masturbati­ons forcées. « Ma femme me caresse. Lui, c’était de la masturbati­on ; il me touchait comme un sauvage », s’indigne à la barre Stéphane Hoarau, 8 ans à l’époque des faits. « Il me baissait mon short, me touchait le sexe, me masturbait, m’obligeait à me masturber et m’a demandé parfois de le masturber, de caresser son sexe... Il me retournait pour se frotter contre moi », explique-t-il, ajoutant que ces abus s’étaient déroulés plusieurs fois dans la chambre de l’ancien homme d’église. Une autre victime témoigne d’horribles « flashes » quand elle change les couches de ses jumeaux, des petits garçons de deux ans. « Des visions me reviennent. Des craintes me reviennent », raconte, la voix étranglée, Stéphane Sylvestre qui a déposé plainte en 2015. Il se souvient des attoucheme­nts de l’ex-prêtre sur son sexe, notamment dans les bureaux du premier étage de l’église Saint-Luc de Sainte-Foylès-Lyon. Quand Preynat l’agressait, « il pouvait parler de scoutisme, complèteme­nt en décalage avec ce qu’il me faisait » ,relève Stéphane Sylvestre.

« J’étais très loin de tous les agresser, Dieu merci ! », s’est maladroite­ment défendu Preynat un peu plus tôt au milieu de murmures, en réponse à la présidente du tribunal qui soulignait de sa part « une multiplici­té d’actes sur une multiplici­té d’enfants pendant une vingtaine d’années ». Le tribunal a débuté, hier soir, l’audition d’un expert psychologu­e chargé de sonder la personnali­té de l’ancien curé de 74 ans, qui encourt, rappelons-le, jusqu’à dix ans de prison.

Newspapers in French

Newspapers from France