Var-Matin (Fréjus / Saint-Raphaël)
Après un AVC, elle renaît grâce à l’art P 6
Victime d’un accident vasculaire après la naissance de son fils, Allisson Colin s’exprime désormais du bout des doigt. Une nouvelle passion qui la libère de son handicap moteur
Des couleurs. Partout. Sur sa toile, sur sa robe et dans son coeur. Allisson Colin ne passe pas inaperçue. Son rire contagieux, encore moins. Penchée sur cette table immense de l’Atelier d’Emma Picq, la jeune femme de 33 ans déverse des émotions qu’elle peine à exprimer par la parole. À 27 ans, l’ancienne coiffeuse donne naissance à Sasha. Trois jours plus tard, elle est frappée par un AVC. Allisson ne sait plus écrire, ni marcher. Elle communique par bribes de mots. Son compagnon la quitte et essaye – en vain – d’obtenir la garde exclusive de leur fils. Trois ans plus tard, elle passe devant l’Atelier d’Emma et décide de sauter le pas. Désormais, elle se réapproprie sa vie. « Fière » d’y parvenir.
Sa soeur jumelle, Laura, l’accompagne au quotidien. « Heureusement qu’elle a trouvé ce cours, confie la jeune femme. Allisson vit un vrai changement. Elle parle de mieux en mieux, s’applique beaucoup. Surtout, elle est apaisée.»
Lien social et vital
Revenue au domicile parental, l’artiste n’a que très peu d’autonomie... sauf devant sa toile. Aujourd’hui, la séance est consacrée au portrait de son fils. « Elle l’a commencé seule chez elle, indique Emma Picq. Elle passe son temps à créer et progresse très vite. Elle retrouve sa délicatesse.»
Au delà de la créativité, cette heure hebdomadaire est bel et bien un travail sur sa motricité. « Elle prend du plaisir tout en poursuivant sa rééducation », ajoute la professeure. Un bras le long du corps, une stabilité approximative, mais le regard fixé sur les traits du visage du jeune garçon.
Le plus délicat, c’est le détail. Tenir le crayon sans trop de force, laisser glisser la pointe. Ne pas trembler. C’est un effort incroyable que la jeune femme s’impose à elle-même. Allisson n’est pas la première élève handicapée moteur à passer les portes de cet atelier. Emma a une classe consacrée aux victimes d’AVC ou autres accidents de vie. « C’est un cours particulier seulement à cause du Covid-19, précise-t-elle. En temps normal, ils sont en groupe. C’est un moment qu’ils partagent loin des médecins et de leurs proches... Il n’est rien qu’à eux. »