Var-Matin (Fréjus / Saint-Raphaël)
Le chantier éolien menacé de suspension
Déjà objet d’une condamnation en février au tribunal administratif, le chantier éolien, qui se poursuit à grande vitesse, fait l’objet d’un recours en référé. Les opposants ne désarment pas
I« ls s’activent le plus possible, le chantier avance à grande vitesse, ils travaillent même la nuit ! » Alain Bruguier, président d’honneur de la fédération nationale « Vent de colère », observe de près ce qu’il estime être « un véritable passage en force de la part du promoteur »…
Alain Bruguier évoque ici une décision judiciaire, rendue il y a quelques semaines par le tribunal administratif de Toulon (1), après une action intentée notamment par les associations « Défense du cadre de vie SainteVictoire, Plaine d’Ollières, Sources d’Argens » (Decavi) et la SPPEF (« Société pour la protection des paysages et de l’esthétique de la France ») - Sites & monuments. « Les récépissés de déclaration d’antériorité ont été annulés par le tribunal », explique-t-il. À ses
(1) yeux, cette décision « suspend les permis de construire, puisqu’une autorisation environnementale est manquante. Ce ne sera pas évident, quand on connaît l’intérêt faunistique du secteur, notamment une zone de nidification de l’aigle de Bonelli, protégé au niveau européen… Mais l’opérateur joue sur les mots en estimant que la décision suspend l’exploitation du parc, et non sa construction. » En outre, l’entreprise Provencialis, promoteur du projet, a fait appel de la décision du tribunal administratif.
Dès lors, la « SPPEF - Sites & monuments » et « Vent de Colère » ont souhaité poursuivre l’action. « Les différentes administrations concernées, saisies, n’ayant pas souhaité réagir, l’association s’est tournée, le 7 mai 2020, vers le juge des référés », indique la SPPEF. « Il s’agit de faire interrompre le montage des premières éoliennes en l’attente de l’obtention par le promoteur de l’autorisation environnementale. » Espérée en fin de semaine dernière, la décision se fait encore attendre.
Un dossier très emblématique
Tout ce que la France compte de militants anti-éoliens observe de près la situation du parc d’Artigues-Ollières. « Si le promoteur était condamné in fine à démanteler le parc, je pense que cela constituerait une première », observe le président d’honneur de « Vent de colère ».
Un fait inédit qui ne serait pas sans conséquences… « Si un tel cas survenait, il est probable que la filiale créée pour le parc dépose le bilan… Ces entreprises ne sont jamais propriétaires du foncier, elles fonctionnent avec un bail emphytéotique. Cela signifie que le démantèlement complet sera alors à la charge du propriétaire. » Si une provision de 50 000 euros par éolienne est prévue en vue du démontage, « selon nos devis, le démantèlement complet d’une éolienne est plus proche de… 900 000 euros. »
Mais les enjeux sont à double tranchant : « En revanche, si la construction de ces éoliennes de 125 mètres – deux fois la hauteur des tours de Notre-Dame de Paris – était finalement validée, en covisibilité directe avec la Sainte-Victoire ou la basilique de Saint-Maximin, cela pourrait ouvrir un précédent, une brèche autorisant la création d’autres parcs, en Provence comme ailleurs. J’ai déjà combattu des parcs en covisibilité avec le Pont du Gard, les promoteurs ne reculent devant rien… »
Si la décision en référé doit être connue rapidement, il est probable que celle-ci ne constitue finalement qu’un épisode de plus dans ce long feuilleton, commencé il y a déjà quinze ans.
1. Décision n°180022 de la 4e chambre du tribunal administratif de Toulon, audience du 27 janvier 2020, lue en audience publique le 10 février 2020.
Contactée, l’entreprise Provencialis n’a pas souhaité apporter de commentaires sur une affaire judiciaire en cours.