Var-Matin (Fréjus / Saint-Raphaël)
Franjou raconte son Festival de Ramatuelle
Il y a 35 ans, Jacqueline Franjou créait, avec Jean-Claude Brialy, cet événement estival. Elle en dévoile les coulisses dans son dernier livre qu’elle dédicace demain à la librairie Papiers Collés
Le festival de Ramatuelle a désormais son livre d’histoire. Sous la forme d’un album souvenirs illustré de photos inédites des artistes qui s’y sont produits et en ont fait la réputation, Jacqueline Franjou revient sur ces années bonheur avec un enthousiasme jamais avare d’anecdotes et de révélations (1). Le lecteur apprend ainsi comment tout a commencé. « Je portais en moi un projet ambitieux : fonder un festival d’écrivains de la presqu’île... Alors que j’allais me lancer dans cette aventure, le hasard voulut que je reçoive le fameux appel téléphonique de JeanClaude Brialy », raconte celle qui était à l’époque conseillère municipale de Ramatuelle.
De la folie
C’est à ce titre d’ailleurs que l’acteur la contacte car il cherche à acheter une maison dans le coin. La conversation s’engage. Elle : « Vous savez que Gérard Philipe est enterré à Ramatuelle dans son costume du Cid ? Ce serait une bonne idée de créer un festival de théâtre à sa mémoire ! ».
Lui : « Vous avez un théâtre ? » – « Non. » – « Vous avez de l’argent ? » – « Non. » – « Vous n’avez pas de théâtre, pas d’argent et vous voulez créer un festival ? Mais vous êtes folle...».
Déterminée plus précisément. Un an après, le 4 juillet 1985, «lepremier coup de pioche fut donné », pour faire surgir « en 27 jours et 27 nuits, ce théâtre de verdure dessiné par l’architecte Serge Mège . Et le 3 août, « Jean-Claude Brialy, déclara le premier festival de Ramatuelle ouvert ». Il en sera le directeur artistique jusqu’en 2007, avant que la maladie ne l’emporte.
Pas de regrets
Pour l’anecdote, c’est Marie-Paule Belle qui était invitée ce soir-là à essuyer les plâtres de ce « théâtre sous les étoiles », qui, pendant 35 ans, verra défiler une constellation de noms prestigieux : Barbara,
Jonasz, Sardou, Aznavour, Lucchini, Girardot, Arditi, Maillan, Bedos, Devos... Manquent à l’appel et à jamais, Léo Ferré, Coluche ou bien encore Jeanne Moreau. Jacqueline Franjou aurait bien voulu les voir à l’affiche de son festival mais « cela n’a pas pu se faire pour différentes raisons. Je ne dirais pas que ce sont des regrets, plutôt des rêves qui n’ont pas pu se réaliser ».
À coup sûr, ces artistes auraient reçu eux aussi une avalanche de ces coussins rouges destinés au départ à amortir la dureté des gradins, avant que les spectateurs ne les lancent sur la scène au final pour signifier à l’artiste concerné, leur grande satisfaction.
« Nous n’avons jamais su qui fut le premier à improviser ce geste », écrit Jacqueline Franjou en évoquant ce qui deviendra une habitude baptisée « coussinomètre » par son équipe. Car « plus le public est heureux, plus le nombre de coussins envoyés est important » .Le souffleur du spectacle de Michel Galabru en fera les frais. « Il avait complètement disparu sous une avalanche de coussins », en sourit celle pour qui « le monde s’est arrêté de tourner » quand elle a appris le décès de Jean-Claude Brialy avec qui elle avait « fait l’amitié comme d’autres font l’amour... le premier jour ».
La présidente du Festival sera d’ailleurs à deux doigts de «ne pas poursuivre l’aventure sans lui » avant de comprendre que continuer « c’était perpétuer sa mémoire ». Et pour cela Michel Boujenah reprendra en 2008 le flambeau de directeur artistique. Il l’est toujours.
Encore une fois Jacqueline Franjou avait fait le bon choix. Comme celui de publier ce beau livre :
(1) « Je tenais à laisser quelque chose à tous ceux qui ont aimé le festival» . C’est fait et de belle manière. 1. Jacqueline Franjou dédicacera son livre publié aux éditions du Cherche Midi, demain à partir de 10 heures à la librairie Papiers Collés.